Le tracé du tramway est-il difficile à schématiser?
Alors que les tramways d’Alger et de Constantine ont commencé leurs rotations, le tramway d’Oran s’annonce pour très bientôt, celui de Annaba affiche des retards répétés et une discorde d’opinions.
Si tout va bien, le projet sera lancé en 2014, du moins c’est ce qu’avait déclaré le ministre des Transports, Amar Tou, en marge de sa dernière visite à Annaba dans le cadre de la délégation accompagnant le Premier ministre, Abdelmalek Sellal. Pour rappel, retenu pour la wilaya de Annaba en 2004, ce projet structurant a connu des aboutissements qui, selon certaines sources proches du dossier n’avait pas à avoir lieu. Ainsi, à l’origine de la concrétisation du tramway, des problèmes d’ordre technique, mais surtout la divergence de vues quant au tracé que le tramway doit emprunter. Une situation qui, selon le ministre des Transports, nécessite le passage du tramway par le centre-ville de la commune de Annaba, d’où la nécessité du maintien du passage de l’itinéraire par le Cours de la Révolution, première vitrine de toute la wilaya de Annaba.
Une déclaration qui s’est répandue telle une traînée de poudre suscitant la grogne de la population. Notons que le ministre des Transports avait estimé que la réalisation de ce projet, répondant à un programme national, doit être similaire à celui de Constantine et Oran, où le tracé du tramway passe par le centre-ville, oubliant que la superficie nécessaire à Annaba ne permet pas un pareil itinéraire. Ce qui reviendrait à vouloir défigurer, coûte que coûte, l’aspect urbain de cette ville qui souffre déjà de l’incompétence, du laxisme et de l’indifférence de ses gestionnaires. Cela fait 13 ans que le projet du tramway piétine sur les marches d’une étude à l’autre. Plusieurs séances de travail ont été organisées par la commission de l’urbanisme de la commune de Annaba, pour étudier l’avant- projet détaillé de la première ligne de tramway émanant de l’entreprise du Métro d’ Alger, maître de l’ouvrage.
Aussi, plusieurs propositions pour mieux étudier le circuit qui prend le départ de la commune d’El Bouni vers la cité Kouba, ont été faites. Les participants à la première présentation de ce projet ont souligné son importance pour la ville, sans omettre de mettre en relief l’impérative préservation de l’aspect architectural de certains sites de la ville, le Cours de la Révolution surtout.
La proposition du passage du tramway par ce dernier point avait, à l’époque, suscité l’indignation, voire même la révolte de la population, de la société civile et de différentes associations de la wilaya de Annaba, estimant, à l’unanimité, que le passage de ce projet par le Cours de la Révolution, symbole de Annaba, est une atteinte à l’identité de la ville. Depuis, ce projet structurant de la wilaya de Annaba est tombé dans les oubliettes. Pour des raisons qui au moment où nous mettons sous presse, n’ont aucune explication convaincante avancée. Ainsi, la réalisation de ce projet, en respectant le Cours de la Révolution semble impossible sans saccager la vitrine de la ville. Inscrit en 2009 sur un trajet de 21,200 km, comprenant 33 stations, le tramway ne semble pas être souhaité par les habitants de Annaba. «Si ce projet est utopique pour les responsables, il est dévastateur pour nous, dans le cas où il défigure la ville et touche au Cours de la Révolution, la fierté des Bônois», a déclaré un commerçant des arcades du centre-ville. Des propos allant de la contestation aux moyens forts pour stopper cette machine dévastatrice, si situation oblige, nous ont affirmé des habitants, des commerçants, des jeunes et des notables de la ville. «C’est un massacre programmé et prémédité de la ville de Annaba», ont-ils lancé d’une seule voix. Aucun responsable n’est originaire de Annaba, alors aucun ne peut être jaloux pour elle, ont ajouté nos interlocuteurs. Les membres d’une association de quartier ont menacé de mobiliser des milliers de jeunes pour préserver leur Cours de la Révolution. Ce sera un autre octobre 1988 s’ils touchent au Cours, des propos et autres qui donnent froid dans le dos.
Le tracé du tramway n’est pas aussi difficile à schématiser, dira un ingénieur algérien. Le départ peut se faire depuis la gare ferroviaire de Annaba en passant par la façade maritime, la Grenouillère entre autres, Saint Cloud, Valmascor, le Pont blanc et toute la zone ouest de la ville, jusqu’à El Bouni, en passant par plusieurs agglomérations et localités, et le retour se fera au point de départ, la gare en plein centre-ville. Une situation qui arrange toutes les parties, mais surtout qui respecte l’aspect urbain et architectural de la ville de Annaba, a expliqué notre interlocuteur. Selon ce dernier, le projet est une vraie aubaine pour les acteurs en charge de sa réalisation pour se remplir les poches. «Depuis 13 ans, les études se succèdent et la révision du tracé est l’épine de sa réalisation; alors que la solution est plus facile que ce que l’on nous montre. Ces acteurs tous autant que leurs prédécesseurs, nous font rappeler le projet du lac Fetzarra, dont 14 milliards de DA ont été jetés dans sa lagune salée», devait souligner l’interlocuteur. Pour l’heure et pour une fois, habitants, responsables locaux, le maire de Annaba, et les associations sont d’accord sur la préservation de leur ville et exigent pour la réalisation du tramway le respect de l’aspect urbain et architectural, le Cours de la Révolution, notamment. En attendant la réalisation ou non de ce moyen de locomotion, les Annabis n’envient surtout pas leurs concitoyens d’Oran, encore moins de Constantine pour leur tramway. Car ils préfèrent siroter sur les bancs du Cours de la Révolution un thé de chez «Babou «ou «Ben Rabeh», sous la douce brise de l’été.