Le MV Blida, c’est le nom du bateau qui appartient à IBC, une compagnie mixte algéro-saoudienne détenue à hauteur de 49% par la Cnan et à 51% par la société Pharaons, affrété pour le compte de la compagnie jordanienne CTI, a été abordé par surprise par une bande de pirates constituée d’une centaine d’individus lourdement armés qui ont pris possession du bateau.
Ce dernier est un céréalier, du genre navire à petit tonnage de l’ordre de 17 à 18 tonnes. Comme l’Algérie n’a pas importé de céréales ces deux dernières années, certains navires ont été affrétés par d’autres compagnies pour naviguer sur les eaux territoriales internationales. Ce fut le cas du MV Blida qui pratiquait ce qui est communément appelé en marine marchande le cabotage, et ce, en allant de port en port pour transporter toutes sortes de marchandises. Il avait à son bord une pleine cargaison de klinker, un composite d’argile, de calcaire et de soufre entrant dans la fabrication du ciment, qu’il acheminait vers le Kenya. C’est la première fois qu’un bateau battant pavillon algérien est la cible d’acte de piraterie, et c’est également la première fois que les pirates somaliens vont aussi loin pour intercepter un navire. Jusqu’à l’heure rien n’a filtré sur les conditions de détention et le sort des marins captifs, à savoir les 27 membres d’équipage, dont 17 Algériens, 2 officiers ukrainiens, un Jordanien, un Indonésien et une équipe de maintenance constituée de Philippins, et aucune revendication n’est parvenue aux parties concernées. Ici à Alger, on reste prudent et on préfère ne pas communiquer sur cette affaire jusqu’à ce que les ravisseurs se manifestent et formulent des revendications. Même attitude du côté du jordanien ITC, propriétaire de la cargaison et affréteur du navire.
Une cellule de crise a été, par ailleurs, constituée en concertation entre les deux parties et on reste à l’affût de la moindre information pour réagir, notamment en vue d’un premier contact avec les pirates. De toutes les façons, toutes les tentatives de contacter l’équipage sur le navire se sont soldées par un échec, tous les instruments de télécommunication à bord du cargo ayant été certainement mis hors service, les pirates semblant vouloir choisir, à leur convenance, le moment de prise de contact.
Même si des questions se posent, pour la première fois, à l’Algérie en matière de droit maritime international, pour savoir la marge de manœuvre dont dispose notre pays dans le sens d’une éventuelle intervention directe en vue de la résolution de cette affaire de prise d’otages algériens par les pirates somaliens, il s’affiche une certaine sérénité quant à l’issue de cette affaire. Cela pour la simple raison qu’on estime que la zone en question bénéficie d’une très bonne couverture financière par les sociétés d’assurance du transport maritime, qui prend en compte le risque que représentent les pirates somaliens, très actifs dans la région et de plus en plus audacieux.
La piraterie battant pavillon somalien dans cette zone est devenue tellement courante qu’elle a fini par mobiliser les forces navales internationales qui veillent, avec des navires de guerre, sur le golfe d’Aden. Cela n’empeche pas le bilan des navires détenus aujourd’hui par les pirates somaliens d’atteindre les 28 pavillons, avec un nombre impressionnant de marins captifs digne d’une prison d’Etat, soit 654 personnes qui attendent que les négociations leur permettent de se défaire du statut d’otages et de regagner leurs pays respectifs.
Quelques notions de droit international
Puisque la piraterie, par définition, est pratiquée en dehors des juridictions nationales, les poursuites engagées par des Etats souverains contre des pirates constituent une situation juridique exceptionnelle. La résolution du Conseil de sécurité des Nations unies 1918, adoptée à l’unanimité en avril 2010, sur proposition de la Russie, demandait à tous les États d’ériger la piraterie en infraction pénale dans leur droit interne, d’envisager favorablement de poursuivre les personnes soupçonnées de piraterie qui ont été appréhendées au large des côtes somaliennes et de les incarcérer. Une mesure déjà demandée par d’autres résolutions, dont la 1846 de 2008. Une faible minorité d’Etats membres de l’Union européenne sont en conformité avec cette demande.
Farès N