Mohamed Timoumi est un ancien international marocain. Meneur de jeu, il a eu le Ballon d’or africain en 1985 et a participé à la coupe du monde 1986 au Mexique. Les puristes ne sont pas près d’oublier ses frappes foudroyantes, sans élan. L’artiste marocain s’est confié à Compétition.
– Le match Algérie-Maroc approche. Comment voyez-vous cette rencontre ?
– Ça sera un match très difficile pour les deux équipes. C’est un derby maghrébin. Celui qui saura se maîtriser et imposer son rythme gagnera la rencontre.
– Vous qui avez déjà joué en Algérie, quel souvenir gardez-vous de votre passage ici ?
– Un mauvais souvenir, du moment que nous avions perdu par le score sans appel de 3 buts à 0. L’Algérie était à l’époque très forte. Il était difficile pour n’importe quel équipe de rivaliser avec vous au 5-Juillet à cette époque-là.
– Comment a été l’accueil ?
– On a été très bien accueillis. Malgré la rivalité qui existe entre les deux nations, les matchs Algérie-Maroc n’ont jamais dépassé leur cadre sportif. Je pense que le match du 27 mars ne sera pas différent des autres. Il sera disputé, chaud, engagé, mais toujours dans un cadre strictement sportif.
– Yebda nous a dit, il y a quelques jours, que ça se jouera sur le plan physique…
– Moi, je ne vois pas les choses de la même manière. C’est vrai que la technique et le physique auront un rôle important, mais pour moi, c’est surtout les entraîneurs qui décideront du sort de ce match. La tactique qu’adoptera chaque entraîneur sera déterminante. C’est le match des coachs. Celui qui saura préparer ses joueurs sur le plan psychologique, tactique et organisationnel gagnera cette rencontre.
– Justement, que pensez-vous de Gerets ?
– C’est un grand entraîneur avec un vécu de joueur assez intéressant. Il a beaucoup d’expérience en Europe, mais il ne connaît pas l’Afrique. Il ne sait pas non plus ce que représente un Algérie-Maroc pour les deux nations. Ce match sera vraiment une expérience nouvelle pour lui. On verra comment il va gérer ça.
– Pensez-vous qu’il a bien fait de ne pas convoquer El-Hamdaoui ?
– Si vous voulez mon avis, je dirais qu’il a bien fait. C’est vrai qu’El-Hamdaoui est un grand attaquant. C’est un titulaire à part entière à l’Ajax, seulement, il a perdu beaucoup de son éclat ces derniers mois, il n’est plus ce qu’il était. Et puis, quand on a des joueurs comme Chamakh, Kharja et Taârabt, on peut facilement se passer des services d’un joueur comme El-Hamdaoui.
– Chamakh joue rarement avec Arsenal, il a été convoqué quand même…
– Chamakh est un grand joueur. En plus, il a une forte personnalité qui lui permettrait de se surpasser et mener l’attaque marocaine le 27 mars. C’est vrai qu’il ne joue pas beaucoup avec Arsenal, mais il en a mis quand même 12 buts cette saison. Il lui faudra du temps pour se faire une place chez les Gunners, chose qu’il fera, j’en suis sûr, bientôt.
– Beaucoup pensent que la défense du Maroc n’est pas à la hauteur de son milieu de terrain ou son attaque, qu’en pensez-vous ?
– On ne peut pas dire de joueurs comme Basser, qui joue à Nancy, Benatia, qui joue à Udinese, et Kantari à Brest que ce sont de mauvais défenseurs. Ce qu’on peut dire, par contre, c’est qu’ils manquent un peu de cohésion. Ils ont besoin de jouer ensemble pour l’acquérir. Et puis, n’oubliez pas que nous avons un grand gardien, en l’occurrence Lamyaghri.
– Dites-nous, franchement, ce que vous pensez de la liste des 23 de Gerets…
– Tous les joueurs choisis méritent cette sélection. C’est un groupe équilibré, et puis, si Gerets les a choisis, c’est que ce sont les meilleurs. Il s’est basé sur les deux matchs amicaux face à l’Irlande du Nord et le Niger pour faire cette liste et c’était ce qu’il y avait de mieux à faire.
– Quels sont, selon vous, les joueurs dont devraient avoir peur les Algériens ?
– Je sais que vous, les Algériens, vous vous focalisez sur les stars du Maroc, comme Kharja, Chamakh ou Hadji, seulement, ceux dont vous devriez le plus vous méfier, ce sont les nouveaux joueurs. Des garçons comme Taârabt, Boussoufa, El-Arabi, Assaïdi et Carcela peuvent, croyez-moi, vous faire beaucoup de mal. Si Benchikha s’est donné la peine de les suivre et d’étudier leur façon de jouer, ça ira pour vous, sinon, vous risquez beaucoup avec eux.
– En évoquant Benchikha, dites-nous ce que vous pensez de lui ?
– Je ne peux rien dire de lui du moment que je ne le connais pas. Par contre, je pourrais vous parler de Rabah Saâdane. Il a fait un grand travail. Il est allé en Coupe du monde, il s’est classé 4e à la CAN, je ne voix pas, d’ailleurs, pourquoi l’Algérie a décidé de se séparer de lui.
– Doit-on comprendre que vous pensez que l’Algérie a perdu en se séparant de Saâdane ?
– Evidemment que oui. Vous aviez une bonne équipe, compacte et très soudée. Maintenant, vous êtes en train de tout refaire à zéro. C’est un peu dommage, je trouve. Je ne pense pas que l’équipe d’Algérie pourra atteindre le niveau qu’elle avait lors des éliminatoires de la Coupe du monde.
– Mais la plupart des joueurs qui ont pris part à la Coupe du monde sont là…
– Une équipe nationale, c’est un groupe, une âme, un esprit. Quelque chose s’est brisée après Saâdane. C’est ce qu’on voit de l’extérieur en tout cas. Benchikha veut tout changer, construire sur de nouvelles bases. On verra si ça marchera ou non.
– Ne craignez-vous pas la pression des stades algériens ?
– Les 22 joueurs, qui prendront part à ce match, seront tous des professionnels qui ont l’habitude de jouer devant 60 ou 80.000 supporters. Je suis sûr qu’ils sauront gérer ça. Pour ce qui est de la pression, je pense qu’elle sera plus sur vos joueurs que sûr les nôtres, du moment que vous êtes obligés de gagner, alors que le Maroc pourra se contenter d’un match nul.
– Quels sont selon vous, les joueurs algériens que les Marocains devraient craindre ?
– Belhadj et Ziani. Ce sont tous les deux de grands joueurs capables de faire basculer un match à n’importe quel moment. Je ne pourrais pas parler des joueurs algériens sans citer Bougherra. C’est un grand défenseur qui marque beaucoup en plus. Personnellement, il me plait beaucoup ce joueur.
– Donnez-nous un pronostic pour ce match…
– Là, vous me demandez l’impossible. C’est un match tellement imprévisible ! Tout peut arriver. On saura le score après le coup de sifflet de l’arbitre.
A. B.