Stockage, protection et usage des données sur Internet : Une question de «souveraineté» nationale

Stockage, protection et usage des données sur Internet : Une question de «souveraineté» nationale

L’Algérie doit légiférer sur le stockage, la protection et l’usage des données sur Internet, car il y va de sa souveraineté nationale, a estimé hier à Alger Mohssen Toumi, partner au sein du cabinet Oliver Wyman, lors des matinales du Cercle d’action et de réflexion autour de l’entreprise (CARE).

Interrogé sur le stockage des données et leur protection, M. Toumi considère que cela relève de la « souveraineté » des Etats. Cette question se pose pour tous les pays. Dans les années 1990, Google, ensuite est venu Facebook, le pouvoir s’est démultiplié, en 2007, lorsqu’Apple a inventé les Smartphone avec son iphone imité par Samsung, ces entreprises ont commencé à toucher des milliards de dollars.

Le pouvoir est en train de sortir d’entre les mains de ces entreprises car les clients et les utilisateurs sont en train de développer leurs propres outils pour faire pression sur ces entreprises mêmes. « Sur les 7 milliards d’êtres humains, 4 milliards d’internautes connectés sont en train d’ouvrir une boîte de pandore, où chacun découvre des surprises plus ou moins plaisantes », a constaté M. Toumi. En fait, « les gouvernements découvrent les pouvoirs des GAFA (Google, Apple, Facebook et Amazon) et ces derniers découvrent ceux des utilisateurs qui, eux, découvrent les pouvoirs des entreprises qui disposent de leurs données », ajoute-t-il. C’est pourquoi, il faudra une réglementation sur les données. Le fait que ces données soient hébergées à l’étranger n’est pas normal car il s’agit d’une question de « souveraineté », souligne-t-il.

« La donnée est le nerf de la guerre et le pétrole de demain », insiste-t-il. Première des choses, il faudra regagner la souveraineté de nos données, recommande-t-il. La deuxième bataille est de créer nos propres services, nos propres GAFA.

La troisième des choses, considérer l’industrie digitale comme « stratégique au même titre que la Défense nationale ». L’Algérie doit se doter de son champion local dans ce domaine, a-t-il recommandé. Si par malheur, l’Algérie subit un embargo -notre réseau télécoms est construit par des Européens ou des Chinois- comment pourrait-on communiquer ? s’est interrogé l’expert en transformation digitale. Il faut dire que l’Algérie représente 0,3% du PIB (Produit intérieur brut) mondial, a-t-il déploré.

L’industrie télécoms pèse 2 000 milliards de dollars

L’industrie des télécoms mondiale pèse 2 trillions de dollars (2 000 milliards de dollars) en chiffres d’affaires (CA), a-t-il indiqué. Les entreprises télécoms investissent 400 milliards de dollars chaque année sur les réseaux, soit deux fois le PIB de l’Algérie quand il était au plus haut niveau, selon lui. A côté, 4 000 entreprises telles que Facebook et autres qui réalisent sur services digitaux quelque 300 à 400 milliards de dollars. En fait, une entreprise télécoms investie 350 milliards de dollars sur un réseau pour que les entreprises qui l’utilisent réalisent un CA annuel équivalent à peine au montant investi, a expliqué M. Toumi.

Ces CA sont valorisés à 800 milliards de dollars pour le cas d’Apple, cette semaine, a-t-il ajouté. Ceci pour démontrer « l’absurdité » de l’industrie télécoms, les entreprises de télécoms investissent beaucoup pour une rentabilité perçue par les entreprises utilisatrices de son réseau. L’autre élément est que « cette valorisation est détenue par une poignée de personnes basée aux Etats-Unis », a-t-il signalé. Pour revenir à l’Algérie, le Groupe public Algérie Télécoms est la pièce maîtresse de la transformation digitale en Algérie, s’est-il réjoui de dire.

Il suffit de la rendre «plus efficace » et non pas la restructurer, selon son avis. Ce Groupe public a les infrastructures et les moyens de se lancer dans ce projet. Il est le maillon fort de cette transformation digitale, considère-t-il. Aujourd’hui plus que jamais, les entreprises doivent définir leurs agendas digitaux dont 80% de leurs activités seront basées sur les services et les 20% restants en infrastructures. Il s’agit aussi de rémunérer les postes où la valeur ajoutée se crée et non selon la hiérarchie dans l’entreprise. Enfin, le gouvernement algérien devra s’inscrire dans l’évolution des industries qu’il voudra installer en Algérie avec une vision futuriste, dont l’industrie automobile qui est un sujet d’actualité, estime M. Toumi, pour opérer sa transformation digitale d’ici 2020, où la voiture autonome sera une réalité.