L’armée tunisienne menait hier, vendredi, une opération pour «éradiquer» un groupe armé à la frontière algérienne où huit soldats ont été sauvagement tués. Pendant ce temps la crise politique continue à miner le gouvernement.
Lors de cette opération «de grande ampleur», des accrochages ont éclaté dans la nuit au mont Chaambi, où l’armée traque depuis décembre un groupe appelé «Phalange Okba Ibn Nafaâ», soupçonné d’être lié à Al-Qaîda et de compter des vétérans de la rébellion islamiste du Nord-Mali. Selon le porte-parole de l’armée, «une opération de grande ampleur, avec usage d’unités aériennes et terrestres, a débuté à l’aube pour assainir la montagne» Chaambi.
«Les opérations vont se poursuivre jusqu’à leur éradication», a-t-il dit. Le porte-parole et une source sur place ont indiqué que l’armée n’était pas en mesure d’estimer le nombre de combattants. Aucune nouvelle information n’avait filtré, jusqu’à présent, sur ces manœuvres, mais le cabinet du premier ministre a annoncé une conférence de presse sur ces événements, ce samedi, en début d’après midi. Dans le même temps, un groupe de militants salafistes a été arrêté dans une mosquée de Kasserine, selon une source militaire. Le ministère de l’Intérieur a aussi annoncé qu’un «extrémiste religieux» s’était tué et avait blessé sa femme chez lui près de Tunis en manipulant des explosifs. Dans la matinée, le ministère avait déjà indiqué qu’un autre homme avait eu la main arrachée dans des circonstances similaires dans le nord du pays, alors qu’en début de semaine, les autorités avaient fait état d’un attentat raté contre une patrouille de gendarmes au sud de la capitale. C’est au mont Chaambi que huit militaires ont été tués et mutilés dans une embuscade, lundi dernier. Trois autres soldats et un gendarme ont trouvé la mort et une vingtaine d’autres ont été blessés dans ce massif depuis le mois décembre de l’an dernier. L’attaque sanglante de lundi dernier a aggravé une crise déclenchée le 25 juillet par l’assassinat d’un député d’opposition, Mohamed Brahmi, un crime attribué à la mouvance jihadiste. Divers groupes d’opposition et représentants de la société civile, qui n’ont jusqu’à présent pas pu déterminer une position commune, réclament le départ du gouvernement dirigé par les islamistes d’Ennahda. Certains demandent aussi la dissolution de l’Assemblée nationale constituante (ANC), élue en octobre 2011, mais dont les travaux sont dans l’impasse. Ennahda a rejeté ces appels et proposé de former une coalition élargie et d’organiser des élections le 17 décembre. Le Premier ministre Ali Larayedh et le président Moncef Marzouki, un laïc allié aux islamistes, ont mené, jeudi dernier, de premières consultations avec les partis. Les tiraillements sont nombreux aussi dans le camp gouvernemental, un parti laïque allié à Ennahda et deux ministres ayant souhaité la démission du cabinet actuel. Dans la rue, la mobilisation des deux camps se poursuivait une semaine après la mort du député, des milliers de manifestants se rassemblant toutes les nuits, après la rupture du jeûne du ramadan, devant l’ANC. Si les détracteurs du régime sont plus nombreux, Ennahda a appelé à une grande manifestation «contre le terrorisme» et pour défendre sa légitimité, ce samedi, tard, place de la Kasbah à Tunis, où siège le gouvernement.
R. I. / Agences
Lettre de menace
Un colis suspect contenant une lettre de menace adressée aux autorités tunisienne et appelant à cesser l’opération militaire en cours à la frontière algérienne a été découvert à Tunis, a indiqué samedi le ministère de l’Intérieur, selon l’agence officielle TAP. Le ministère a expliqué que le colis «retrouvé lors d’une patrouille de routine» dans un quartier de Tunis était composé d’une boîte en carton remplie de «fils métalliques ne comportant pas de produits explosifs» et contenait une lettre «adressée aux unités sécuritaires et à l’armée les appelant à se retirer du Mont Chaambi».