Inspirés par l’exemple du Kosovo en 1999, la France et la Grande-Bretagne rejoignent les Etats-Unis. Les deux pays européens n’excluent pas de se passer de l’accord du Conseil de sécurité pour attaquer la Syrie. Cette « intervention » annoncée pourrait-elle perturber Lakhdar Brahimi qui entamera, aujourd’hui, sa mission en tant que nouveau médiateur de l’ONU ?
William Hague et Laurent Fabius, les ministres des Affaires étrangères des deux pays, ont évoqué cette « éventuelle intervention militaire », dans un point de presse qu’ils ont animé, jeudi dernier, au siège des Nations unies. Leur argument ? L’urgence de la situation après plus de 17 mois de conflit (26 000 morts selon l’Observatoire syrien des droits de l’Homme, 228 976 réfugiés à la date du 29 août, selon le HCR), et le « veto » imposé au conseil de sécurité par la Russie et la Chine à toute initiative défavorable au régime du président al-Assad. « S’il y a la moindre tentative du régime syrien d’utiliser directement ou indirectement des armes chimiques dont les conséquences peuvent se diffuser plus loin que les frontières syriennes, notre réponse sera immédiate et fulgurante », affirme Laurent Fabius, dont le pays a organisé, jeudi dernier, une réunion du Conseil de sécurité consacrée à la situation humanitaire en Syrie et dans les pays limitrophes. « Nous sommes absolument intransigeants sur ce point. Ces armes bactériologiques et chimiques sont d’un danger extrême », dit-il avant de souligner que « le bactériologique et le chimique, c’est d’une autre nature que les armes ordinaires ». « La réglementation est différente ; là, il est certain que compte tenu des conséquences, on ne peut supporter, même un instant, la manipulation de ces armes » ajoute-t-il avant de reconnaître que son pays aide matériellement et financièrement les « zones libérées » et s’apprête à saisir la Cour pénale internationale pour juger le président syrien pour « crimes contre l’humanité ». Fabius, qui est prêt à reconnaître un gouvernement provisoire « représentatif » somme la « divisée » opposition syrienne de « s’unifier ». « Il ne s’agit pas de se débarrasser de Bachar al-Assad si c’est pour avoir ou bien des intégristes ou bien un régime » similaire à celui de Bachar, prévient-il. Washington a déjà prévenu Damas. « Nous avons été très clairs envers le régime d’Assad, mais également envers les autres acteurs sur le terrain, sur le fait que, pour nous, la ligne rouge serait de voir un arsenal entier d’armes chimiques en train d’être déplacé ou utilisé », a déclaré Barack Obama le 20 août dernier. « Cela changerait nos calculs », dit-il. Des calculs qui pourraient vite changer. Ban Ki-moon, le SG des Nations unies, demande expressément à al-Assad de « cesser d’utiliser des armes lourdes » contre l’« armée libre » de l’opposition que certains Occidentaux arment jusqu’aux dents. La Turquie, qui veut contourner aussi le « veto » russe et chinois et éloigner la menace sur sa frontière du nord, réclame la création de zones protégées en Syrie pour retenir les candidats à l’exil. Curieusement, la France, le Royaume-Uni et les Etats-Unis ne la suivent pas. Intérêts divergents ? A des milliers de kilomètres de New York, Téhéran met à profit le sommet du Mouvement des Non-Alignés, qu’elle a abrité ce week-end, pour montrer du doigt « les principaux responsables cachés » de la crise syrienne : les Etats-Unis et ceux qui ont « inondé la Syrie d’armes et soutenu financièrement les groupes irresponsables » de l’opposition. En attendant le dénouement de cette guerre par procuration, des Syriens meurent.
Djamel B.