Depuis quelques semaines, de plus en plus de journalistes accèdent à la Syrie, comme ceux de France 2 ou de i-Télé ces derniers jours. Finies les images amateurs contestées par le régime de Bachar el-Hassad : cette fois, les reporters rapportent et diffusent ce qu’ils voient. 307 enfants ont été tués par l’armée syrienne depuis le début de l’insurrection contre le régime de Bachar Al Assad, a affirmé vendredi 2 décembre le président de la commission d’enquête internationale Paulo Pinheiro.
La révolution syrienne, qui a débuté en mars, aurait fait au moins 4 000 morts, selon l’ONU, le double selon les comités de manifestations.
Filmés et datés par les manifestants eux-mêmes, les mouvements sont systématiquement contestés par le régime. Qui dément toute cruauté.
Le fait que des reporters puissent désormais en témoigner aide à accréditer l’horreur de la répression, même si cela ne permet pas de vérifier le compteur des victimes. La journaliste Manon Loizeau en revient :

« Le régime dit qu’il n’y a pas de bombardements, on en a filmé, par exemple. Nous trouvons donc des fragments de preuves. Mais il faudrait rester des semaines sur place pour tout prouver. »
Brandir sa pancarte de dos
Un des premiers journalistes à entrer dans le pays a été une reporter française, Sophia Amara, dès le mois d’août, pour Arte.
Pour la même chaîne, les dix derniers jours de septembre, Nicolas Henin s’est rendu à Homs et décryptait très bien comment les opposants organisent leurs manifestations tout en assurant leur sécurité : ils brandissent des pancartes de dos.
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« Seuls les enfants se laissent filmer sans crainte », notait Nicolas Henin.
« Le ciblage délibéré des enfants »
Manon Loizeau, elle, s’est rendue en Syrie, à Homs, entre le 9 et le 17 octobre pour « Envoyé spécial » et Capa. Elle débute son reportage, diffusé le 1er décembre sur France 2, par des images d’enfants filmées dans un camp de réfugiés au Liban, avant de passer la frontière.
L’un d’eux raconte comment il a été torturé :
« J’ai 13 ans. […]. Ils m’ont frappé, ils m’ont bandé les yeux. Ils m’ont enfermé dans le coffre d’une voiture. […]. Ils m’ont jeté dans une cellule qui sentait mauvais. Ils m’ont arraché les ongles. »
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Extrait de « Syrie interdite », Envoyé Spécial par rue89
Manon Loizeau, qui a notamment couvert la guerre en Tchétchénie et la répression en Iran, a été frappée par la violence du régime syrien :
« En dix ans en Tchétchénie, j’en ai vu, des atrocités. Mais jamais à ce point. Le ciblage délibéré des enfants, je n’avais jamais vu. »
« Des disques durs qu’on cachait sous des pierres »
Selon la reporter, plusieurs des témoins interrogés par d’autres journalistes ont été arrêtés depuis :
« Les miliciens du régime ont même reconnu des gens filmés de dos par la BBC. C’est pour ça que nous n’avons pas filmé de visages, seulement des mains, des pieds, des débuts de dos.
Comme nous n’étions pas sûrs de pouvoir sortir du pays, après chaque interview, on enregistrait les images sur des disques durs qu’on cachait sous des pierres. On les a tous récupérés au retour, comme le Petit Poucet. »
Un signe d’affaiblissement du régime
Paul Moreira ne s’est pas rendu à Homs comme beaucoup de ses confrères, mais dans la montagne du nord-ouest du pays, en entrant par la Turquie. Entre le 4 et le 15 novembre, il a suivi des rebelles de l’Armée libre de Syrie (ALS), dans un reportage réalisé avec Pedro da Fonseca pour Premières Lignes et Canal + qui sera diffusé le 5 décembre à 22h35.
Dans cette région moins médiatisée, les reporters infiltrés dans l’ALS ont été accueillis comme des héros, selon Moreira :
« Les gens nous remerciaient. On était l’événement. Alors forcément, au bout de trois jours, on était grillés. »
Le jeu de cache-cache avec l’armée régulière, qu’a connu aussi Manon Loizeau, s’est donc intensifié. Paul Moreira considère que ces entrées plus nombreuses de journalistes en Syrie sont un signe d’affaiblissement du régime :
« Parfois, j’ai eu l’impression que c’était l’armée régulière qui était assiégée par les insurgés, et pas l’inverse. »
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Droit de suite DNA :
Khaled Sid Mohand arrêté à Damas en avril 2011
Khaled Sid Mohand, journaliste algérien travaillant pour le compte de la radio France Culture et du quotidien Le Monde, a été arrêté à Damas le 9 avril 2011.
Journaliste indépendant, âgé de 40 ans, Khaled Sid Mohand, a été libéré après une vingtaine de jours de détention en Syrie.
Au lendemain de sa libération mardi 5 mars, le journaliste avait raconté les conditions de sa détention : « Je n’ai pas été torturé mais un peu tabassé durant les deux premiers jours. Et après, je ne sais pas pourquoi, tout s’est arrêté, alors que mes codétenus, eux, ont été torturés ».
307 enfants tués depuis le début de l’insurréction
307 enfants ont été tués par l’armée syrienne depuis le début de l’insurrection contre le régime de Bachar Al Assad, a affirmé vendredi 2 décembre le président de la commission d’enquête internationale Paulo Pinheiro.
« Les enfants ne sont pas épargnés. Selon des sources fiables, jusqu’à aujourd’hui, 307 enfants ont été tués par les forces de sécurité. Novembre a été le mois le plus sanglant jusqu’ici avec 56 enfants tués », a déclaré le juriste brésilien en présentant les conclusions du rapport de la commission d’enquête devant le Conseil des droits de l’homme réuni à Genève en session
« D’autres enfants ont été détenus et torturés. Nous avons été informés de deux garçons qui sont morts sous la torture. Le père de Thamir Al Sharee (quatorze ans) nous a montré le rapport médical et la radiographie du corps de son fils », a déclaré Paulo Sergio Pinheiro.