Les islamistes rebondissent. Dans beaucoup de pays arabes, ils prennent les commandes du pouvoir. C’est du moins ce qui ressort des dernières élections législatives en Tunisie, au Maroc et en Egypte, à la faveur desquelles des formations appartenant à la mouvance islamiste ont raflé la majorité des sièges.Quel impact sur les partis islamistes algériens ? El Islah et le MSP affichent une grande confiance. A leurs dires : les islamistes sont capables de renverser la balance, à condition qu’il y ait des élections «libres et transparentes ». Mais cet avis n’est pas partagé par l’enseignant universitaire Ahmed Adimi.
Catégorique, il confirme : «Les islamistes n’auront pas la majorité lors des prochaines élections ». Motifs invoqués : leur responsabilité et leur implication dans les actes de violence perpétrés durant la période du terrorisme ravageur. «De plus, l’opinion nationale n’a pas oublié les déclarations de certains islamistes qualifiant par le passé la démocratie de «mécréance», précise ce docteur es sciences politiques. L’expérience algérienne démontre, selon lui, qu’il n’existe aucune différence entre les ministres d’obédience islamiste ou nationaliste. Ils ont tous fait l’objet de critiques.
En termes de perspective, il estime que lors des prochaines joutes électorales, la mouvance islamiste décrochera certainement «une partie du gâteau», «mais je ne pense pas qu’elle dépassera les 40%». M. Adimi prévoit, cependant, la victoire des nationalistes si, toutefois, ils arrivent à s’unir autour d’une même cause.
La nouvelle génération des électeurs est très ouverte. Elle est même exigeante. «Je vois mal celle-ci voter pour des gens sans programme, ni vision claire sur des questions très importantes pour la société», observe-t-il, en soulignant l’impact que peut introduire l’ouverture du champ audiovisuel, à travers des émissions consacrant des débats constructifs. Ce qui peut sensibiliser l’opinion publique sur les dangers «de tout intégrisme».
Qu’est-ce qui démarque l’Algérie des autres pays arabes ? M. Adimi explique que les islamistes marocains et algériens ne se ressemblent pas. Eux, ils ont des élites porteuses de véritables projets. «Ce n’est pas le cas chez nous. De plus, le Maroc et l’Egypte n’ont pas d’expérience avec les islamistes. Par contre nous, si. Ce qui s’est passé en 1992 a bien illustré que le parti islamiste ayant drainé la foule n’a été qu’un grand éléphant avec une petite tête», fait-il remarquer.
MSP : «NOUS ALLONS BÉNÉFICIER DE CE QUI SE PASSE DANS LE MONDE ARABE»
Mohamed Djoumaa, chargé de communication du MSP, renvoie cette question à la profondeur des réformes, pouvant constituer, selon lui, un message fort pour la société en vue de ne pas bouder encore une fois les urnes. Selon lui, les premiers qui seront sanctionnés par l’abstention électorale sont les «partis de la mouvance islamiste ».
La société est-elle prête pour adopter ce courant ? M. Djoumaa est convaincu que les Algériens savent faire le distinguo entre les islamistes pacifiques et ceux ayant porté les armes contre leurs frères.
«Les partis islamistes algériens vont bénéficier de ce qui se passe dans le monde arabe», certifiet- il. Hamlaoui Akouchi, secrétaire général du mouvement El Islah, estime que la tendance islamiste gagne réellement du terrain et l’Algérie ne peut pas échapper à cela. «En garantissant des élections libres et transparentes, les islamistes réaliseront de meilleurs scores que les Tunisiens et les Egyptiens», enchaîne-t-il, même si leur image est quelque peu entachée.
«Certes, dit-il, ils n’ont pas eu d’expérience dans le pouvoir, mais ils ont d’énormes chances de changer la donne. Cela est faisable avec la réalisation d’alliances entre les formations défendant les mêmes principes». M. Akouchi n’écarte pas de pareilles alliances avec le mouvement Ennahda lors des prochaines élections. Parti avec lequel «il s’entend parfaitement bien» pour reprendre ses termes.
Karima Alloun