L’Association d’aide aux enfants inadaptés mentaux de la wilaya de Tizi Ouzou a été créée en 1983. M. Iltache Mohamed Seghir, directeur du Centre des enfants inadaptés mentaux de la commune de Draâ Ben Khedda, nous fait un très large tour d’horizon des difficultés, mais aussi des satisfactions que vit ce centre qui reçoit des enfants de toute la daïra de Draâ Ben Khedda (wilaya de Tizi Ouzou). Il ne va pas sans dire que tout baigne dans l’huile pour ce centre qui prend en charge, tant bien que mal, 55 enfants dont 17 filles inadaptés mentaux.
Ils viennent même de la commune de Tizi Ouzou qui est dotée de ce genre d’infrastructure plus élaborée que sa voisine de Draâ Ben Khedda qui , au départ, prenait en charge 5 enfants dès 1987, un chiffre multiplié par 11, en 2013. La structure elle-même a été attribuée par l’APC en 1987. C’était l’ex- résidence des sœurs blanches. Le long trajet de cette association débuta par la formation des éducatrices pour les besoins urgents du centre qui a vu grandir et devenir adultes ces enfants qui fréquentent ces lieux.
En effet, la structure offre une image accueillante : propre, murs peints, tableaux de peinture, fleurs, amabilité du personnel… Outre la grande baraque et le bloc administratif, on signale 5 classes, un réfectoire, une cuisine, des sanitaires, douches. La cour est assez grande pour la détente des enfants qui aiment courir.
Le directeur du centre accuse !
Le directeur du centre a déjà sollicité l’ex-ministre de la Solidarité, M. Djamel Ould Abbès, pour une éventuelle construction d’une salle psychomotricité (salle de sport pour les inadaptés mentaux). La salle, en question, fut inscrite avec la future dotation d’un minibus, à la grande satisfaction de tout le monde. « Malheureusement, une fois arrivé à Tizi-Ouzou, le minibus a changé de destination et le centre ne reçut rien malgré les vives promesses qui commençaient à nous réchauffer les cœurs ! » se désole le directeur. Dans cas de figure, la Direction de la culture et la DAS sont-elles impliquées dans ce changement de bénéficiaires qui s’est opéré au niveau de Tizi Ouzou ?
« Il n’y a pas de manque de personnel, c’est le nerf de la guerre qui fait défaut ! »
Pour la Direction, le personnel est, pour l’instant, suffisant. Il s’élève à 13 fonctionnaires y compris le directeur, une cuisinière, une aide-cuisinière et deux femmes de ménage. Les éducatrices spécialisées sont formées par la Fédération nationale des parents d’enfants inadaptés (Alger).
Elles sont à deux et cumulent une ancienneté de plus de 20 ans d’expérience. Ce personnel permanent est payé par l’association à savoir : deux éducatrices spécialisées, un éducateur sportif formé par la Direction de la jeunesse et des sports(DJS) de Tizi Ouzou, une secrétaire d’une part. Il y a aussi une autre catégorie de personnel : des psychologues, au nombre de deux et des aides-éducatrices dans le cadre de l’AIS, affectées par la DAS qui « accède, à chaque fois, à notre demande, dans ce sens » tient à préciser le directeur du centre qui souhaite « la permanisation de ces jeunes femmes qui rendent un énorme service et sont déjà habituées à ces enfants qui s’attachent à leurs éducatrices.
Il est recommandé et dans l’intérêt de ces enfants, déjà malades, de leur éviter un autre choc psychologique en réaffectant dans un autre centre ou d’annuler les contrats de ces éducatrices avec lesquelles des liens de rapprochement se sont tissés auprès de ces enfants.
Les autorités locales doivent collaborer
Le pouvoir d’achat a terriblement et négativement influé sur la solidarité des citoyens. Cependant, les gens aisés ne tournent pas le dos à cette catégorie d’enfants. Le directeur nous raconte, à cet effet, une anecdote vécue : « Un citoyen dont nous tairons le nom, s’est présenté au foyer des personnes âgées et en détresse de Boukhalfa (commune de Tizi Ouzou) pour faire un don d’une somme importante.
Comme ce foyer est d’un statut étatique, la loi lui interdit de recevoir ce genre de don. Alors, il s’est orienté vers le centre des enfants inadaptés de Draâ Ben Khedda. Après consultation de notre commissaire aux comptes, il a pu déposer son don en bonne et due forme et dans la légalité. Qu’il trouve, ici, tous nos vifs remerciements ! » Tout ce qui est acheté est facturé. A l’exemple de cette facture d’un fournisseur, qui nous est montrée et d’un montant de 16 182,00 DA. Nos fournisseurs ne nous bousculent pas pour le paiement. Ils connaissent la situation du centre qui souffre de ce manque de liquidités pour ces différents besoins.
« La DAS ne nous donne aucun dinar, mais s’est distinguée par une dotation en mobilier et matériel de sport, et nous tenons à souligner le geste de l’ex-APW qui nous a octroyé une subvention de trente (30) millions de centimes. Cette année, nous avons renouvelé notre demande et nous espérons être satisfaits. Nous attendons beaucoup de nos quatre APC de la daïra. Les subventions, minimes soient-elles, sont les bienvenues » précise notre interlocuteur.
Plusieurs commodités font défaut
Des sorties aérées sont programmées pour les enfants, le plus souvent vers les plages, à Maqam El Chahid, parc zoologique, jardin d’essai. Ces enfants aiment les animaux. Ils sont aussi sollicités durant les rencontres sportives (inter-région) en football, athlétisme, tennis de table, pétanque, auxquelles ils prennent part et avec des résultats satisfaisants tout en s’imposant. Ils participent aussi aux différentes Journées nationales ou africaines de l’enfant handicapé.
Ils exposent leurs objets manuels. Le bureau du directeur est garni de coupes et de médailles, une preuve de ces enfants qui ne se déplacent pas pour rien .Le plus souvent, les bus de l’APC tombent en panne ou ne sont pas disponibles, alors le centre trouve des difficultés pour ses déplacements. Par ailleurs, la qualité des repas n’est pas à remettre en cause. Des amis du centre, des médecins prodiguent des conseils dans ce sens. Le repas de midi est constitué : d’un hors d’œuvre, d’un plat de résistance et d’un dessert. Chaque jour, les enfants ont droit soit à de la viande rouge ou blanche, de la sardine, des œufs. Ils mangent à leur faim.
Ces enfants ne sont pas des handicapés
Les enfants sont groupés dans des classes de 5 à 7 pour une meilleure maîtrise. Ils sont habitués au milieu et aux éducatrices. Le courant passe vite. Ils travaillent sans gêne et en présence du directeur qui nous accompagne, ils nous montrent de quoi ils sont capables : dessins, colorations, travaux manuels, chiffres, formes géométriques et …chants. Deux orthophonistes s’occupent de la petite Katia, venue de Bordj Ménaïel.
Une fille de 12 ans qui a une double difficulté : langage et vue. Elle arrive, cependant à discerner les couleurs : jaune, rouge, bleue, verte et les formes géométriques qu’on lui présente : carré, rectangle, cercle, triangle et qu’elle arrive à placer à l’endroit qu’il faut. Il va sans dire que ces enfants inadaptés mentaux méritent une attention particulière des autorités, à tous les niveaux de la hiérarchie.
« Ce n’est pas parce qu’on n’a pas un handicapé que l’on se désintéresse des autres ! » remarque le directeur. Cette idée ne doit même pas nous effleurer car nul n’est à l’abri du danger et du malheur. Les autorités doivent se pencher en mettant les moyens nécessaires : financier, personnel, réalisation de nouveaux locaux… pour couvrir les besoins, les plus élémentaires de ces enfants défavorisés par le sort et la nature !
Mohamed Améziane Tadjer