Syrie , Moscou : « La conférence de paix serait reportée à jamais en cas de frappes américaines »

Syrie , Moscou : « La conférence de paix serait reportée à jamais en cas de frappes américaines »
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La Ligue arabe en appelle à la communauté internationale

La Ligue arabe a appelé la communauté internationale à assumer ses responsabilités dans le conflit syrien, alors que l’éventualité d’une action militaire semble toujours d’actualité, au moment où la Russie et la Chine se disent inquiètes des conséquences d’une telle démarche.

Les ministres des Affaires étrangères de la Ligue ont appelé l’Onu et la communauté internationale à « assumer leurs responsabilités conformément à la Charte des Nations unies et au droit international afin de prendre les mesures de dissuasion nécessaires contre les auteurs de ce crime odieux dont le régime porte la responsabilité ». Dans sa résolution, le conseil des ministres arabes a « condamné avec vigueur l’attaque à l’arme chimique menée en Syrie au mépris des valeurs morales et humaines et du droit international ».

Il a imputé « l’entière responsabilité de ce crime odieux au régime syrien », réclamant que les auteurs de cette attaque soient traduits devant la justice internationale « comme les autres criminels de guerre ». Il demande également que soient « fournies toutes les formes de soutien requises par le peuple syrien pour se défendre » et rappelle « l’obligation de coordonner les efforts arabes et internationaux pour aider » les Syriens. Mais cette résolution n’a pas fait l’unanimité au sein des pays membres.

L’Algérie a qualifié le texte de « violation du règlement intérieur du conseil de la Ligue, notamment en ce qui concerne le mécanisme de prise de décisions en cas d’absence de consensus entre les États membres ». L’Algérie a réaffirmé sa « condamnation avec force de l’usage d’armes chimiques quels qu’en soient les auteurs » et émis des réserves sur l’alinéa 4 de la résolution ­— appelant l’Onu et la communauté internationale à prendre les mesures de dissuasion nécessaires contre le régime syrien — et réitéré sa position en faveur d’une solution politique. Elle a en outre appelé à attendre les résultats définitifs de l’équipe d’inspecteurs de l’Onu pour identifier les auteurs de ce crime. L’Irak n’a pas voté en faveur des alinéas 2 et 4 (de la résolution), le Liban a émis des réserves sur la résolution dans son intégralité, alors que l’Égypte a qualifié la déclaration d’ »ingérence étrangère ».

Moscou et Pékin, inquiets, mettent en garde

La Russie et la Chine se disent inquiètes des conséquences de frappes militaires contre la Syrie, notamment en ce qui concerne l’avenir du processus politique pour résoudre le conflit. Pour le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, les informations sur l’utilisation d’armes chimiques près de la capitale Damas et impliquant le régime syrien « ne convainquent absolument pas » la Russie. « On nous a montré quelques images où il n’y a rien de concret : ni cartes géographiques ni noms, il y a là de nombreuses incohérences, beaucoup de doutes », a-t-il dit.

La Chine a quant à elle appelé à ne pas « se précipiter à préjuger » des résultats de l’enquête menée par des experts en armes chimiques de l’Onu en Syrie, qui ont pour mission d’ »effectuer une enquête objective et impartiale ». L’administration américaine a rendu public, la semaine dernière, un rapport des services de renseignement énumérant un faisceau d’éléments prouvant, selon Washington, l’implication de responsables syriens dans l’attaque à l’arme chimique perpétrée le 21 août dans la banlieue de Damas et qui a fait des centaines de morts. L’Onu a de son côté indiqué que les experts chargés d’enquêter sur cette attaque ne tireraient « aucune conclusion » avant le résultat d’analyses de laboratoire qui pourraient prendre jusqu’à trois semaines.

Damas appelle l’Onu à empêcher les frappes

Visé par les menaces de frappes, le gouvernement syrien a appelé hier le secrétaire général de l’Onu Ban Ki-moon à mener des efforts pour « empêcher toute agression contre la Syrie » en dehors de la légitimité internationale. Le délégué permanent de la Syrie aux Nations unies, Bachar El-Jaâfari, dans une lettre adressée à M. Ban Ki-moon, a également exhorté le chef de l’Onu à « aller de l’avant vers une solution politique pacifique de la crise syrienne ». Sur le terrain, les violences se poursuivent. La veille, au moins 42 personnes ont été tuées lors d’affrontements entre l’armée régulière et des rebelles dans la ville de Rouhaiba, au nord-est de la capitale Damas.

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Moscou : « La conférence de paix serait reportée à jamais en cas de frappes américaines »

Le ministre des Affaires étrangères russe Sergueï Lavrov a estimé hier que des frappes américaines en Syrie pourraient « reporter pour longtemps, voire à jamais » la tenue d’une conférence de paix pour résoudre la crise syrienne. « Si l’action annoncée par le président américain (Barack Obama, ndlr), au grand regret de nous tous, a lieu, (…) cela va reporter pour longtemps, voire à jamais, les perspectives de cette conférence » de paix dite « Genève-2 », a déclaré M. Lavrov, lors d’une conférence de presse avec son homologue sud-africaine Maite Nkoana-Mashabane, en visite à Moscou.

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Un navire de surveillance russe dépêché en Méditerranée

La Russie a dépêché un navire de « reconnaissance et de surveillance électronique » vers la côte syrienne à l’est de la Méditerranée, a rapporté hier l’agence de presse Interfax citant une source militaire, sur fond de préparation d’une intervention contre le gouvernement syrien. Le navire de guerre électronique SSV-201 « Priazovié » a quitté dimanche soir Sébastopol, port ukrainien où est basée la flotte russe de la mer Noire, « pour une mission dans l’est de la Méditerranée », a déclaré une source militaire, cité par Interfax. « Ce bâtiment ne va pas rejoindre le groupe de navires de guerre de la marine russe déjà dans la région », a ajouté cette source, précisant que « le SSV-201 rendrait compte de ses activités directement à l’état-major des forces armées russes ». L’état-major avait indiqué, la semaine dernière, que le groupe de navires dans la Méditerranée effectuait de manière ininterrompue des observations et analyses des activités militaires autour de la Syrie. « Nous utilisons le système de surveillance par satellite de notre groupe de navires dans la Méditerranée, ainsi que d’autres sources de renseignements », a ajouté cette source. « Nous avons l’intention d’obtenir le maximum d’informations dans les intérêts de la sécurité de la Russie, d’analyser méticuleusement les tactiques utilisées par les participants à un possible conflit, tirer des conclusions sur les perspectives à venir », a encore indiqué cette source. La Russie maintient une présence constante de plusieurs navires de guerre dans l’est de la Méditerranée où ils effectuent des rotations depuis le début de la crise syrienne il y a deux ans et demi, comme elle exploite depuis la période soviétique une base militaire dans le port de Tartous, à 220 km au nord-ouest de Damas.

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Erdogan : « Des frappes limitées aggraveraient la situation »

Le Premier ministre turc, Recep Tayyip Erdogan, a estimé dimanche qu’une action militaire limitée aggraverait les difficultés en Syrie. « Je veux rappeler ici que les mesures temporaires ne suffisent pas, ne suffiront jamais en Syrie », a déclaré M. Erdogan au cours d’un meeting à Istanbul. « Frapper des objectifs locaux non seulement ne nous rapproche pas d’une solution, mais rend les conditions plus difficiles encore en Syrie », a-t-il poursuivi.

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Mikhaïl Gorbatchev demande à Washington d’écouter l’opinion des peuples

Le dernier dirigeant de l’Union soviétique Mikhaïl Gorbatchev a demandé hier au président des États-Unis Barack Obama d’écouter l’opinion des peuples, à propos de la crise syrienne, estimant que les conséquences d’une intervention militaire dans ce pays pourraient « être très mauvaises ». « Je pense toujours que le président des États-Unis est un véritable démocrate, mais qu’il a du mal à agir comme un démocrate », a déclaré M. Gorbatchev, à l’ouverture à Genève de la Conférence destinée à célébrer les 20 ans de son organisation écologiste Green Cross. « Je me souviens à quel point c’était difficile pour moi. Maintenant le président des États-Unis est critiqué pour ne pas être assez résolu. Bien, s’il n’est pas suffisamment décidé pour tirer, lancer des bombes, c’est un bon type d’indécision », a-t-il estimé. « En revanche, s’il décide de tirer sans tenir compte de l’opinion des peuples partout, y compris aux États-Unis, je pense que les conséquences pourraient être très mauvaises », a-t-il poursuivi.