C’est peut-être un mauvais signe pour la Tunisie en transition : des touristes libyens et… tunisiens viennent de plus en plus vers Annaba ! De quoi faire rêver les opérateurs du secteur. Il reste pourtant beaucoup à faire pour valoriser les fabuleux atouts touristiques de la région.
Les temps ont bien changé pour le tourisme au Maghreb. La Tunisie, destination de choix des algériens, a vu son image perturbée. L’instabilité politique, la crise sociale, l’effondrement de l’économie et l’émergence de groupes salafistes ont défiguré l’image de la Tunisie, hier encore Tounes El Khadra.
A Annaba, quatrième ville algérienne, avec une population de 600.000 habitants, ses côtes et ses hôtels attirent désormais les touristes tunisiens. La plupart des établissements hôtels affichent complet jusqu’au début septembre 2013. « L’arrivée des tunisiens a commencé l’année passée. Nous pensions que c’était un phénomène temporaire. Mais, non. Cette année, le nombre des tunisiens a sensiblement augmenté.
Des familles entières ont fait des réservations », nous explique un cadre commercial à Golden Tulip, la chaîne qui gère deux hôtels appartenant au groupe Sabri. Les libyens, qui avaient l’habitude de passer leurs vacances en Tunisie et en Egypte, débarquent aussi sur les côtes bônoises.« Cela fait longtemps que les libyens ne venaient plus à Annaba, à El Kala ou à Skikda, la ville voisine. Mais, là on assiste à un retour pour le bien du tourisme dans cette région. Les libyens ont la réputation d’être dépensiers », nous a déclaré un gérant d’un restaurant bien en vue face à la plage Saint Cloud.
Le littoral d’Annaba s’étend sur 85 km de Oued Bouchir à Cap Toulkou. A Toche, la plage qui rappelle celle d’El Djamila à l’ouest d’Alger, ou La Caroube, des familles tunisiennes sont souvent présentes même si la qualité de service n’est pas celle de la Tunisie. « Il faut que dire que la région de Annaba est face à une véritable défi. Comment faire pour attirer davantage de touristes des pays voisins. C’est une occasion historique. Mais, il y a beaucoup de choses à changer. D’abord, les commerces en ville doivent ouvrir le soir. Certains hôtels doivent refaire une nouvelle peau, s’adapter aux normes universelles. Les restaurants sont tenus de varier leurs plats, améliorer la qualité d’accueil. Il en est de même pour l’aéroport où tout doit être refait », a détaillé un enseignant à l’université d’Annaba.
Retard de livraison du nouvel aéroport
Annaba attend son nouvel aéroport depuis des années. Le projet que mène l’égyptien Arab Contractors depuis 2006 enregistre un retard de livraison (les travaux devaient être achevés fin 2012). Le constructeur évoque parfois le manque de main d’œuvre qualifié. Une fois livrée, la nouvelle aérogare d’Annaba devra accueillir annuellement entre 700.000 et 1.500.000 passagers. « En fait, il n’y a pas que l’aéroport qui pose problème.
Le port de Annaba doit être complètement réaménagé pour ouvrir une fenêtre sur la ville, lui permettre de mieux respirer. Pourquoi ne pas penser à un port de plaisance pas forcément en ville ? » s’est interrogé un ancien architecte. Il est important, selon lui, d’améliorer les prestations au niveau de la gare maritime. Annuellement, 2,5 à 3 millions de tonnes sont traités au niveau du port de Annaba.
A 8 km de la ville, Cap de Garde, sur la corniche, attend toujours le projet de construction d’un Centre des sports nautiques. Dans cette région, la Zone d’expansion touristique (ZET) ne semble porter que le nom. Annaba compte actuellement une quarantaine d’hôtels. Les travaux du Sheraton ont été lancés depuis quelque mois. Cet hôtel 5 étoiles, qui aura 20 étages, va s’étendre 42.000 m². Le coût du projet est de 13 milliards de dinars.
Théoriquement, Sheraton Annaba sera ouvert en décembre 2014. L’hôtel Sheraton sera implanté à un jet de pierre de l’hôtel Seybouse, un établissement public qui se dégrade à vue d’œil. Seybouse, qui était jadis un joyau, a perdu deux étoiles. La qualité des services est juste moyenne et l’accueil n’est pas le meilleur d’Algérie ! Majestic, un nouvel hôtel situé non loin de Seybouse, est parmi les meilleurs établissements hôteliers de la ville, même si beaucoup de choses manquent encore. L’hôtel Orient, qui avait ses fenêtres sur le fameux Cour de la Révolution, est en pleine réhabilitation alors que quatre autres hôtels sont en cours de construction.
Bureaucratie et blocages
Comme ailleurs en Algérie, les investisseurs se plaignent de lenteurs bureaucratiques et de blocages administratifs. « On n’a toujours pas compris que le tourisme, la pêche et l’agriculture sont les véritables atouts de la région de Annaba », a rappelé le même enseignant universitaire. Selon lui, le tourisme culturel est un créneau à encourager. Il cite l’exemple de la basilique Saint Augustin qui se trouve à l’entrée d’Annaba.
Début juin, les travaux de restauration de ce lieu de culte chrétien ont été achevés. La basilique réhabilitée a été réceptionnée par l’évêque de Constantine, Paul Desfarges. Entre 15.000 et 20.000 touristes visitent la basilique Saint Augustin chaque année. Reste l’activité culturelle et les loisirs. Sur ce plan, Annaba est un véritable désert. Mise à part les efforts de Sonia Mekiou qui dirige le Théâtre régional Azzedine Medjoubi de Annaba ou ceux des responsables de la Palais de la culture, la coquette manque terriblement d’activités artistiques et littéraires surtout en période estivale. Certains se souviennent des fameuses Journées cinématographiques Méditerranéennes de Annaba. Un événement vite enterré. Aujourd’hui, il n’y pas pratiquement plus de salles de cinéma à Annaba.