Le même scénario que celui que nous vécûmes est en train de prendre forme.
En Tunisie la situation évolue brusquement. En mal malheureusement. Il ne s’agit pas d’une surprise, loin de là. Dans ces mêmes colonnes (L’Expression du 10 novembre 2012), nous avions fait part de notre inquiétude en faisant le parallèle entre l’après-88 chez nous et la post-révolution chez nos frères tunisiens.
Après avoir noté que les risques sont grands chez nos voisins car «des indices sont là et il ne sert à rien de les cacher!», nous avions même clairement conclu comme suit: «Tous ces indices et bien d’autres encore laissent croire que ce qui se passe en Tunisie suit exactement le même chemin que celui que certains nous avaient imposé.
Encore une fois, c’est le même topo que celui que nous avons vécu.

C’est la même haine aveugle qui a frappé ce mercredi chez nos frères tunisiens. Le même scénario que celui que nous vécûmes est en train de prendre forme. D’abord, on fait état de l’existence de certains campements avec armes, ensuite on apprend que des commissariats ont été l’objet d’attaque et puis voilà que les hommes commencent à tomber sous les balles assassines de bourreaux jaillis de la caverne de l’incroyable mépris de l’humain. Et quels hommes! Exactement les mêmes que chez nous. La première cible de cette haine viscérale incomprise et incompréhensible est ce grand militant défenseur des droits de l’homme, Chokri Belaïd. Qui ne le connaît pas à travers ses multiples apparitions à la Télévision tunisienne, ces apparitions dont il faisait à chaque fois une véritable plaidoirie pour la défense des valeurs les plus ancrées dans notre société maghrébine, ces valeurs de respect et de dignité qu’il essaie toujours d’ériger en principe certes, mais aussi en repères à construire ensemble, dans la diversité et la considération réciproque.
Deux balles, l’une dans la tête et l’autre dans le cou ont emporté à jamais cet homme à l’esprit large et à l’argument irréprochable, exactement comme le furent chez nous Djillali Liabès, Tahar Djaout, Saïd Mekbel, Abdelkader Alloula et tous ceux que la lâche main avait pointés.
Pour notre cas, nous regardions ahuris ce qui nous arrivait et nous nous demandions quand cela allait finir. Chaque jour nous pensions que c’était la fin du terrorisme et à chaque victime nous espérions que ce fut la dernière. Fuis par tous, abandonnés par tous, nous faisions l’apprentissage de ce nouveau monstre et il nous fallut de très longues années pour vaincre la bête.
Aujourd’hui, nos frères tunisiens savent ce à quoi s’en tenir. Lorsque la haine frappe une fois, elle revient plusieurs fois. Elle revient toujours. Nous n’avions pas d’expérience, ni la nôtre ni celle d’autrui, par contre, nos voisins peuvent, en s’appuyant sur notre expérience, comprendre que l’on ne badine pas avec ce phénomène. On ne tergiverse pas avec non plus.
Déracinez donc le mal. Allez aux profondeurs de cette haine pour en extirper les racines et détruisez-la à jamais, sinon le compte à rebours qui a commencé ne s’arrêtera plus.
La gangrène, une fois qu’elle commence ne s’arrête plus. Il faut vite agir et fortement.