TUNISIE ,Les islamistes ratent leur marche

TUNISIE ,Les islamistes ratent leur marche
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Miné par une grave crise organique, le parti islamiste Ennahda se cherche une voie de salut. Samedi, il a exhibé ses troupes dans les rues de Tunis pour se défendre contre ceux qui le somment de quitter pouvoir.

De son intérieur, comme de la part de ses adversaires politiques. A l’appel d’Ennahda, quelque milliers de personnes (15 000, selon l’AFP) ont manifesté samedi à Tunis. Un défilé comme on a vu partout où l’islamisme politique a germé. «Le peuple veut Ennahda», avec la légitimité et pour l’unité nationale», ont scandé les manifestants qui ont cheminé avenue Bourguiba, au centre de Tunis. Comme cibles, les islamistes d’Ennahda ont désigné, outre les médias, les dirigeants de l’opposition, l’ex-Premier ministre post-révolutionnaire Beji Caid Essebsi et, bien entendu, la France qu’ils accusent d’ingérence dans les affaires intérieures de la Tunisie. Mais la manifestation de ce samedi est également dirigée contre le Premier ministre Hamadi Jebali, issu du rang d’Ennahda, qui, immédiatement après l’assassinat de l’opposant politique Chokri Belaïd, avait annoncé qu’il allait dissoudre le gouvernement et nommer un cabinet de technocrates. Hamadi Jebali devait concrétiser sa promesse ce samedi. Cependant, il a dû y surseoir, pour poursuivre les consultations avec la classe politique et les personnalités tunisiennes. Ces consultations devraient reprendre lundi. Toutefois, le Premier ministre ne renonce pas à son idée. Il essaie juste d’obtenir le consensus le plus large possible autour de son projet de remodelage du gouvernement. Son parti Ennahda s’est élevé contre la décision de Jebali dissoudre le gouvernement. Il l’a fait savoir aussitôt l’annonce faite le Premier ministre. Ce dernier s’est, par la suite, déclaré décidé aller au bout de sa logique. Conséquence : fracture au sein d’Ennahda entre modérés et radicaux. Ce samedi, ce sont encore les radicaux qui ont manifesté pour faire pression sur Jebali et l’amener à départir de son idée. Le parti Ennahda avait déjà organisé une première marche le 9 février dernier pour se défendre contre les accusations qui ont plu quant à son implication dans l’assassinat 3 jours avant de Chokri Belaïd mais aussi pour défendre l’Assemblée nationale constituante où il détient la majorité. La marche fut un flop.

Elle avait drainé tout juste 3 000 personnes. Alors que les funérailles, la veille, de l’opposant politique assassiné, avaient vu la participation de prés de 1, 5 million de personnes. La multiplication des exhibitions de rue, stratégie chère aux islamistes, se veut, chez Ennahda, un exercice d’exorcisme contre ses propres «démons». Le vice-président du parti, Abdelfattah Mourou, a, dans un entretien à la revue française Marianne, accusé Rachid Ghanouchi de mener, par son extrémisme, Tunisie vers l’abîme.

Sofiane Aït Iflis