Tlemcen: Aïn Tebouda, gangrenée par la misère et la pollution

Tlemcen: Aïn Tebouda, gangrenée par la misère et la pollution

Habitant une région ravagée par la pauvreté, les villageois d’Aïn Tebouda agonisent dans l’indifférence absolue. Sur place, la réalité est encore plus dramatique que les chiffres.

Autre problème auquel les habitants sont confrontés : les rejets des eaux usées de ce village et de la grande agglomération de Dermam qui affectent la grande plaine d’El Merdja. Une catastrophe écologique qui menace la région.

La Banque mondiale a injecté plus de cinq milliards en vue de redonner vie à cette contrée oubliée et réduire la vulnérabilité urbaine. « Vivre, c’est bon pour vous autres qui habitez au centre. Pour nous, survivre, c’est sans doute ce qu’on a de mieux à faire », dira un homme du haut de ses soixante-dix ans. Ici, les citoyens expriment tout simplement la réalité de leur vécu. En effet, réalité bien plus noire que personne n’ose l’imaginer : chômage, manque d’eau, pauvreté, etc., et pour compliquer encore plus la situation, l’abondance des maisons vétustes.

Plusieurs citoyens nous ont l’interpelés au sujet de quelques familles qui boivent le calice jusqu’à la lie. Cette communauté abandonnée à son sort ne s’occupe que des terres ou de l’élevage.

A Aïn Tebouda ce village, qui n’est pourtant situé qu’à quelques encablures du chef-lieu de la daïra de Sebdou, l’eau se fait rare, malgré une nappe phréatique abondante. Le réservoir d’eau destiné à alimenter les populations est sur le point de céder, suite aux fissures. Danger qui guette deux habitations. Mort certaine au cas où ce réservoir éclaterait. Dans ce territoire, on découvre de modestes habitations qui respirent pour la plupart la misère et l’abandon, dépourvues des conditions les plus élémentaires d’une vie décente. Les ruelles non goudronnées deviennent quasiment impraticables en hiver, nous dit-on sur les lieux, et à chaque précipitation importante, le village est totalement inondé et on patauge dans la gadoue, ce qui rend tout déplacement impossible.

En cette période où la majorité des écoliers sont en vacances, et face à la pauvreté, les enfants jouent pieds nus dehors pendant que des pères de famille et des jeunes rasent les murs, nous regardant d’un air curieux. Les villageois, profondément dépités par leur situation catastrophique, subissent d’autres manques, comme une salle de soins, ce qui oblige en cas de nécessité à faire le parcours du combattant pour rejoindre l’hôpital situé à 7 kilomètres des lieux. « Rien ne va dans cette contrée », dira Tahar Madani.

Usé par le temps et les précarités de la vie dans ce refuge oublié, avec un chômage qui bat son plein, malgré l’existence de terres agricoles qui nécessitent une attention de la part des responsables de l’agriculture pour la réalisation de forages…

Une plaine menacée par les eaux usées

El Merdja. Une immense plaine de terres fertiles qui s’étend sur des dizaines d’hectares se trouve au bord d’une catastrophe écologique. Le seul lieu « propre » dans toute la région est menacé par les rejets des eaux usées des villages Tebdouda et Dermam. Même la nappe phréatique court un grand danger. Les rejets organiques menacent toutes les populations qui vivent de l’agriculture.

Rencontré, un fellah, regard soucieux et avec une voix rauque, nous dira : « Une fois la région contaminée, ça sera trop tard, les terres ne serviront à rien. » Cet agriculteur, parmi tant d’autres, cultive la terre depuis des décennies. Comme les autres villageois, il a vu l’environnement se transformer au fil des ans. Avec les rejets des eaux usées des villages et douars limitrophes, El Merdja cessera sans nul doute de vivre.

Ce lieu, rappelle-t-on, était un espace pour les colonies de vacances lors de la période coloniale, et jusqu’à une époque récente, une destination pour de nombreux touristes amoureux de la nature. L’autre problème, plus grave encore, étant les nappes phréatiques et les forages, qui demeurent exposés à une contamination certaine, surtout si l’on sait que certaines habitations ne disposent pas de réseau d’assainissement. Des puits conçus pour recevoir ces eaux usées sont constatés dans cette région. En effet, les eaux usées continuent à être déversées, sans avoir été traitées, dans l’oued. Des agents pathogènes et la pollution hydrique risquent de porter atteinte à la santé des populations, surtout en cette saison estivale, car la qualité de plus en plus mauvaise de l’eau douce est responsable de la réapparition des maladies, même en consommant des légumes irrigués à partir de ces eaux usées. Ce qui serait grave encore, ce sont les puits dont les eaux non contrôlées pourraient à leur tour porter préjudice aux citoyens.

Un village fragilisé

Fragilisée par le destin, la population de Tebouda doit faire l’objet d’une attention particulière de la part des autorités. Ici, le chômage a poussé ses enfants à pratiquer la vente des stupéfiants, au point où le village a été nommé « Colombie ».

Vieux, jeunes comptent le temps leur filer entre les doigts. Ils rêvent. Ils n’ont plus les moyens de subvenir aux besoins essentiels de leurs enfants.

La majorité des pères de famille sont sans job. On vit sous le seuil de pauvreté. Cette population survit dans un véritable bidonville, si l’on ose dire.

A vrai dire, les conditions de vie sont insupportables. Le centre culturel qui a été réalisé n’a jamais ouvert ses portes et est exposé aux actes de vandalisme. Les champs sont l’unique lieu où jouer au foot, alors que d’autres pratiquent d’anciens jeux ou assiègent les vieux qui tuent le temps avec les jeux de dames. Dans cette contrée, la vie est peu reluisante, et les populations laissées pour compte s’interrogent sur le devenir de leur village qui porte le nom du chahid Boumeddane Mohamed.

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