Les députés européens ont confirmé, mercredi 6 mai, leur opposition à toute coupure administrative de l’accès à l’Internet en cas de téléchargements illégaux. Ce vote montre une nouvelle fois l’opposition du Parlement européen au projet de loi Création et Internet, actuellement discuté en France.
Ce vote en deuxième lecture, qui va à l’encontre d’un compromis négocié au préalable avec les représentants des Etats membres de l’UE, va renvoyer en conciliation l’ensemble d’une vaste réforme du marché des télécoms (« paquet télécoms ») censée améliorer la concurrence et les droits des consommateurs.
Par 407 voix contre 57 et 101 abstentions, les eurodéputés ont introduit un amendement stipulant que les droits fondamentaux des internautes ne pouvaient être restreints « sans décision préalable des autorités judiciaires ». Il vise essentiellement le projet français de riposte graduée contre les téléchargements illégaux, qui doit permettre à une autorité administrative et non judiciaire, baptisée Haute Autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur l’Internet (Hadopi), de suspendre l’accès à l’Internet des contrevenants.
L’amendement, déposé par des eurodéputés socialistes et Verts avant la première lecture, où il avait déjà recueilli une très large majorité, constitue le seul point litigieux du paquet télécoms et fait l’objet d’un bras de fer avec les Etats membres qui le rejettent depuis le début. Un compromis avait pourtant été négocié avant le vote avec les Etats membres, dont la formulation reconnaissait que toute mesure touchant à l’accès internet devait respecter « le droit à un jugement par un tribunal indépendant et impartial », mais sans affirmer le caractère préalable de ce jugement.
« LE GOUVERNEMENT FRANÇAIS S’EST BATTU CONSTAMMENT CONTRE CET AMENDEMENT »
Mais l’amendement initial a été redéposé en deuxième lecture par Daniel Cohn-Bendit et le groupe des Verts. La socialiste française Catherine Trautmann, une des rapporteurs du paquet télécoms, a elle-même donné au moment du vote la consigne de soutenir l’amendement.
Si elle regrette que l’ensemble du paquet ne soit pas adopté, elle estime que le gouvernement français porte une part importante de responsabilité dans ce vote négatif. « J’aurais souhaité que le paquet soit adopté. Il y a 3,5 millions d’emplois concernés, il y a des investissements en jeu. Ce qui est positif c’est que tout le paquet est validé sauf un point. C’est pourquoi j’avais cherché le compromis de la dernière chance », a-t-elle dit à sa sortie de l’hémicycle.
« Le gouvernement français s’est battu constamment contre cet amendement. En refusant toutes les propositions de compromis jusqu’au vote en commission, il porte une part de responsabilité », a-t-elle continué. Il paraît à présent quasi impossible que le paquet télécoms puisse encore être adopté par le Parlement actuel, qui tient en principe sa dernière séance plénière cette semaine avant les élections européennes du 7 juin.