Au moins 25 manifestants ont été tués vendredi en Syrie selon des militants des droits de l’Homme, lors d’une nouvelle journée de mobilisation anti-régime, alors que les autorités ont fait état de leur côté de la mort de sept membres des forces de l’ordre.
Six semaines après le début du mouvement de contestation contre le régime du président Bachar al-Assad, quelques dizaines de milliers de personnes ont défilé dans plusieurs villes malgré l’interdiction.
A Deraa (sud), berceau de la contestation, seize personnes venues apporter des vivres à la ville assiégée depuis lundi ont été tuées et des dizaines d’autres blessées par des tirs des forces de sécurité, selon un militant de droits de l’Homme sur place.
Les forces de sécurité ont ouvert le feu aux entrées est et ouest de la ville sur des personnes venues « par milliers » des villages voisins « pour apporter de l’aide et de la nourriture » aux habitants terrés chez eux depuis cinq jours, a assuré à l’AFP des militants des droits de l’Homme. Vendredi dernier, la répression avait fait plus de 80 morts. Parallèlement, un porte-parole militaire a affirmé que quatre soldats ont été tués à l’aube et deux autres enlevés à Deraa lors d’une attaque par un « groupe terroriste armé » contre un poste militaire à Deraa.
A Homs (centre), ville industrielle située à 160 km au nord de Damas, et ses environs, neuf personnes ont été tuées par les forces de sécurité lors d’une manifestation de plusieurs milliers de personnes demandant la chute du régime, a indiqué à l’AFP un militant local des droits de l’Homme.
Une source au ministère de l’Intérieur a annoncé pour sa part que trois policiers, dont un officier ont été tués par balles par des « groupes terroristes extrémistes » à Homs. Le Conseil des droits de l’Homme de l’ONU a voté vendredi une résolution demandant l’envoi urgent d’une mission en Syrie pour enquêter sur les violations des droits de l’homme.
L’épreuve de force s’est poursuivie pour le septième vendredi avec « les jeunes de la révolution syrienne » qui avaient appelé sur Facebook à un « vendredi de la colère » en solidarité avec Deraa.
Ainsi, 2.000 manifestants se sont rassemblés dans le quartier de Midane à Damas, ont déclaré des militants à l’AFP. Et plusieurs milliers d’autres se sont rassemblés à Saqba, près de la capitale. A Banias, près de 10.000 personnes ont scandé « Liberté, solidarité avec Deraa », selon des militants des droits de l’homme.
Omar el Habbal, un opposant syrien de Hama, 210 km au nord de la capitale, a assuré que « plusieurs milliers d’habitants sont sortis dans les rues et certains ont enlevé des portraits de Bachar al-Assad accrochés sur des bâtiments gouvernementaux ».
A Deir Ez-Zor, à 460 km au nord-est de Damas, un millier de protestataires ont été dispersés « à coups de bâtons et de câbles électriques », a affirmé à l’AFP Nawaf al-Bachir, un militant des droits de l’Homme.
Et à Ar Raqqa, à 540 km au nord-est de la capitale, 300 à 400 personnes ont crié « Dieu tout-puissant, faites que le siège à Deraa soit levé », selon Abdallah al-Khalil, membre d’une association de défense de droits de l’Homme. Dans la région à majorité kurde du nord de la Syrie, 15.000 personnes ont défilé sans incident à Qamichli et dans trois localités environnantes, selon des responsables kurde pour les droits de l’Homme. Les autorités avaient pourtant appelé « les citoyens à s’abstenir de mener des manifestations ou des sit-in sans autorisation officielle », selon un communiqué du ministère de l’Intérieur.
Le 19 avril, M. Assad avait promulgué un décret obligeant les organisateurs de manifestations à obtenir au préalable une autorisation officielle dans ce pays dirigé d’une main de fer par un parti unique, le Baas, depuis 1963. Les Frères musulmans, principal groupe d’opposition dans le pays, ont accusé le régime de perpétrer un « génocide ».
Environ 250 villageois syriens tentant d’entrer en Turquie vendredi ont été stoppés à la frontière par les forces de sécurité turques, a annoncé l’agence de presse Anatolie, alors qu’un millier d’autres Syriens ont fui vers le Nord du Liban ces dernières 48 heures.
Depuis le début de la contestation, plus de 500 personnes ont été tuées dans tout le pays, selon le « Comité des martyrs du 15 mars », proche des opposants. Mais le porte-parole militaire a démenti ce chiffre, expliquant que 148 personnes avaient été tuées — 78 militaires et policiers et 70 civils.