Suite aux cas de Malaria signalés, L’intox fait des ravages à Oran

Suite aux cas de Malaria signalés, L’intox fait des ravages à Oran

El Bahia vit à l’heure de la rumeur

La malaria a été provoquée lorsqu’un supporter s’est déplacé au Burkina Faso sans se faire vacciner.



«On ne périt pas à partir d’une simple et petite écorchure.» Un tel aveu a émané d’un spécialiste en maladies épidémiologiques qui a ajouté que «les quelques cas de la malaria déclarés à Ghardaïa sont loin de concerner les habitants de la wilaya d’Oran». Des sources proches de la direction de la santé de la wilaya d’Oran ont indiqué «n’avoir enregistré aucun cas et que la situation qui prévaut à Ghardaïa, qui n’est pas endémique, ne nécessite pas toute la folie qui continue à circuler un peu partout dans le pays». La malaria a été provoquée lorsqu’un supporter s’est déplacé au Burkina Fasso sans s’immuniser en ne se vaccinant pas à l’avance. Dans le cas de la wilaya d’Oran, les supporters des Fennecs ont tous été vaccinés au niveau de l’Institut Pasteur d’Alger. La direction de la santé d’Oran ne compte pas rester inerte en mettant en place des mécanismes permettant de prendre en charge la problématique dès que le phénomène ferait ses éventuelles premières apparitions. En effet, l’Etablissement hospitalo-universitaire, le CHU et autres structures sanitaires d’Oran auraient été destinataires des courriers dans lesquels ils ont été instruits de signaler, tout en le prenant en charge, tout cas de malaria. Qu’à cela tienne! Etrange avatar de l’histoire, les Oranais se rappellent des épisodes de la célèbre saga littéraire d’Albert Camus, La Peste.

«Les professeurs, les chefs de service, médecins et personnels paramédicaux ne parlent que de la malaria», a indiqué un professeur exerçant à l´hôpital d´Oran. Il est 8h du matin de la journée de jeudi dernier lorsque le personnel médical commençait à gagner ses bureaux. Les patients, devant se faire ausculter, sont déjà en place.

Ils se livrent à des débats des plus pointus, chacun des présents donnait sa lecture ravageuse basée sur la rumeur stressante. «La maladie de l’Afrique commence à tuer», a lâché un patient d’un racisme arrogant. Un infirmier tente de rassurer en indiquant que «la wilaya d’Oran n’est pas touchée».

La rumeur de la mort

Le corps médical et paramédical est en pleine besogne, en orientant les patients venant des wilayas limitrophes. «Mille égarements nous attendent à la faveur de toutes les angoisses qui s´accumulent dans les salles d´attente et les couloirs des différents services, chacun des patients vient nous demander des informations sur cette maladie qui aurait été contractée par des supporters négligents», a affirmé un autre infirmier. Un psychologue se dirigeant vers le service de la médecine du travail, voit mal ce qui se rapporte dans la presse nationale, notamment par la presse écrite alors que les médias lourds se sont contentés de rapporter le «tout va bien, Mme la marquise».

«Il faut que cette télévision fasse preuve de son professionnalisme en apaisant les populations», a-t-il préconisé ajoutant que «les praticiens savent bien ce qu’est la malaria mais les populations, qui ne croient qu’à la mort à la moindre égratignure, ignorent totalement cette maladie.» Une infirmière ricane en rassurant, vainement, ses patients au discours insensé. «Ce n´est là que de l´intox et des rumeurs, il n´y a rien d´officiel», a-t-elle expliqué. Un débat de vive voix s´enclenche lorsqu´une patiente extériorise sa crainte et soutient que «tous les journaux en parlent en annonçant le décès des supporters de l’Equipe nationale tandis que plusieurs autres sont en sursis.»

L´infirmière passe à l´offensive et réplique en annihilant les dires «farfelus» de la femme en jurant par tous les saints qu´il n´y a pas lieu de s´alarmer.

«Certes, il y a eu un décès mais pas plus, le ministère de la Santé a bien pris les choses en main en mettant en place tous les moyens permettant la non-propagation de la maladie annoncée dans les journaux», a-t-elle expliqué à l’encontre des patients.

Où est passé Abdelmalek Boudiaf?

A peine installé à la tête du département de la santé, Boudiaf Abdelmalek, ex-wali d’Oran, est mis à rude épreuve. Loin de ces assurances, les populations locales sont-elles réellement tranquilles? Pas si sûr. Le ton n´est pas à l´indifférence, surtout que le décès du caméraman de l’Entv a, en un laps de temps, fait le tour de toute l’Algérie. Des centaines de citoyens ont perdu leur calme et cédé à la panique. L’intox fait rage. «Cette situation est prévisible face à l´absence totale de communication des chiffres et bilans réels», regrette un médecin qui poursuit: «Vous savez que nous n´avons pas le droit de parler aux médias sauf si le ministère de la Santé nous en accorde l´autorisation!», se plaint encore ce médecin. Or, ce ministère a, jusque-là jugé utile de rendre public un quelconque communiqué dont le contenu s’adresse aux populations en vue de les apaiser. Face à cette rétention de la communication, la rumeur prend inévitablement le relais et ce n´est pas pour rassurer… Cette spéculation n´est pas tout à fait différente de celle qui régit les prix et la disponibilité des légumes et des fruits dans les marchés. «Qu´on nous dise toute la vérité!» s´exclame, excédé, un autre citoyen. «Le ministre de la Santé est-il à ce point insensible aux cris de détresse de toute une population, pourquoi ne viendrait-il pas à la télévision pour rassurer au moins toutes ces femmes enceintes? Le mal est-il fait? Toute déclaration, ne serait- ce que tardive, du ministre, ou encore des directions de wilaya de la santé ou encore celle provenant directement de tout autre responsable, peut être convaincante tant que la malaria n’est pas épidémique. «Malgré l’angoisse, il faut tout de même passer par l´hôpital ou se faire ausculter par les services de prévention sis à Es Sedikia», a affirmé un médecin privé. Comment interpréter le fait que les vaccins devant être prodigués aux supporters des Verts, avant leur déplacement à Ouagadougou, soient centralisés au niveau de la ville d’Alger et très précisément au niveau de l’Institut Pasteur? Or, chaque wilaya dispose d’un ou de plusieurs services dédiés exclusivement à la prévention contre les maladies épidémiologiques comme celui de Cave Gay situé dans le secteur urbain d’Es Sedikia. «Nous n’avons pas reçu de tels vaccins depuis belle lurette», a déploré un médecin exerçant dans le centre de prévention de Loubet situé dans le centre-ville d’Oran. Seul le ministre de la Santé est en mesure d’apporter des réponses à une telle question posée bien avant le 12 octobre dernier, c’est-à-dire avant le match qui a opposé l’Algérie au Burkina-Faso. Pourtant, les supporters des Fennecs ne sont pas uniquement algérois. «J’ai été vacciné en me déplaçant à Alger, mais il faut en avoir le coeur net, je crains fort bien que je sois porteur de la malaria», s´inquiète un Oranais qui s’est déplacé à Ouagadougou dans le but de soutenir l’équipe nationale. Le virus est au rendez-vous au moindre virage, les blouses blanches, tout en étant inquietes inquiètent les citoyens faute de la disponibilité de tels vaccins dans les centres locaux de prévention sanitaire.