Des surcoûts à… la perte de la souveraineté nationale
La chaîne logistique en Algérie dans son segment maritime comporte toujours de graves insuffisances. La situation de nos ports s’est même aggravée. Les délais d’enlèvement des marchandises sont aujourd’hui plus longs qu’au cours de la première moitié des années 2000. Les différents plans de développement depuis l’investiture du président Bouteflika ont certes modernisé les infrastructures dans différents secteurs, mais n’ont guère amélioré la fluidité du commerce extérieur.
Là où il fallait construire de nouveaux ports pour désengorger les anciennes enceintes portuaires, on a investi uniquement dans la réalisation de nouveaux ports de pêche. Comme si l’un ne pouvait pas se faire sans l’autre. Résultat : on est moins compétitif dans ce domaine par rapport à nos voisins. Il suffira qu’on avance dans l’intégration économique du Maghreb — une bonne chose — pour que la plupart de nos opérateurs préfèrent les ports de Tanger et de Tunis pour débarquer leurs marchandises. À cause, en un mot, des tarifs moins chers pratiqués ailleurs et des délais moins pénalisants chez nos voisins.
À cet égard, qu’on retienne cette performance : depuis au moins une décennie, aucun ministre des Transports et/ou du Commerce ou ncore des Finances n’a fait bouger les choses dans ce domaine. Et aucun chef d’orchestre n’a agi pour mettre de l’ordre dans nos ports, en associant les différents ministères concernés et en engageant une large concertation avec les intervenants en vue de deux objectifs : beaucoup plus d’efficacité dans le traitement et l’enlèvement des marchandises ; assainir le secteur de la corruption qui le gangrène. Qu’on récapitule. En guise de mémoire. Tant de réunions ont été tenues depuis les années 1990, tant de décisions ont été prises “sur le papier” pour parvenir aujourd’hui à un aussi piètre bilan : le fiasco.
Résultat de cette anarchie : la corruption s’est propagée comme une lèpre dans ces espaces. Si beaucoup d’agents de contrôle trouvent leur compte dans une pareille situation, l’État, lui, ne cesse de subir des pertes astronomiques à travers les surestaries se chiffrant en plusieurs milliards de dollars, les minorations de valeur et les différents surcoûts liés à la chaîne logistique.
Pis, cette dernière décennie a enregistré la quasi-disparition du pavillon national, une perte de souveraineté qu’on risque de payer cher plus tard en cas de conflit ou de situation d’isolement. Quand on sait que la Cnan aujourd’hui transporte moins de 5% des quantités de marchandises importées, on ne peut que s’alarmer de ce naufrage d’une compagnie emblématique de la puissance de l’État. Dans une telle pagaille, les pouvoirs publics préfèrent la fuite en avant. Aucun responsable n’ose dire “basta”. Une facette du mode de gouvernance actuel qui explique le peu de confiance et de crédibilité qu’accordent nos concitoyens à nos dirigeants.
K. R