Tizi-Ouzou. Rapts et meurtres d’enfants : «Rétablissez la peine de mort !»

Tizi-Ouzou. Rapts et meurtres d’enfants : «Rétablissez la peine de mort !»
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Vent de panique, vent de révolte : la Kabylie, a l’instar de ses consœurs de autres régions, est consternée, apeurée et révoltée. Les mots ne suffisent pas à décrire l’atmosphère qui y règne après ce drame qui est sur toutes les lèvres et qu’a connu la région de l’est du pays. Sur les terrasses des cafés, dans les magasins ou les djemaâs, les transports en commun, l’abominable crime de deux anges innocents monopolise toutes les discussions.

La Kabylie, déjà touchée dans sa chair par la série de kidnappings , 71 au total, qu’elle a subis continuellement depuis quelques années, est naturellement celle qui est la plus émue. Bien les rapts dont nous parlons sont l’œuvre de groupes armés terroristes et pour d’autres du grand banditisme.

Rappelons, que la série des kidnappings avait commencé en Kabylie maritime, avec l’enlèvement des patrons de bars restaurants, d’hôteliers avec demandes de rançons, pour s’étendre ensuite aux patrons d’entreprises de travaux publics, d’enfants d’entrepreneurs etc. Le cas les plus marquant fut celui de l’assassinat de Hand Slimana, entrepreneur du versant Nord de la wilaya, suivi de l’exécution barbare du fils de l’entrepreneur Hadjout, à la fleur de l’âge par ses ravisseurs.

Ces actes ont secoué la région et l’ont plongée dans un profond traumatisme à ce jour. Traumatisme vite accentué par les rapts et meurtres d’enfants, êtres frêles et sensibles, à travers certaines régions du pays.

LG Algérie

Pour nous imprégner de l’ampleur de ce traumatisme nous avons fait une virée à travers quatre écoles primaires de Tizi-Ouzou, un collège et un lycée, et deux autres établissements du versant Nord, l’un en ville l’autre dans un village. Micro ouvert. L’inquiétude se lit partout. Il est 17 heures devant une importante école du chef-lieu de wilaya, un attroupement de parents d’élèves attendent la sortie des cours de leurs enfants.

Karim, 44 ans, commerçant nous dira: «Je suis venu chercher ma fille, élève de 4e année. J’avoue que je ne faisais pas cela il ya trois ans et pourtant, à cet époque-là, elle était toute petite, je la faisais juste accompagner par son frère aîné qui est actuellement au collège. Je tremble à l’idée de la voir kidnappée».

Farida, employée dans un cybercafé nous raconte : «Je viens pour mon fils et la fille de ma voisine de palier. Nous nous sommes entendues : un jour c’est moi, un jour c’est elle qui vient les chercher. Nous refaisons le parcours le lendemain au collège, là où pourtant les élèves sont « grands ». Même constat ou presque, mais là, la présence des parents n’est pas aussi nombreuse. La plupart des personnes interrogées sont venues surtout pour leurs filles. Une fille abordée devant son père avoue que c’est elle qui demande à son père de venir chaque soir la chercher en voiture avec ses deux copines et voisines.

Les parents voisins s’entendent parfois pour se relayer dans la «tâche». Au lycée, ce sont beaucoup plus les garçons qui font «les gardes du corps» de leurs camarades de classe filles habitant le même quartier qu’eux. Il est vrai que plusieurs d’entre eux sont de grands sportifs et bien bâtis, et qui n’ont pas froid aux yeux devant un agresseur potentiel. Kamel, 48 ans, ingénieur et père de famille, se dit horrifié par toutes ces nouvelles : «Mais comment, nous Algériens, en sommes arrivés là ? Je me souviens tout petit les années 1970, j’allais à l’école primaire du village voisin du mien, j’avais 6 à 7 ans avec mes deux petits voisins en parcourant 7 km à pieds à travers les bois. Tout ce qu’on craignait c’étaient les chacals. On prenait de gros bâtons et une lampe de poche parce que l’hiver il faisait nuit noire à 6 heures du matin. Mon père était émigré et de ce fait toujours absent. Jamais on n’a pensé qu’un bandit viendrait nous enlever !»

Farid, psychologue, lui explique : « Vous savez, dès les premiers enlèvements d’enfants, il me semble qu’il y a un effet d’imitation. Si des mesures radicales ne sont pas prises le phénomène engendrera des conséquences incalculables. Les enfants eux-mêmes sont traumatisés. Ils en parlent toute la journée. La frayeur qui les habite les empêchera progressivement de suivre leurs cours. Et c’est là le drame car ce seront eux nos cadres de demain.»

Des mesures pour éradiquer ce fléau? Il peut s’en trouver beaucoup, mais la plus dissuasive proposée est l’application de la peine de mort pour les auteurs de ces enlèvements inqualifiables.

Ferhat Tizguine