A pratiquement un mois de l’Aïd el-Kébir, les éleveurs maquignons et autres intermédiaires de la capitale des Hauts-Plateaux de l’Ouest, place forte de l’ovin, ont le moral en berne.
En effet, une virée vendredi au marché à bestiaux de la ville de Tiaret nous a permis de constater la chute libre des prix du mouton, un vigoureux mouton descendant sous la barre des 40.000 dinars au plus grand dam des éleveurs. «La sécheresse, le manque des périmètres de pacage, la cherté de l’aliment de bétail, plus de 3 000 dinars le quintal d’orge, cela a poussé beaucoup d’éleveurs à abandonner leurs activités» alerte Djillali B., un éleveur de la région de Aïn Dheb.
L’autre pierre d’achoppement que dénoncent les éleveurs de la région de Tiaret est l’interdiction de déplacer les cheptels sans autorisation des services compétents. «Des amendes jusqu’a 20.000 dinars sont payées cash par les éleveurs qui déplacent leurs moutons, s’ils ne disposent pas des autorisations nécessaires», se plaint Larbi, un propriétaire terrien de Tousnina. Vendredi, vers midi, heure de fermeture du marché à bestiaux, les prix de certains antenais sont tombés jusqu’à 18.000 dinars.
Cette année, avec plus de 30 millions de têtes d’ovins, en majorité stationnés dans les wilayas des Hauts-Plateaux, les prix devraient fléchir, «même si la période du Hadj et de l’Aïd el-Kébir sont propices pour doper les prix», estime l’un des plus anciens maquignons de la région de Sougueur. Au niveau du marché à bestiaux de Sougueur, l’un des plus importants de tout le pays, les prix des ovins affichent une nette baisse par rapport à l’année dernière. De vigoureux béliers «vendant leur peau» jusqu’à 38.000 DA.
Cette baisse des prix des moutons s’explique, selon les connaisseurs des arcanes du monde agricole, par le risque de maladies, le manque d’aliment de bétail et la disponibilité du cheptel, qui poussent les éleveurs et autres intermédiaires à brader leurs bêtes, d’autres, à leurs risques et périls, préférant faire dans la rétention, jusqu’aux derniers jours de l’Aïd, dans l’intention d’engranger plus d’argent.
Pour Ali A., un retraité converti avec succès dans le travail de la terre, des jeunes sont en train d’investir dans le créneau porteur de l’élevage ovin et bovin, «ce qui devrait se traduire par un développement de la filière, et du coup des répercussions positives sur le niveau des prix des viandes», estime-t-il.
Des maquignons qui ont pignon sur rue et autres intermédiaires, issus de plusieurs wilayas du nord du pays, sont déjà à Tiaret, Djelfa ou encore El Bayadh, des régions qui régulent le marché national des viandes, pour tenter de faire des affaires et rafler à bon marché les célèbres béliers de race Ouled Djellal (le géant), Hamra (le petit), Taâdmit (le plus beau) et encore le Rembi (le poids lourd) de la région de Biskra.
Même pour le président de l’Union nationale des paysans algériens (UNPA), Med Alioui, la disponibilité des cheptels, plus de 28 millions selon lui, avec une nette baisse des trafics aux frontières, devrait permettre à l’Algérie d’exporter quelque 300.000 têtes vers l’Arabie Saoudite, déclaration qui n’a pas été du goût des éleveurs de plusieurs wilayas, à l’exemple de Tiaret, El Bayadh et Djelfa, qui tablent sur un renchérissement des prix à l’approche de la fête du sacrifice.