Les forces kurdes de Syrie n’ont «aucun problème» avec une intervention militaire du régime syrien dans la région d’Afrine (nord-ouest) pour repousser l’offensive turque en cours, a déclaré lundi le commandant des Unités de protection du peuple kurde (YPG), Sipan Hamo.
Lancée le 20 janvier, l’opération «Rameau d’olivier», menée par la Turquie avec des rebelles syriens, vise à chasser les YPG, classé groupe «terroriste» par Ankara, de l’enclave frontalière d’Afrine, dans le nord-ouest syrien. «Nous n’avons aucun problème avec l’entrée de l’armée syrienne pour défendre Afrine et sa frontière face à l’occupation turque», a indiqué M. Hamo lors d’une conférence de presse, en réponse à une question de l’AFP. L’administration semi-autonome kurde avait déjà appelé le 25 janvier le régime de Damas à intervenir en déployant des forces à la frontière, entre Afrine et la Turquie. Le pouvoir syrien, qui a dénoncé «l’agression» turque, n’a jamais réagi à cet appel. Car la communauté kurde rejette les conditions de Damas, en l’occurrence un redéploiement de l’armée syrienne dans la région et le retour des institutions étatiques du régime. «Le régime affirme toujours qu’Afrine fait partie de la Syrie (…) alors il doit assumer son devoir», a ajouté M. Hamo, lors d’une conférence par Skype avec un groupe de journalistes. Le responsable militaire a assuré, en parallèle, que les zones contrôlées par les YPG étaient considérées par les forces kurdes comme partie intégrante de la Syrie. «Pour l’instant, nous n’avons vu aucune mesure concrète de la part de l’Etat (syrien) concernant l’agression turque (…)», a-t-il ajouté, évoquant une «coordination limitée» avec les autorités syriennes pour l’acheminement d’aide humanitaire vers Afrine. Des responsables kurdes avaient indiqué à l’AFP que Moscou leur avait offert une protection contre la Turquie s’ils laissaient leurs territoires au régime syrien, et avait retiré son soutien aérien quand ils avaient refusé. Estimés à 15% de la population, opprimés pendant des décennies sous le régime du clan Assad, les Kurdes ont profité de la guerre déclenchée en 2011 pour établir une autonomie de facto dans les territoires qu’ils contrôlent, dans le nord et le nord-est du pays. Les forces kurdes, soutenues par les frappes aériennes d’une coalition internationale emmenée par Washington, ont été en première ligne de la lutte contre les jihadistes du groupe Etat islamique (EI). «Nous avons combattu le terrorisme de Daech pour le compte du monde entier, l’Europe ou les pays occidentaux n’ont pas le droit de tenir le rôle de spectateurs face à l’Etat turc et son comportement barbare», a martelé M. Hamo, utilisant l’acronyme en arabe de l’EI. L’autonomie de facto acquise par les Kurdes à la faveur du conflit qui ravage la Syrie depuis 2011 préoccupe Ankara, qui craint de voir sa propre communauté développer des aspirations similaires.
De son côté, Damas voit aussi d’un mauvais oeil cette autonomie, et ne cache pas son intention de reconquérir l’ensemble du territoire syrien, aujourd’hui morcelé par la guerre qui a fait plus de 340.000 morts.