Le siège de l’Union européenne
La classe politique algérienne drivée par le FLN est vieillissante dans ses approches et en totale déconnexion avec le monde qui l’entoure. L’Algérie a besoin d’un réel processus de rénovation.
Vue de Bruxelles, l’Algérie apparaît comme un pays contradictoire: politiquement stable mais fragile, économiquement viable mais vulnérable et un gisement incommensurable d’énergie mais difficilement accessible. Un pays très dur à la négociation mais qui ne tire pas profit de ses exigences brandies à chaque rencontre. Où se situe la part de vérité de ces confidences distillées à une délégation de journalistes algériens qui se sont déplacés du 1er au 5 décembre derniers à Bruxelles pour rencon-trer des responsables européens en charge du dossier algérien et maghrébin? Rongés par une crise économique sans précédent, effrayés par l’amenuisement des ressources énergétiques, les 28 pays de l’Union européenne lorgnent leur plus grand voisin du Sud qui affiche une opulence aguichante en ces temps de crise. «La guerre» est donc ouverte entre Alger à qui on reproche un manque de volonté d’ouverture économique, une stagnation politique et une absence de transparence dans la gestion et Bruxelles qui accentue la pression pour avoir sa part du «gâteau» algérien.
«L’Algérie doit trouver son propre chemin pour la transition démocratique. Elle doit faire des efforts pour transformer sa classe politique», soutient le vice-président de la Délégation pour les relations avec les pays du Maghreb, Maura Barandiaran estimant qu’il y a une opinion favorable à cela et qui s’est dégagée depuis les élections législatives de mai 2012. Il apporte, cependant, cette précision qu’il ne faut pas confondre avec la stabilité qui est le fondement d’un Etat de droit et la stabilité dans l’autoritarisme. Cette tendance à pousser l’Algérie vers plus de réformes politiques, se trouve très prononcée au sein des membres de la Délégation pour les relations avec les pays du Maghreb. L’Algérie donne l’image d’un pays qui s’est replié sur lui-même, en contraste total avec le monde globalisé. Cela d’une part, de l’autre, il y a un réel vieillissement de la classe politique dans ses approches. A ce sujet, le FLN a eu la part belle de la critique puisque la délégation estime que le vieux parti porte bien son nom. «Le FLN, dont j’ai épousé les idées, qui a libéré le pays est resté avec ces mêmes idées et les mêmes concepts alors que le monde a changé. L’Algérie a besoin d’un processus de rénovation, ce qui n’est pas le cas actuellement», note Antonio Panzeri, membre du Parlement européen non sans souligner que «l’Algérie a entamé des progrès dans le sens de la démocratisation mais beaucoup reste encore à faire».

M.Panzeri craint que le manque de processus de réformes concrètes ne crée un vide qui serait occupé par des tendances extrémistes. «L’Algérie a engagé son processus de démocratisation durant les années 1990, elle a connu les affres du terrorisme, mais il est maintenant temps qu’elle se détache de ce passé», conseille-t-il. Il cite alors pêle-mêle des situations contradictoires au sein de la société algérienne. L’épisode de la guerre civile est différemment intériorisé autant chez l’ancienne génération que chez la nouvelle qui ne connaît pas grand-chose sur cette période, il y a aussi une différence du niveau de vie, d’accès à certaines choses entre les citoyens des grandes villes et les régions isolées. Il ressort qu’il y a une réelle angoisse, beaucoup d’interrogations qui incriminent ces responsables envers l’avenir politique de l’Algérie. Pour la délégation, l’Algérie est un pays qui doit faire face à de multiples défis mais elle ne pourra le faire que dans le cadre d’une intégration régionale comme la migration et le terrorisme au Sahel, allusion faite à la construction de l’Union maghrébine.
L’Union européenne ne se contente pas de proposer des solutions, elle offre aussi les moyens financiers pour leur mise en oeuvre. Dans le cadre de la nouvelle politique européenne de voisinage, il s’agit de donner plus de soutien aux pays qui montrent plus de capacité de stabilité démocratique, d’intégration interrégionale (UMA) et, enfin, comment gérer les flux migratoires et comment entamer une migration circulaire selon laquelle les immigrés peuvent circuler librement.
7.3 millions d’euros pour les médias algériens
L’Union européenne a adopté en octobre dernier un programme d’appui aux médias algériens d’un montant de 7.3 millions d’euros. L’annonce a été faite à la délégation de journalistes algériens qui se sont rendus à Bruxelles par Mark Raymaerkers, responsable dans la coopération entre l’Union européenne et l’Algérie. L’objectif de ce programme est d’accompagner les médias publics et privés dans leur transformation progressive professionnelle et leur adaptabilité aux nouvelles technologies. Il s’agit de l’architecture de la mise en oeuvre. L’Union européenne a prévu des formations, des ateliers en suivi des contenus.
Des actions qui ne concerneront pas uniquement la presse écrite, la radio ou la télé mais qui engloberont également les médias digitaux. Quelles sont les activités concrètes, les cibles et les secteurs visés par ce programme? Le responsable affirme qu’il faut attendre d’abord l’issue des négociations avec le gouvernement algérien, on négociera la convention de financement par la suite. Pour sa part, la Fédération internationale des journalistes a annoncé la mise en oeuvre d’un autre programme, le MED Media. Son objectif est d’aider à réformer les médias (dans leurs aspects juridiques, autorité de régulation etc..). Selon les responsables de la FIJ, ce programme impliquera quatre acteurs clés: les faiseurs de décision en Algérie (ministère de la Communication, les députés, etc.), l’Autorité de régulation, les syndicats de journalistes, et les diffuseurs.