Troisième édition des journées cinématographiques d’Alger,Destinées de femmes

Troisième édition des journées cinématographiques d’Alger,Destinées de femmes

L’affiche d’un des documentaires projetés à la Cinémathèque d’Alger

La première projection sous le titre Femmes en pauses a pris pour objectif de chercher le devenir de la femme en la questionnant sur ses aspects les plus dissimulés.

Trois documentaires ont été projetés ce lundi après-midi à la cinémathèque d’Alger à l’occasion des Journées cinématographiques d’Alger. Femmes en pauses, Femmes réfugiées, ont été réalisés par Paola Palacios ainsi que Langue de Zahra de Fatima Sissani. Le trait d’union de ces trois projections s’est caractérisé par l’ensemble des témoignages de femmes aux quatre coins du monde, dont les cultures, les besoins et les quêtes varient. Des femmes libres et fortes, des femmes à l’épreuve des tragédies, des femmes qui se cherchent et qui s’interrogent.

La première projection sous le titre Femmes en pauses a pris pour objectif de chercher le devenir de la femme en la questionnant sur ses aspects les plus dissimulés. Elles se sont exprimées sur des thèmes qu’on considère dans certaines sociétés, comme étant tabous.

Elles sont aussi émancipées comme semblent le démontrer les propos des sujets interrogés sur le documentaire. Par ailleurs, la réalisatrice a tenté d’épousseter tout une masse d’appréhensions qui croulent sur la femme où qu’elle soit dans le monde et quoi qu’elle fasse comme travail.

Ces dernières, issues de différents horizons, du Japon, de France, d’Espagne et de Tanzanie ou d’Equateur se sont librement exprimées sur des thèmes qui ont traité de la ménopause, du traitement hormonal ainsi que de la sexualité chez la femme, avec ses besoins et ses angoisses.

Elles se sont questionnées et affirmées face aux changements de leur corps, loin de s’enliser dans le brouillard d’amalgames et les entraves psychologiques du désir. Qu’elles soient mères, épouses, femmes au foyer, grands-mères ou femmes actives avec des professions de gynécologues qui ont le désir d’êtres femmes avant tout.

Accomplies, après être devenues des femmes sans autres soucis que leur propre épanouissement, loin du simple «appareillage de reproduction» selon les propos d’un sujet filmé. Un film qui s’est distingué par la qualité d’une photographie soignée et d’une vision sommaire sur l’implication de la gynécologie face aux nouveaux traitements qui s’avèrent souvent froids et insensibles aux exigences de la femme.

Le documentaire s’est conclu sur un sentiment d’indépendance, de confiance et d’audace avec la force de l’âge.

Le second documentaire s’est aventuré dans les méandres de l’immigration clandestine des femmes, avec un nombre de plus en plus effarant de fugitives venues surtout d’Afghanistan, d’Ouzbékistan puis d’Iran et de Russie et même du Congo.

Elles ont fui vers l’Europe de l’Est, plus particulièrement l’Ukraine. Que ça soit la guerre ou un régime oppressant, elles ont en commun une profonde tristesse et un parcours extrêmement douloureux.

Une série de témoignages poignants, inédits, traités sobrement par la caméra. Des réfugiés pour la plupart cachés sous le flou d’images, cette fois voilées par une menace permanente.

Effectivement, et selon les autorités ukrainiennes, plusieurs risques, notamment de commerce et de trafic de femmes, le viol et les rapts, viennent noircir le chemin sinueux que prennent désespérément des femmes vulnérables et souvent seules. Les cas semblent répandus, la plupart ont bravé des dangers dans leur pays d’origine et au cours de leur évasion, pour arriver dans des lieux sursitaires sans sécurité, loin du mari, ou des enfants, elles doivent encore faire face aux autorités, aux services de l’immigration, aux procédures pour obtenir un visa temporaire, pour une apparence de vie meilleure.

Toute une escale dans l’enfer de la perte et de l’isolement. Un historique a été dressé sur les traces d’un humanisme et d’une conscience sur la protection des exilés et des immigrés, qui ont disparu avec le temps pour laisser place à une méfiance et une crise économique en Ukraine.

Un mur invisible vient entacher l’Europe et désigner tout un monde inhospitalier. La dernière projection, la langue de Zahra s’est affiché en image d’ouverture sur de vieilles femmes kabyles au balcon sur un paysage rugueux, composé de montagnes, «d’azrouth» et narguant l’exil de leurs enfants, dans un lointain plus accommodant que leur village perdu.

Le documentaire s’est imposé grâce à l’humour et la tendresse de Zahra, une vieille femme kabyle et authentique. Zahra répond aux questions de sa fille, sur sa vision des deux rives. Entre les deux pays France et Algérie, dans lequel la famille a dû concilier son choix.

Interrogée par sa fille sur son refus d’apprendre la langue française et du pourquoi de son indifférence de porter des habits occidentaux, la hadja reste songeuse et magnanime sur son amour du pays, elle, qui rappelle par moment le poème de Si M’hand, «la sérénité est un nid» et en conteuse d’histoires, elle raconte des anecdotes parfois drôles et parfois douloureuses.

Un documentaire dans lequel Fatima Sissani a tenté d’apporter une vision plus sage et plus gaie de l’exil.

Des défis tels que la maturité, l’exil, et l’accomplissement. Les thèmes évoqués n’ont bénéficié malheureusement que d’une faible présence de spectateurs.

Des notions parfois embarrassantes pour le public algérien. Des documentaires qui ont la force de dénoncer et montrer des réalités tragiques, lumineuses et interrogatives, entre tabous, exil et affirmation de soi, et qui auront peut-être permis de mieux représenter un monde des femmes sous tous ses états.