En raison de la situation intérieure, le président tunisien, Moncef Marzouki, a dû annuler son déplacement au sommet de l’ONU sur le développement durable.
Un communiqué de la présidence fait état de cette annulation et le président tient à suivre l’évolution de la situation intérieure de son pays. La Tunisie a connu lundi et mardi une flambée de violences qui a poussé les autorités à instaurer un couvre-feu nocturne sur huit régions du pays, dont la capitale Tunis. Ce dernier a été levé vendredi soir.
Des groupes de salafistes et de casseurs avaient attaqué et incendié des postes de police, des sièges syndicaux, des locaux de partis d’opposition et un tribunal dans plusieurs villes du pays, suite à une exposition d’art dont des œuvres ont été jugées blasphématoires par des extrémistes. Ces événements ont conduit le gouvernement en place à adopter, pour la première fois, une ligne ferme vis-à-vis des salafistes, un revirement imposé par les circonstances, qui cache mal les faiblesses de l’Exécutif et du parti islamiste dominant face à la pression extrémiste, selon des analystes. Interdiction de toutes manifestations vendredi, déploiement sécuritaire dissuasif, sanction contre un imam radical : les autorités ont fait preuve ces dernières 24 heures d’une fermeté inédite. Pour les observateurs, «le gouvernement a eu tellement peur que ça dégénère qu’il n’avait d’autre choix que de faire preuve de fermeté. C’était ça ou le chaos». Comment expliquer la brusque flambée de violences ? «Le pari de Rached Ghannouchi (chef d’Ennahda) était de bénéficier de la base sociale des salafistes, en échange de quoi le gouvernement était relativement tolérant vis-à-vis d’eux. C’est un pari qui a fonctionné jusqu’à maintenant, mais il est en passe d’échouer», jugent des politologues. «Ennahda a laissé les salafistes s’organiser et, d’un coup, la créature leur échappe», renchérit une source diplomatique.
Dans ce contexte de tension et d’incertitudes, les salafistes avancent leurs pions. Estimés à quelques centaines après la révolution, ils seraient désormais plus de 10 000 en Tunisie. C’est dans ce même contexte qu’un des premiers compagnons de route de l’ancien Président Habib Bourguiba, M. Caïd Essebsi, tente d’endosser le costume de sauveur. Le retour de l’ex-Premier ministre de Bourguiba, de 80 ans, sur la scène politique, annoncé depuis plusieurs semaines, intervient dans ce contexte politique délétère, car outre la question sécuritaire, le gouvernement est aussi critiqué pour son incapacité à faire face aux défis économiques, tandis que l’opposition de gauche demeure très divisée par des querelles de chapelles.
R. I. / Agences