L’ex-chef d’état-major français et ex-ambassadeur en Tunisie, l’amiral Jacques Lanxade, estime que « c’est l’armée qui a lâché » le président tunisien Zine El Abidine Ben Ali et qu’elle peut être un « élément stabilisateur » pour sortir du chaos, dans une interview à la presse. Pendant 23 ans de pouvoir, Ben Ali s’est davantage appuyé sur la police que sur l’armée au point ou la Tunisie était considéreé comme un Etat-policier.
« C’est l’armée qui a lâché Ben Ali quand elle s’est refusée – à l’inverse de la police du régime – à faire tirer sur la foule » pendant les manifestations de la semaine passée, déclare l’amiral Lanxade dans une interview au Parisien dimanche, selon un compte rendu publié par l’AFP. « Chef d’état-major de l’armée de terre, le général Rachid Anmar a démissionné en refusant de faire tirer l’armée et c’est probablement lui qui a conseillé à Ben Ali de s’en aller en lui disant: « tu est fini », ajoute l’amiral.
« L’armée qui – même sous Ben Ali – a toujours été tenue à l’écart de la politique et n’était pas partie prenante dans la direction des affaires du pays, est une armée assez républicaine. Je crois que l’armée est un élément stabilisateur et modérateur. Ce n’est pas une armée de coup d’Etat, même si je peux me tromper », dit-il. « Mais il ne faudrait pas que, faute de trouver une organisation politique pour assurer la transition, l’armée soit obligée d’apparaître en première ligne. Il ne me semble pas que l’on aille dans ce sens-là et l’armée n’y pousse pas du tout », ajoute-t-il.
Au pouvoir depuis 23 ans, Zine El Abidine Ben Ali a fui son pays vendredi 14 janvier après un mois de manifestations réprimées dans le sang. Ben Ali et une partie de sa famille ont trouvé refuge en Arabie Saoudite.
Ancien chef des services de renseignement sous Bourguiba avant de renverser ce dernier en novembre 1987 suite à un « coup d’Etat scientifique », Ben Ali s’est davantage appui sur la police ainsi que sur les militants du RCD (Rassemblement démocratique constitutionnel) que sur l’armée pour asseoir son règne. La Tunisie compte 200 000 policiers pour 11 millions d’habitants, le ministère de l’Intérieur emploie 100 000 personnes, le RCD aligne 1 million de membres alors que les forces armées tunisiennes comptent près de 36.000 hommes selon l’Institut international d’études stratégiques (IISS).
Le Conseil constitutionnel a proclamé samedi « la vacance définitive du pouvoir » et la nomination de Foued Mebazaa, président du Parlement, au poste de président de la République par intérim. Selon la Constitution, des élections présidentielles et législatives doivent être organisées dans un délai de 60 jours.