La Constituante tunisienne doit entamer demain le vote d’adoption de la future Constitution. A quelques heures de ce vote, aucun projet complet n’a été diffusé malgré d’intenses tractations.
La Tunisie, qui a vécu tout au long de l’année 2013, une crise politique grave, nourrie par la méfiance entre les islamistes au pouvoir et l’opposition, une situation socioéconomique et une menace terroriste, réussira-t-elle à sortir la tête hors de l’eau ? Selon le parti islamiste Ennahda, le texte finalisé le 1er juin 2013 et rejeté par l’opposition sera soumis aux élus avec en annexe les compromis trouvés avec l’opposition en décembre dernier.
« Les compromis trouvés n’ont pas été intégrés au projet et des articles peuvent en soi encore être ajoutés (…) on n’est donc pas à l’abri d’une surprise de dernière minute sur l’aspect religieux par exemple », tempère Nadia Chaâbane, députée du Parti Massar (opposition). « Je reste méfiante », dit-elle. Ennahda n’a eu de cesse de rappeler avoir renoncé dès le printemps 2012 à l’intégration de la charia dans la loi fondamentale.
Le parti a obtenu en retour plusieurs références à l’islam dans le texte. Mme Chaâbane estime aussi que la soudaine « précipitation » pour adopter la Constitution va impliquer « un abattage, un timing très serré ». Et « c’est dommage qu’un texte fondateur pour plusieurs générations ne soit pas très bien rédigé », a-t-elle déploré. Elle a prévu une adoption définitive avant le 14 janvier, date du troisième anniversaire de la fuite du président Zine El Abidine Ben Ali qui avait consacré le premier soulèvement du Printemps arabe.
Les députés doivent se prononcer sur un préambule, environ 150 articles et 225 amendements proposés. Après l’adoption de chaque article à la majorité absolue, la loi fondamentale doit recueillir une majorité des deux tiers pour éviter qu’elle ne soit soumise au référendum.
Ennahda insiste pour que l’Assemblée nationale constituante où les islamistes sont majoritaires, puisse continuer à légiférer jusqu’aux élections législatives dont la date reste inconnue tandis que l’opposition veut limiter ses pouvoirs.
D’autres sujets de contentieux semblent résolus, en particulier la question de l’étendue des pouvoirs du chef de l’Etat. Les islamistes voulaient les restreindre au maximum, tandis que l’essentiel de la classe politique voulait des prérogatives partagées avec le chef du gouvernement. Le chef de l’Etat aura la charge « de déterminer les politiques générales dans les domaines de la défense, des relations extérieures et de la sécurité nationale », selon l’agence TAP. Il pourra aussi imposer un vote de confiance au Premier ministre et aura un droit de dissolution limité du Parlement.
Djamel B.