Le ministère du Tourisme, à travers l’Office national du tourisme, a eu l’excellente idée de relancer les Eductour, des voyages touristiques au profit des journalistes. Histoire de faire découvrir ou redécouvrir quelques-uns des trésors naturels et historiques enfouis au cœur de l’Algérie. Pour ce premier voyage, les organisateurs optent pour quelques villes de la côte Ouest. Tlemcen, Aïn Témouchent et Oran. Là, des surprises les attendent.
• Tlemcen un trésor à ciel ouvert
La ville des Zianides, des Mérinides et de Sidi Boumediène… a survécu aux guerres, aux envahisseurs multiples et aux dynasties qui s’y sont succédé, à travers les siècles. Aujourd’hui encore, la ville porte les traces des conquérants. Au cœur de la ville, le vieux minaret (le troisième dans le monde après celui de l’Espagne et du Maroc), la pépinière antique et les remparts des royaumes du Mechouar et de Mansourah dont la construction remonte au XIVe siècle, témoignent de la puissance et du «style» dont jouissait la ville jadis. Tandis qu’à proximité de ces cités, se dressent fièrement le mausolée de Sidi Boumediène et l’école khaldounienne, merveilleusement parés, pour dire que Tlemcen est aussi une ville de piété et de savoir.
De l’extérieur, les deux cités berbères paraissent sublimes, saisissantes par ce qu’elles portent de symboles, victoires et drames. Mais à l’intérieur, c’est la grande déception ! Au Mechouar du moins. Des mains maladroites de certains restaurateurs ont détruit ce qui subsistait de l’ancien palais et habitations des Zianides. Au lieu de se limiter à leur travail de restaurateur, ils se sont fait constructeurs, ou plutôt destructeurs, eux qui ont démoli le palais pour en reconstruire un autre dans une architecture, certes fidèle à l’ancienne, mais dénuée de ce quelque chose qui impulse l’imaginaire de l’homme. Le pire, c’est que ces «restaurateurs» ont fait construire, au centre de cette ancienne ville berbère, un amphithéâtre romain ! La mosquée royale et les murailles extérieures semblent être les seuls monuments épargnés !
Quant à El Mansourah, la cité est en pleine restauration. Mais beaucoup redoutent qu’elle ne suive l’exemple du Mechouar… Fort heureusement, le mausolée de Sidi Boumediène n’a pas subi de rtransformations, de même que la magnifique mosquée Abou Madyane qui juxtapose le Mqam ainsi que le palais d’une princesse, resté pratiquement intact, situé au bas du mausolée, au milieu d’un jardin des plus antiques. Des endroits délicieux et mystérieux qui appellent à être visités !
DANS LES GROTTES BENI AÂD
Des monuments qui nous font oublier l’absence de la mer. Surtout l’été. Mais à Tlemcen, il y a mieux ! Pour ceux qui aiment l’exploration, du mons. Les grottes de Beni Aâd. Un sublime pendentif naturel auquel ne manque qu’une chaîne pour être suspendu au ciel ! Immenses, encore plus grandes que celles de Jijel. D’après le guide, elles sont les plus grandes dans le monde après celles du Mexique, et une demande a été introduite pour faire d’elles un patrimoine universel. Les grottes comptent plusieurs couloirs et galeries sur une longueur de plus d’un kilomètre ainsi qu’un tunnel de 140 km qui conduit directement à Oujda. Le tunnel était emprunté par les moudjahidine avant qu’il ne soit condamné par la France coloniale. Le plafond, les murs et le sol des grottes sont décorés de stalagmites et stalactites, sculptées par des mains invisibles dans des formes tantôt abstraites, tantôt géométriques… à chacun son imagination ! Un autre endroit à visiter absolument ! Mais pour y accéder, c’est une autre histoire. «Les grottes sont situées en dehors de la ville et pour y arriver, il faut un véhicule. Or, pour ceux qui n’en ont pas, le transport est un problème puisqu’il n’y a pas de bus qui y mène. Les autorités locales n’ont pas pensé à mettre en place des bus au profit non seulement des touristes – cela peut entrer dans le cadre de la promotion du tourisme dans la région – mais aussi des Tlemcéniens, surtout en cette période estivale», déplore le guide, Mustapha Hassani.
Donc, il n’y a que ceux qui ont des véhicules qui peuvent jouir de cet endroit, à condition, toutefois, qu’ils le fassent avant 17h ! Cet horaire passé, les visiteurs sont rabroués. C’est le cas de cette famille de Annaba, qui a dû rebrousser chemin, car arrivant après 17h, l’heure de fermeture des lieux. Et pourtant, elle a parcouru des kilomètres rien que pour visiter ces grottes ! «Il y a quelque temps, les grottes restaient ouvertes jusqu’à 19h. Mais depuis la saisons estivale, elles sont interdites aux visiteurs au-delà de 17h», confie le guide.
LE PALAIS ALADIN POUR LES ROMANTIQUES !
Le palais Aladin, qui confère à la ville un air romantique, mérite aussi le détour. C’est l’œuvre d’un notable tlemcénien qui a fait bâtir ce palais en hommage à sa dulcinée. Une merveille ! On pourra presque voir surgir la lampe merveilleuse d’Aladin de l’une des coupoles du palais pour exaucer les vœux des visiteurs ! Ces derniers d’ailleurs ne seront qu’heureux de se promener sur le plateau de Lala Siti (une sainte, fille de Abdelkader El Djilani qui a fondé la première université féminine dans le monde islamique), implantée un peu plus loin du palais, au centre de la ville.
Là, de grands espaces sont aménagés au milieu des arbres pour des pique-niques de fin d’après-midi et des aires de jeux pour les tout petits. Un endroit très agréable où la chaleur n’est pas suffocante et ce, grâce au petit barrage d’eau implanté au centre du plateau. De la fraîcheur aussi qui provient du jardin de l’hôtel Renaissance, fraîchement construit dans un style mauresque. Un hôtel 5 étoiles qui fait partie de la chaîne hôtelière américaine Mariott. D’après les tarifs qu’il affiche (12 000 dinars la nuitée en moyenne), cet établissement n’est pas destiné aux bourses moyennes… Cela dit, la ville vient de réceptionner un nouvel hôtel, Pomaria, trois fois moins cher que la Renaissance. Celui-là, il est accessible… sauf pour les familles nombreuses. Dans ce cas-là, il faudrait peut-être des camps de toile, comme l’a signifié le ministre du Tourisme, Ismail Mimoun, lors de l’inauguration de l’hôtel Ibis, à Oran. «Le tourisme international est fait surtout de camps de toile que d’infrastructures hôtelières. Les gens n’ont pas à avoir honte d’y recourir pour l’hébergement», avait-il assuré.
«Avril-mai est la période idéale pour visiter la ville. Les touristes étrangers y viennent souvent à cette époque de l’année, surtout les anciens Pieds noirs qui y effectuent une sorte de pèlerinage», précise le guide. Quant aux Tlemcéniens, l’été, ils préfèrent aller à la mer. A Marsat El Kebir notamment, ainsi qu’à Beni Saf. Une ville qu’ils affectionnent particulièrement, car faisant partie de Tlemcen avant qu’elle ne soit «affectée » à Aïn Temouchent.
• Ain temouchent : Le royaume de Syphax, transformé en… décharge publique !
Une ville charmante qui garde encore un cachet architectural colonial. Selon le guide, c’est aux environs de cette ville qu’est né Tarek Ibn Ziyad, dans des grottes à proximité de Siga, capitale du royaume de Syphax. Dans ces grottes aussi, l’Emir Abdelkader s’y réfugiait avec son cheval et quelques- uns de ses soldats et amis. L’endroit où se trouvent les grottes a été fraîchement nettoyé, assure l’une des représentantes de la direction du tourisme de Aïn Témouchent. «Il n’y a pas longtemps, le site était couvert d’ordures et très peu de personnes connaissent l’existence de cet endroit», confie-t-elle. D’ailleurs, à proximité de ces grottes, on peut apercevoir des détritus qui s’obstinent dans les alentours. Un spectacle, hélas, qui n’est pas unique en son genre à Aïn Témouchent, beaucoup de collines sont transformées en décharges publiques ! De tristes images qui attirent d’emblée les regards presque autant que la mer ! Siga ne fait pas exception à la règle. Cette ville illustre qui s’élève sur les bords de l’oued Tafna et sur laquelle Syphax a bâti tous ses rêves, est réduite aujourd’hui à un tas de détritus et de sacs poubelles que le vent s’amuse tristement à faire tournoyer indéfiniment. Au lieu de sentir l’odeur fraîche de la terre et de l’argile dans lesquelles a été modelée la cité de Siga, ce sont des odeurs nauséabondes qui agressent les narines du trône fantôme du roi berbère. Une muraille de quelques mètres, quelques pierres et le mausolée de Syphax. Tout ce qui reste de cette ville dont les vestiges sont, selon certains, enfouis sous terre. Et y accéder, relève du parcours du combattant !
Mais heureusement qu’il y a la mer pour faire oublier les négligences de l’Homme ! Or, la mer, c’est ce qu’il y a de plus beau à Aïn Témouchent. Du complexe de Syphax, de Terga et des autres petits villages côtiers de Aïn Témouchent, sans oublier Beni Saf et son joli petit port de pêcheurs, la mer est splendide. 20 plages sur les 29 que compte cette région sont autorisées à la baignade et partout où on se place, la petite île de Rechgoun, caressée par la mer de toute part, nous fait un clin d’œil, nous interpelle pour admirer de plus près son phare construit durant la période coloniale. Une traversée s’impose ! Mais pour cela, il faut louer un bateau de pêcheur ou ce qu’on appelle un chalutier. Les bateaux de plaisance, cela n’existe pas à Aïn Témouchent. Comme à Tlemcen, les habitants de Aïn Témouchent se sentent lésés en matière de transport touristique. Pour louer un chalutier, il faut des moyens et la plupart des touristes se contentent d’admirer Rechgoun de loin.
• Oran : Le privé en force
Tout au long de son ravissant port, de petits et de grands bateaux se tiennent côte à côte. A ce niveau et si nous levons la tête, nous apercevons la majestueuse Santa Cruz et juste au-dessus de la grande statue, le vieux phare espagnol qui remonte au XIVe siècle. Au niveau de ce port, de petits bateaux sont loués par des touristes pour des traversées. Mais cette année, une destination manque au programme. Les îles Habibas, qui se trouvent à 9 kilomètres de la côte, sont, en effet, interdites aux visiteurs. «Les îles renferment des espèces végétales rares. Il n’y a pas longtemps, les phoques marins, une espèce en voie de disparition, se reproduisaient sur ces îles. Mais ils ont quitté cet endroit à cause de la visite, de plus en plus nombreuses, de touristes. Les phoques n’aiment pas beaucoup la compagnie des humains ! Nous espérons ainsi que les phoques reviennent par ici. D’autant plus que les îles sont déclarées réserve naturelle par les institutions internationales», explique M. Abdelhak, notre guide à Oran. Mais cela n’exclut pas, dans le futur, des visites guidées sur ces îles. D’ailleurs, cela fait partie des projets des autorités locales qui comptent acquérir des bateaux de plaisance ou ce qu’on appelle les bateaux semi-rigide. En attendant que cela se fasse, les réjouissances ne manquent pas sur la terre ferme. Du côté des Andalouses notamment où de plus en plus de complexes fleurissent. Il faut dire qu’El Bahia attire de plus en plus d’investisseurs privés. Outre l’homme d’affaires Djillali Mehri, qui a fait construire l’hôtel «Royal» (22.000 DA la nuitée) partenaire du groupe français Accor pour la construction d’une série d’hôtels dans l’Oranie, tels que Ibis (6.000 DA la nuitée), il y a le groupe Eden Palace, propriétaire du complexe le Phoenix, groupe Adef qui a édifié le complexe Beach House aux Andalouses et du groupe Belazoug qui vient d’inaugurer un centre de thalassothérapie au sein de son complexe, New Beach, aux Andalouses également, fonctionnel depuis deux ans. Ce groupe a aussi à son actif, des appartements en bord de mer à Aïn El Turck et projette d’investir à Alger avec la construction d’un hôtel à Belouizdad. «Un hôtel pour la classe moyenne. C’est ce qui manque dans la capitale», estime le directeur de ce groupe. Il va sans dire que ces complexes et ces appartements, ainsi que le centre de thalassothérapie ne sont pas destinés au simple citoyen…