Par Reghis Rabah*
En Angola, le secteur pétrolier agonise par manque d’investissements, selon le dernier rapport mensuel de l’OPEP sur les performances de ses membres, et il a été révélé qu’au premier trimestre, le pays lusophone a produit 1,574 million b/j, contre 1,633 million b/j au dernier trimestre de 2017. Les factions armées ont arrêté la production des champs pétroliers de Sharara et de Waha, ce qui fait chuter de 252.000 barils la production quotidienne libyenne à moins de 500.000 barils. Enfin la menace pèse sur le brut Iranien à partir du 4 novembre, deadline arrêté par Trump pour avertir les principaux partenaires de ce pays de l’entrée en vigueur effective des sanctions suite à son écart de l’accord de 2015, les prix du baril du brut après un petit rebond à 79 dollars ont commencé à chuter progressivement. Est un nouveau paradoxe ? Pourtant les faits en disent autrement. Le centre des décisions passe désormais entre les mains du président américain. En préparation intensif de son mi mandat en novembre prochain, Trump ne veut pas que son électorat roule avec une essence chère dans Etats américains et en même temps reste conscient et se prépare pour les conséquences de la décision qu’il a prise de quitter les accords de Joint Comprehensive Plan of Action » (JCPOA) signé par les six puissances mondiales le 14 juillet 2015. En demandant à l’Arabie Saoudite d’augmenter sa production de 2 millions de barils par jours, Trump vise le court et le moyen terme. En tout cas, selon le communiqué, le conseil des ministres du royaume a pris connaissance, de la teneur de la conversation téléphonique du roi Salmane avec le président Trump à ce sujet. L’Arabie reste disposée, à travailler à la stabilité du marché » en coordination avec les autres pays producteurs » sous entendu les non OPEP dont le chef de fil est la Russie. En termes simples, elle produira les deux millions dont un tout de suite et le reste au début des sanctions en novembre prochain. Cela selon toute vraisemblance elle donnera assez de temps pour se préparer techniquement à cette éventualité. Contrairement à ce qui est dit ici et là, le calcul est fait avec une précision par le département américain de telle sorte à résorber le déficit de l’offre causé par les incidents des pays cités plus haut afin de maintenir le prix du baril au niveau décidé par la Maison Blanche c’est-à-dire autour de 75 dollars. Contre toute attente et prévision d’experts, les réserves américaines de brut ont augmenté la semaine dernière, selon les données publiées jeudi par l’Agence américaine de l’Energie (EIA), alors que les marchés et les analystes tablaient sur une nouvelle baisse d’environ 5 millions de barils par jour.
Cette hausse était principalement due à une montée des importations nettes d’autant plus que les exportations ont légèrement reculé. Ceci n’a pas empêché le président de lancer dés vendredi les hostilités commerciales avec la Chine en imposant des droits de douane sur des dizaines de milliards de dollars de produits chinois. Une telle mesure devrait appeler la réciprocité de la Chine sur les produits américains. Cette realpolitik que mène Trump tout azimute semble donner ses fruits en consolidant son électorat. Même ses opposants applaudissent tout bas le contraire de ce qu’ils clament tout haut.
1- l’Iran, conforté par les cinq puissances, menace l’Arabie Saoudite
Pour Macron, dénoncer cet accord est « une lourde erreur ». Fin avril, devant le Congrès des Etats-Unis, il laissait entendre qu’un compromis était à portée de main. Il s’agissait de reprendre l’accord de 2015, en lui ajoutant trois autres « piliers » : interdiction de toute activité nucléaire militaire au-delà de 2025, contrôle de l’activité balistique et de l’influence militaire iranienne dans la région. Mais après une conversation téléphonique avec Trump, Macron se disait « lucide ». La priorité, pour lui, est désormais de « construire le deal évoqué lors de son voyage à Washington », a expliqué l’Elysée au quotidien françcais Libération. La chancelière allemande, Angela Merkel, a elle aussi tenté sa chance avec le président américain sans succès. Finalement, ce sont les Britanniques qui sont revenus à la charge, avec une méthode un peu différente. Privé de rencontre avec Trump alors qu’il était en déplacement à Washington, le ministre britannique des Affaires étrangères, Boris Johnson, avait tenté de flatter le président américain en affirmant à la télévision qu’il pourrait être un candidat parfait au Nobel de la paix s’il réussissait à préserver l’accord iranien en plus de faire plier la Corée du Nord sur son programme nucléaire. Conforté donc par un tel soutien, le premier vice-président iranien, a assuré que son gouvernement a un plan pour « mettre en échec ce slogan des États-Unis selon lequel le pétrole de l’Iran doit être endigué », alors que les sanctions américaines doivent reprendre le 4 novembre. Maintenant ils supplient les Saoudiens d’augmenter leur production de pétrole de façon que si la part de l’Iran diminue, rien ne se passe sur le marché mondial. Ils pensent que c’est aussi simple que cela, et que d’un seul coup l’Arabie va augmenter de quelque millions de barils de pétrole » par jour, a commenté Eshagh Jahangiri. « Dans ce combat, tout pays qui voudra prendre la place de l’Iran sur le marché pétrolier se rendra coupable de haute trahison contre la nation iranienne et » paiera assurément un jour le prix de cette trahison « , a-t-il ajouté sans plus de détail. L’Iran et l’Arabie saoudite ont rompu leurs relations diplomatiques en 2016 et sont engagés dans une lutte d’influence au Proche et au Moyen-Orient. Avec la normalisation tant attendu du moins du côté du royaume de ses relations avec les Etats Unis, il est probable que l’éclatement de l’OPEP a dorés et déjà commencé. L’Iran cherchera une alliance solide avec l’Irak et le Venezuela.
2- Les raffineurs commencent à bouder le pétrole Iranien
Les raffineurs européens, au premier rang desquels Total, se préparent à arrêter leurs achats de pétrole à l’Iran, fermant ainsi la porte à 20% des exportations de brut de ce pays de peur des représailles des sanctions en application de la loi de l’extraterritorialité. Même si les pays européens n’ont pas suivi les Etats-Unis dans leur décision en mai de se retirer de l’accord de 2015 sur le nucléaire iranien, banquiers, assureurs et spécialistes du transport maritime rompent progressivement leurs liens avec l’Iran. Que disent -ils » Nous ne pouvons pas nous permettre de défier les Etats-Unis « , a dit une source haut placée au sein de la compagnie italienne Saras, qui exploite une raffinerie en Sardaigne d’une capacité de 300.000 barils par jour (bpj), propos rapportés par un journal Italien. Saras s’efforce de déterminer la meilleure manière de mettre fin à ses achats de pétrole iranien dans la période autorisée de 180 jours, a poursuivi la source, ajoutant: » On ne sait pas encore précisément ce que peut faire l’administration américaine » mais dans les faits, » nous pourrions avoir des problèmes. » Cette chute des importations européennes de pétrole iranien pourrait compliquer les efforts des pays de l’UE signataires de l’accord de 2015 (France, Allemagne et Grande-Bretagne) pour tenter de convaincre l’Iran de continuer à respecter ce pacte, malgré le retrait des Etats-Unis. Des raffineurs parmi lesquels le français Total, les italiens Eni et Saras, les espagnols Repsol et Cepsa et le grec Hellenic Petroleum se préparent à arrêter leurs achats de pétrole iranien dès que les sanctions seront rétablies, déclare la même source.. Ces raffineurs effectuent l’essentiel des importations européennes de brut iranien, qui représentent elles-mêmes environ un cinquième des exportations pétrolières de la République islamique, membre de l’OPEP. Les ventes iraniennes de brut à des acheteurs étrangers ont atteint en moyenne environ 2,5 millions de bpj ces derniers mois, selon des données recueillies par Reuters et l’institut européen de la statistique Eurostat. L’essentiel de ces exportations est allé vers l’Asie.
Ces entreprises européennes, dont la plupart ont signé des contrats de long terme avec la compagnie publique iranienne, vont continuer à acheter des cargaisons de pétrole iranien jusqu’à ce que les sanctions américaines entrent en vigueur. Total, premier raffineur d’Europe, a fait savoir par sa cellule de communication qu’elle ne compte pas demander de dérogation pour continuer à traiter avec l’Iran au-delà du 4 novembre. ENI a dit pour sa part avoir un contrat avec l’Iran, expirant à la fin de l’année et portant sur l’achat de deux millions de barils par jour. Repsol et Hellenic Petroleum restent indécises mais négocient d’ors et déjà une alternative. Cepsa quant à elle reste prudente et se remet à la réglemention de l’Union Européenne sachant pertinemment que cette institution reste impuissante. Cependant, à la différence de Total, certains raffineurs comme Cepsa envisagent de solliciter une dérogation auprès des Etats-Unis pour pouvoir continuer à acheter du pétrole iranien au-delà du 4 novembre afin de respecter leurs engagements contractuels vis-à-vis de l’Iran. Les raffineurs européens pourront substituer aux importations en provenance d’Iran du pétrole de Russie ou d’Arabie saoudite, ont déclaré leurs agents de négoce à l’agence Reuters. Les importateurs asiatiques de pétrole iranien devraient eux aussi réduire leurs achats. L’indien Relance Industries, propriétaire du plus grand complexe de raffineries au monde, prévoit ainsi de cesser d’importer du brut d’Iran, ont dit la semaine dernière deux sources proches du dossier. La Chine ne dit rien pour le moment car ses entreprises pensent sans grande conviction rafler les marchés en cours qui seront abandonnés par celles européennes et américaines.
*Consultant et Economiste Pétrolier