Des tensions apparaissent entre laïcs et pro-islamistes sur fond de crise économique aux retombées catastrophiques sans précédent.
Les policiers tunisiens ont dispersé, hier, samedi, des manifestants pro-islamistes après de violentes échauffourées devant le siège de l’Assemblée constituante à Tunis.
«Les islamistes nous ont attaqués et ont jeté des pierres, la police a fait usage de gaz lacrymogènes», a indiqué à une représentante des «sit-inneurs», un groupe de protestataires, qui ont installé un campement depuis presque une semaine devant le siège de l’Assemblée. «Le sit-in continue, on reste. Mais les agresseurs nous provoquent, ils sont restés et nous attendent à tous les coins de rue», a-t-elle ajouté. «Un groupe de sympathisants salafistes ont jeté des pierres sur les sit-inneurs», a confirmé le porte-parole du ministère de l’Intérieur.
Des milliers de manifestants pro-islamistes, dont des salafistes, avaient convergé, hier samedi, devant le siège de l’Assemblée constituante à Tunis, une «contre-manifestation» organisée pour répondre aux sit-inneurs. Ces derniers, qui regroupent des chômeurs, des enseignants, des militants de gauche, réclament «liberté, travail et dignité». Les deux camps se sont fait face toute la journée dans une ambiance tendue et les incidents ont éclaté en début de soirée. Par ailleurs, des incidents séparés se sont produits dans le centre de la capitale, avenue Bourguiba, après la défenestration d’une jeune fille de 19 ans, morte sur le coup après être tombée du 4e étage d’un hôtel. Les foyers de tension se multiplient depuis quelques semaines en Tunisie, confrontée à un chômage endémique, à la crise économique et à la montée des extrémistes, le tout sur fond de vacance du pouvoir. Un mois et demi après les élections du 23 octobre, remportées par les islamistes, le gouvernement n’a pas encore été formé. Par ailleurs, le gouverneur de la Banque centrale tunisienne (BCT), Mustapha Kamel Nabli, lors d’un colloque hier à Tunis, a indiqué que la Tunisie réalisera un taux de croissance nul à la fin de l’année 2011. Cette croissance zéro devrait entraîner une baisse du rythme de création d’emplois et une hausse du taux de chômage qui devrait dépasser les 18%, a-t-il ajouté.
Depuis la révolution qui a chassé l’ex-Président, Zine el-Abidine Ben Ali, la Tunisie s’est enfoncée dans la crise, en raison notamment d’une chute spectaculaire des revenus du tourisme, secteur qui représente 7% du PIB et emploie quelque 700 000 personnes. Le patronat du secteur estime «le manque à gagner» en 2011 à 500 millions de dinars (environ 256 millions d’euros) par rapport à 2010. «Les problèmes sociaux sont exacerbés, le moindre différend dans une entreprise dégénère en conflit. Sans compter les interventions extérieures, comme des chômeurs qui viennent paralyser une entreprise pour réclamer du travail», constate M. Elloumi un représentant de l’organisation patronale tunisienne Utica.
R. I. / Agences