Terrorisme. Assassinat Moines Thibirine: Le juge Trévidic en Algérie? Très loin d’être fait…

Terrorisme. Assassinat Moines Thibirine: Le juge Trévidic en Algérie? Très loin d’être fait…

Le Juge n’a reçu aucune annonce officielle, aucun calendrier, ni l’accord sur les conditions de sa mission…

Maitre Jacques Baudoin est l’avocat des parties civiles dans l’affaire des moines de Thibirine. Grande figure du barreau, homme de haute probité morale, professionnel d’une rigueur exemplaire, ancien président de la Fédération Internationale des droits de l’homme, sa réputation dépasse de loin les frontières françaises. Et du dossier de l’assassinat des Moines de Thibirine, il a fait une priorité sacrée. Trop longtemps cachée ou malmenée, la vérité, toute la vérité, rien que la vérité doit être établie dans ce dossier tortueux. Un dossier se heurtant sans cesse à la raison d’état, à la logique des intérêts commerciaux et industriels entre deux pays aux relations tumultueuses que ce secteur rapproche…

Il y a quelques jours, ayant recours à un pouvoir dont  il use avec parcimonie, peu soucieux de son égo, l’avocat a pourtant saisi une occasion unique et écrit une lettre ouverte au président François Hollande, lui demandant de profiter de sa visite d’état en Algérie, pour permettre enfin à la requête du juge anti-terroriste Marc Trévidic d’aller en Algérie.

Le Juge qui a repris entièrement le dossier en est arrivé (voir articles précédents et notes secrets défense DGSE) à nourrir le soupçon que les autorités algériennes aient été, à l’époque, étroitement mêlées à l’assassinat des juges, manipulant les GIA qu’ils avaient infiltré.

Tutes les auditions qu’il a mené l’ont conforté dans l’idée que la vérité, ou une part de vérité, a été cachée dans ce dossier. Et que la France s’en est accommodée… Questions et points essentiels de l’affaire: Qui a enlevé vraiment les moines? Sur quel ordre? Qui les a détenu? Qui a ordonné leur exécution? De quelle manière sont-ils morts? Ont-ils pu être décapités -post mortem- pour maquiller un assassinat par balles? Pourquoi aucune autopsie n’a été réalisée? Autant de questions le juge pose ouvertement sur PV dans la conduite de son dossier. Et dont il a fait état en lancent une commission rogatoire internationale pour pouvoir se rendre en Algérie. Information qu’un proche de l’enquête m’avait permis de révéler dans le journal « Marianne ».

« Toutes les auditions dit ce proche de l’enquête, (voir enquêtes précédentes sur le blog ou celle publiée dans « Paris-Match ») celles d’anciens hommes de la sécurité algérienne ayant fait défection, mais aussi de l’ambassadeur de France de l’époque, du médecin de l’ambassade, des ministres en exercice  coté français, du général Rondot (envoyé comme médiateur alors) celle du père-supérieur de la confrérie à laquelle appartenait les moines, et celle de l’attaché de Défense, le général Buchwalter, comparées les unes aux autres font « exploser » la version officielle ».

Seule solution pour y voir clair: Aller en Algérie à Thibirine, ou les têtes seules des moines (les corps n’ont jamais été retrouvés), ont été inhumé.

Le Juge en a donc fait la demande. Et l’avocat des familles, familles que nous avions rencontrées  et qui veulent Justice et vérité, a donc usé de son autorité morale, publiant sa lettre ouverte dans « la Croix ». La Presse de ce coté comme de l’autre de l’Atlantique, allant un peu vite en besogne a annoncé qu’Alger avait délivré son feu vert. Or dans l’entourage du juge, on précise qu’il n’a reçu aucun avis officiel, aucune autorisation claire quant à ses demandes très précises.

Marc Trévidic a proposé un « plan » très précis, permettant de tout réaliser en une journée: Aller à Thibirine avec une équipe d’experts scientifique, procéder à l’exhumation des restes des moines, réaliser dans la foulée une expertise ADN pour aboutir à une identification formelle. Puis des examens précis pour voir de quelle manière les moines ont été tués, et si ils ont été décapités -post morte- ou non. Les corps seront dès les prélèvements et examens réalisés, remis en terre aussitôt. Le magistrat souhaite aussi entendre un certain nombre de personnes, ex-membres de la DST algériennes, ainsi que d’anciens membres de groupes islamiques armés.

Sur ce point, le juge n’a reçu en l’état aucune garantie. Aucune. Or selon l’un de ses proches, il n’ira en Algérie que si toutes les conditions qu’il a posé sont acceptées. Pas question que ce soit les algériens qui procèdent aux examens. Pas question que la Justice française ne dispose pas d’une entière liberté d’action sur place. Ni le magistrat (seul à posséder les éléments ADN permettant une comparaison et une identification), ni les familles ne se prêteraient à un « jeu de dupes ». Leur seule confiance va au magistrat, qui en l’état n’a pas encore constitué son équipe d’experts…

Les discussions en tête à tête entre Francois Hollande et le Président Bouteflika seront décisives. Mais pour l’heure, rien n’est joué…

Frédéric Helbert.