L’armée turque, préoccupée par un amendement législatif qui permet aux tribunaux civils de juger les militaires, a transmis ses inquiétudes au chef de l’État Abdullah Gül, qui doit se prononcer sur l’affaire, a indiqué lundi une source proche du dossier.
Cette loi, demandée de longue date par l’Union européenne à laquelle la Turquie souhaite adhérer, a été votée à la hâte fin juin au Parlement, attisant les tensions entre le gouvernement islamo-conservateur, l’armée et l’opposition pro-laïque.
« Il y des aspects de l’amendement qui inquiètent » les militaires de l’état-major, a souligné cette source à l’AFP qui a requis l’anonymat.
« Ils ont transmis leur vues au département des affaires juridiques de la présidence », a-t-on indiqué de même source, sans d’autres détails.
Le journal Milliyet a indiqué lors du week-end que l’armée juge l’amendement à la loi contraire à la Constitution ainsi qu’à l’inviolabilité des zones militaires.
L’état-major pense que la loi sera source de polémique entre procureurs civils et militaires, selon le quotidien.
Elle ouvre la possibilité pour les tribunaux civils de juger des militaires en temps de paix pour tentative de renversement du gouvernement, atteinte à la sécurité nationale, crime organisé ou violation de la Constitution.
Elle délègue également aux tribunaux civils la faculté de juger des civils en temps de paix pour des délits relevant aujourd’hui du code pénal militaire.
Le président de la République a en principe jusqu’au 14 juillet pour décider s’il approuve ou rejette la loi.
De l’avis général il devrait se prononcer cette semaine.
Cet amendement controversé intervient en plein regain de tensions entre l’armée et le gouvernement du Parti de la justice et du développement (AKP, issu de la mouvance islamiste) après la publication le mois dernier dans un quotidien d’un présumé document interne de l’armée, faisant état d’une volonté de discréditer l’AKP.
L’armée, qui a renversé quatre gouvernements depuis 1960, a annoncé que le document est un faux et a dénoncé une « campagne de diffamation » la visant alors que l’AKP a saisi la justice civile.
L’officier supposé avoir rédigé ce plan a été arrêté la semaine dernière par une Cour d’Istanbul avant d’être libéré moins de 24 heures après, pour manque de preuves.