Terrible drame dans plusieurs régions de basse Kabylie,Seuls dans un océan… de neige

Terrible drame dans plusieurs régions de basse Kabylie,Seuls dans un océan… de neige

Les villageois n’ont jamais connu des chutes de neige aussi fortes

Les routes, l’électricité et les réseaux de communication sont coupés.

Comme dans la partie Est du pays, il neige en Kabylie depuis 13 jours. Les routes, l’électricité et les réseaux de communication sont coupés. Même les localités situées à des altitudes relativement basses n’ont pas échappé à la furie de la nature. Elles sont recouvertes de neige et connaissent une forte vague de froid. Dans ces régions, la situation est plus grave du fait que les citoyens habitués à la clémence de la nature ne sont pas préparés à ce genre d’événement. C’est le cas de Attouche, située à une trentaine de kilomètres au nord de la wilaya de Tizi Ouzou. Là, les citoyens n’ont jamais connu des chutes de neige aussi fortes que celles en cours. «On n’a pas l’habitude de vivre un hiver aussi hostile que cette fois-ci. On est surpris et pris de court par ces neiges. On a connu des chutes de neige, mais on ne s’attendait pas à cette situation catastrophique. On ne l’a jamais connue par le passé», témoigne un octogénaire, rencontré à Attouche le week-end dernier lors de l’enterrement d’un jeune citoyen qui a succombé à ses blessures. La victime est morte, apprend-on sur place, faute de soins. Ce scénario est vécu dans plusieurs localités de la région. «De simples actions de solidarité et de prévention de la part des autorités locales et des habitants auraient pu sauver la vie de ces personnes et assurer un minimum de satisfaction des besoins alimentaires aux autres», indique le jeune entrepreneur. A ce sujet, nous avons appris qu’un mort qui a succombé à ses blessures aurait pu être sauvé s’il avait été évacué rapidement à l’hôpital. Le drame des citoyens de ces régions, recouvertes de neige, se déroule à huis clos.

Des engins transformés en ambulances

La population de l’agglomération d’Attouche comptant 20 000 habitants, ne sait pas à quel saint se vouer. Seule sans secours, elle fait face désarmée, aux éléments naturels. Isolée du monde et abandonnée des autorités locales, elle tente, contre vents et marées, d’appeler à la rescousse, la solidarité qui a caractérisé les villageois de Kabylie par le passé, et qui a tendance à se perdre ces dernières décennies. «Aujourd’hui, on a vérifié que la sagesse et la solidarité qui cimentaient les liens entre nos aïeux revêtent tout leur sens et sont pleines d’enseignements», souligne Lahadi, notant que sa localité déplore une vingtaine de blessés et deux morts faute de soins. «Oh! montagnards de malheur que nous sommes. Nous n’avons que le malheur qui nous entoure. Voire, nous n’avons que lui pour nous aimer», regrette Si Ahmed, la mort dans l’âme. «Mon âge a atteint 85 ans. Et jamais de ma vie, je ne me souviens d’aussi fortes chutes de neige, qui nous retiennent prisonniers dans nos propres maisons», témoigne Si-Ahmed, totalement enveloppé dans son vieux burnous, à l’image de son village même, qui s’est habillé de son linceul. Connue pour son relief montagneux et accidenté, Attouche continue de souffrir des effets de la neige abondante.«Nos autorités locales sont complètement absentes. Personne n’a demandé après nous. Seuls, nous sommes livrés à notre triste sort», a fait savoir Merzouk, conducteur reconverti avec son engin en ambulancier. Merzouk, un jeune entrepreneur qui a, du jour comme de nuit, mis son engin à la disposition des villageois. Avec son trax, il s’occupe même du transport des malades vers l’hôpital de Tizi Ouzou, à la suite des routes fermées par les chutes de neige. En plus d’être confinées dans leurs maisons sans gaz ni électricité et parfois même sans eau potable, avec les conséquences que l’on connaît, des milliers de personnes sont restées sans approvisionnement en denrées alimentaires pour rupture de livraison. La situation est d’autant plus grave pour les malades qui nécessitent une évacuation urgente. Il faut, dit-il, plus de deux heures de route pour parvenir jusqu’à Tizi Ouzou.

«J’ai transporté, à partir de mon village et ce, jusqu’à l’hôpital de Tizi Ouzou, 5 malades», a fait savoir le jeune entrepreneur, insistant sur le fait qu’il est de son devoir de venir au secours des nécessiteux. «Je ne suis pas le seul à mettre mon trax à la disposition des citoyens et le transformer en ambulance», assure-t-il, ajoutant que depuis les premières chutes de neige, tous ceux qui possèdent des rétrochargeurs sont mobilisés et répondent présent aux cris de détresse des citoyens de l’agglomération d’Attouche, composée d’une dizaine de villages, situés à 700 mètres d’altitude.

Les autorités brillent par leur absence

Sliha, Lazib, Aïn Larbaâ, Mâchera, Thaghermeth et Illilen sont les villages les plus touchés par les fortes chutes de neige. Sur place, on dit que l’épaisseur de la neige a atteint un mètre. Devant les tempêtes de neige et la vague de froid qui touchent l’ensemble des villages depuis près d’une dizaine de jours, la région d’Attouche s’est retrouvée dans une situation de détresse sans précédent. Routes coupées, denrées alimentaires rares, fréquentes et longues coupures d’électricité, gaz butane introuvable, températures très basses… Cela en plus bien sûr du bétail des éleveurs qui est, à son tour, dans une situation critique faute d’approvisionnement en aliments et fourrage. Pour se réchauffer, les citoyens utilisent du bois. «Nous n’avons plus rien. Produits alimentaires, gaz butane, électricité coupée. Le risque est imminent», se désole Hakim, membre du comité de village de Sliha. Sur les lieux, les citoyens rencontrés, et qui disent être livrés à eux-mêmes, se demandent pourquoi les chasse-neige sont totalement absents sur les routes enneigées. «Les villages démunis n’ont que les yeux de leurs élus pour pleurer. C’est pourquoi, les citoyens ont saccagé le siège de leur APC, à Makouda, chef-lieu de leur commune», soutient-il, avant de renchérir qu’après la détresse, c’est l’angoisse qui envahit les habitants des endroits les plus isolés, d’autant plus que le mauvais temps perdure. Certains villages d’Attouche sont inaccessibles depuis plusieurs jours. Affolés, les villageois s’interrogent: comment expliquer cette situation quand on sait que les services de la météorologie n’ont cessé d’alerter depuis une semaine l’arrivée d’une vague de froid et des chutes de neige, comment expliquer que le plan Orsec de la commune n’a pas fonctionné? Il doit bien y avoir des responsables en charge de ces problèmes? Ce n’est pas la première fois que ce genre de défaillances est enregistré à cause du laisser-aller des responsables concernés.