La course contre la montre de Sarkozy a-t-elle des chances d’aboutir le soir du 6 mai?
A moins de deux semaines du scrutin, servi par les événements et auteur d’une campagne efficace et agressive, le président sortant est de retour dans la course, même si François Hollande garde quelques longueurs d’avance.
Nicolas Sarkozy peut-il réaliser un renversement de situation inédit dans l’histoire politique récente en France? Les électeurs donneront un début de réponse le 22 avril, premier tour de la présidentielle et première manche de son affrontement avec le socialiste François Hollande. A la fin de l’an dernier, certains responsables de son propre camp se demandaient en privé si un autre candidat ne serait pas mieux placé au sein de la droite française. Impopulaire comme aucun autre avant lui, Nicolas Sarkozy était donné perdant au second tour à 40% contre 60% à son adversaire, et à la merci d’une élimination dès le premier tour. A moins de deux semaines du scrutin, servi par les événements et auteur d’une campagne efficace et agressive, le président sortant est de retour dans la course, même si François Hollande garde quelques longueurs d’avance. La présidence de la cinquième puissance mondiale devrait échoir à l’un de ces deux hommes, aucun des huit autres candidats n’étant à ce stade en mesure de se qualifier pour le second tour, prévu le 6 mai, selon toutes les enquêtes. Dans un style provocateur, Nicolas Sarkozy exprime régulièrement sa confiance. «Je vais gagner et je vais même te dire pourquoi. Il n’est pas bon et ça commence à se voir. Hollande est nul!», aurait-il confié récemment à une journaliste du quotidien Le Monde. Son adversaire répond qu’il n’est pas question pour lui de descendre dans cette «cour de récréation» en répliquant à ce genre d’attaques. A 57 ans tous les deux, François Hollande et Nicolas Sarkozy ne pourraient être plus dissemblables. Le socialiste est un homme affable, adepte du consensus. Après cinq années de mandat, le président sortant a fait le pari de rassembler d’abord son camp, la droite, et tiré parti de son retard dans les sondages pour se présenter, contre toute attente, comme «le candidat du peuple»contre les élites. Le discours sur l’immigration est dur, de plus en plus proche de celui de la candidate de l’extrême droite, Marine Le Pen. «Nous avons trop d’étrangers sur notre territoire», dit-il. L’agenda sécuritaire a été dopé par l’actualité tragique, le traumatisme national des sept assassinats du jeune jihadiste français, Mohamed Merah. Les arrestations spectaculaires et médiatisées d’islamistes radicaux se sont multipliées. Face à lui, François Hollande trace son sillon sans à-coup. Ce socialiste réformiste, plutôt modéré, au physique banal et qui se définit lui-même comme «normal», n’a pu émerger qu’après la mise hors course de Dominique Strauss-Kahn, l’ancien directeur du Fonds monétaire international (FMI), accusé de viol par une femme de chambre new-yorkaise. Mais les sondages, qu’il domine depuis près d’un an, sont un peu moins bons ces dernières semaines. Sarkozy serait désormais en tête au premier tour (un peu au-dessous de 30%) devant le socialiste, qui accuse entre 1 et 4 points de retard. Au second tour, Hollande l’emporterait toujours avec entre 53% et 55% des voix. Surtout, François Hollande est gêné par la percée de Jean-Luc Mélenchon, véritable phénomène de la campagne. Tribun de la gauche radicale, il est crédité de 15% des voix, rassemble des foules impressionnantes lors de ses meetings, et montre l’existence d’un électorat qui ne se satisfait pas du réalisme économique des socialistes. Candidat d’une «gauche sérieuse qui ne décevra pas», François Hollande a endossé les objectifs de réduction des déficits publics qui sont aussi ceux de la droite. Déficit zéro en 2017, dit-il, lorsque le président sortant parle de 2016. Le socialiste met davantage l’accent sur de nouvelles recettes fiscales, prélevées sur les plus riches. La droite insiste sur la poursuite de coupes dans les dépenses publiques, dans une Europe plombée par l’endettement.