Syrie Obama, seul contre tous ?

Syrie Obama, seul contre tous ?

John Kerry rentrera-t-il brdouille de son « exercice dificile » européen, ponctué par la visite à Paris et à Londres, qu’il effectuera sur le chemin du retour à Washington ? Hier, le secré taire d’Etat tentait decolmater les brèches du camp interventionniste.

Le désaveu du G20, timidement suppléé par la « déclaration des onze pays » (dont les Etats-Unis, la France, l’Australie, la Corée du Sud, l’Arabie Saoudite et l’Italie) appelant à une « réponse forte », rend incontournable la rencontre de Vilnius, capitale de la Lituanie, qui préside l’Union européenne « très divisée » sur l’éventualité de frappes sur la Syrie.

Washington, qui dit ne pas attendre le rapport de l’ONU sur l’attaque chimique, veut contenter un partenaire dont il souhaite tout juste présenter les recommandations des 28 au Conseil de sécurité nationale (cabinet de politique étrangère de la Maison Blanche).

Même l’irréductible allié français tempère ses ardeurs en se rangeant derrière le bloc européen, emmené par l’Allemagne, appelant l’ONU à publier « le plus rapidement possible » le rapport des experts, nécessaire à l’élargissement du consensus international. La marge de manœuvre très réduite du secrétaire d’Etat américain fragilise davantage l’option d’Obama, en l’absence du feu vert du Conseil de sécurité, et impopulaire en Amérique et dans le monde où les opinions publiques se déclarent totalement opposées aux frappes militaires.

Dans un sondage de l’Ifop, réalisé pour le Figaro, il s’avère que 68% des Français (dont 45% de sympathisants de gauche, 75% de l’UMP et 77% du Front national) se prononcent contre un engagement mili­­­taire. Un vent de scepticisme souffle également sur Washington et le Congrès, appelé, demain, à se prononcer sur le choix d’Obama. Mais, en attendant le vote « dans deux semaines », il semble bien que la partie ne sera pas facile.

Obama, qui prononcera, ce mardi, un discours à la nation, est confronté au front de refus au sein même du Congrès, représenté par le Tea Party, les démocrates fondamentalement opposés aux guerres (Irak et Libye) et la catégorie des républicains-démocrates jugeant tardives les frappes de nature à favoriser les extrémistes syriens. Seul contre la communauté internationale, à l’exception de la France et du CCG (Conseil de coopération du Golfe) lançant un appel à une intervention immédiate pour « délivrer » le peuple syrien de la « tyrannie » ?

A la demande du Vatican, initiant une « journée de jeûne » consacrée à la « paix en Syrie, au Proche-Orient et dans le monde », le Liban et le monde prient pour la Syrie. Le patriarche maronite, Bechara Boutros Raï et le patriarche d’Antioche et de tout l’Orient, soutenu par le vice-président du haut Conseil chiite, cheïkh Abdel Amir Qabalan, et le grand mufti sunnite en Syrie, ont relayé le message du pape François mobilisant les catholiques du monde entier pour que « s’élève fortement, sur toute la terre, le cri de la paix » élargi à toutes les confessions et aux non-croyants. Dans une lettre adressée aux responsables du G20, le pape François a demandé « du fond du cœur » de renoncer à toute option militaire en Syrie.

La guerre d’Obama a été également dénoncée par un groupe de six anciens hauts fonctionnaires onusiens, signant une « plaidoirie pour la paix en Syrie ». Les anciens secrétaires généraux adjoints, Hans-Christof Von Sponeck, Denis J. Halliday, Saïd Zulficar, Samir Radwan, Samir Basta et Miguel d´Escoto Brockmann, président de l’Assemblée générale des Nations unies en 2008-2009, ont prévenu contre « les bruits de bottes » au Moyen-Orient, véritablement offusqués du fait que la « communauté internationale soit réduite à deux pays : les Etats-Unis et la France ».

Ils se déclarent sceptiques sur « les prétextes discutables ou fabriqués », rappelant pour cela, « l’incident du Golfe de Tonkin et la guerre du Vietnam, les couveuses koweïtiennes et la première guerre du Golfe, le massacre de Racak et la guerre du Kosovo, les armes de destruction massive irakiennes et la seconde guerre du Golfe, les menaces sur Benghazi et la guerre de Libye… ». Cette thèse a été confortée par MSF (Médecins sans frontières) qui a refusé que ses déclarations soient utilisées comme « preuve pour attester l’origine précise de l’exposition à un agent neurotoxique ni pour attribuer une responsabilité ».

Larbi Chaabouni