Statut des enseignants : le réveil des revendications

Statut des enseignants : le réveil des revendications

Le secteur des plus sensibles du pays qu’est l’éducation vit une éruption sans précédent suite au duel qu’il a amorcé avec la tutelle, une tutelle censée être protectrice des minimes droits de chaque enseignant.

L’enseignant est mal considéré en Algérie.

Le recours de cette grande masse de la société à la grève décrit distinctement ce ras-le-bol de tous ces éducateurs acculés par la privation et la pauvreté à dénoncer leur état de détresse vu l’indifférence criminelle de ces décideurs qui ne cessent de les ignorer en accaparant les richesses incommensurables du pays d’une façon tyrannique, laissant tout ce peuple subir les affres d’une misère. Face à la répression qui orne la scène nationale, ces enseignants veulent signifier à nos dirigeants plutôt à nos bourreaux que la couche intellectuelle a compris qu’il est temps d’agir pour redorer le blason tant terni de l’enseignant algérien. Les menaces provocatrices du ministre ainsi que la surdité des médias publics expliquent la légalité de la cause éducative que ces éducateurs défendent avec tant de détermination et d’opiniâtreté. Dénoncer, fait partie de ces actions victimes de la censure dans ce pays où l’accès à la citoyenneté reste une revendication des plus illusoires. Les graves dérives qu’a connues le système de par sa morbide gérance politique ont engendré une situation minée par l’entêtement des gouvernants qui continuent de sous-estimer toute une nation avec un certain complexe colonial. Les fondements précaires de notre liberté sont la conséquence manifeste d’une conception modelée par ceux qui veulent instaurer une monarchie qui répond aux normes pernicieuses de l’obscurantisme menaçant ainsi l’entité de ce peuple. Le sérieux malaise que traverse le monde de l’éducation de notre pays, est l’effet criant de la politique du régime en place qui a prémédité ce chaos dont notre progéniture est victime. L’appel des enseignants à la grève traduit clairement la lassitude de cette couche sociale considérée comme étant la lanterne de la nation dans les pays où l’instruction en est une préoccupation primordiale.

L’humiliation endurée par l’enseignant algérien depuis l’indépendance dépasse la lisière de la tolérance. Les idéologies néfastes, qui se sont succédé au préjudice de toute la société ont transmué l’instituteur en un être conditionné par le théories pavloviennes du pouvoir pour préserver une longue léthargie des doléances. La pauvreté qui émaille la famille algérienne en dépit de l’incommensurable richesse de ce pays, a suscité des interrogations au sein de la couche intellectuelle. Une prise de conscience a accompagné ce réveil des esprits pour réclamer le fondamental droit à la vie. Le facteur de l’ostracisme qui menace l’existence du travailleur algérien en général et l’enseignant en particulier, en sa qualité d’architecte spirituel de toutes les sociétés, a conduit cette grande masse du peuple à exprimer son refus de cautionner un régime plutôt une oligarchie qui s’enracine davantage au grand dam de ces centaines de mendiants de l’Algérie pétrolifère. Le phénomène de l’indifférence, hérité des temps du parti unique quant aux soucis du peuple, a amplifié le pessimisme des fonctionnaires. Les protestations quotidiennes, les émeutes nationales, les grèves permanentes sont, en somme, l’expression claire d’une nation mûre qui revendique une indépendance matérielle et professionnelle conjuguée avec une égalité sociale qui permet l’instauration d’une paix durable. Les récentes réformes de l’école, mises en œuvre sans l’aval de l’enseignant, signifient d’ailleurs cette absence de considération à l’endroit de nos éducateurs, cette forme de négligence montre sans ambages l’intention de nos planificateurs d’isoler cet élément essentiel dans cette capitale opération qui consiste à redorer le blason de l’école algérienne, la doter de valeurs universelles en éliminant la médiocrité.

L’omission préméditée de revoir la situation des enseignants lors de cette réforme, indique que ceux qui ont confisqué le pouvoir de décision ne se sont guère souciés de la situation dégradante des enseignants, rongés par le manque et la mendicité, le temps où ceux qui tiennent les rênes de l’Etat se pavanent dédaigneusement dans les luxueux bureaux des ministères avec des salaires qui ne reflètent point le travail qu’ils accomplissent. La rude tâche incombée aux instituteurs avec un horaire hebdomadaire atteignant les trente heures, révèle le paradoxe existant entre les différentes catégories des fonctionnaires du même secteur en matière de rémunérations. Ce qu’affrontent nos maîtres du primaire comme harassement dans les zones rurales mérite bien une sollicitude financière et morale exhaustive. La pointilleuse mission de l’instituteur reste méconnue de par l’incurie manifeste des décideurs qui feignent ignorer l’immense service que rend l’enseignant à toute l’humanité. Ne dit-on pas que l’enseignant est l’héritier du prophète ? Le cycle, primaire, considéré comme étant la première assise de l’enseignement à l’échelle mondiale, subit une forme de mépris soutenu par les circulaires arbitraires qui intiment aux enseignants l’ordre d’accepter honteusement la distinction administrative injuste qui expose la tâche accomplie par ces instituteurs à une indescriptible ingratitude de la part de la tutelle. Le rôle funeste de la politique éducative de notre pays qui tend à hébéter l’ensemble de la société, a été le détonateur de cette révolte, révolte de ceux qui veulent rétablir la justice sociale, revendiquer l’humanité des travailleurs et déchoir les bourreaux de la République. Ce mouvement de grève qui ne cesse de prendre de l’ampleur, nous renseigne sur le tempérament maffieux de nos gouvernants, devant cette problématique si inquiétante, des mesures de pourrissement émanant de la sphère dirigeante pour la seule fin de détourner toute la société en faveur d’un mandat présidentiel aux dépens de l’avenir de ces millions d’élèves. Les revendications des enseignants sont légitimes même si la tutelle simule une surdité dangereuse. Le fameux syndicat représentant, ce soi-disant défenseur des intérêts des salariés, à savoir l’UGTA, vendu selon les uns et manipulé selon les autres, s’avère complice dans ces manigances qui visent à discréditer les enseignants, intimider les grévistes en consommant le peu de crédibilité de l’Etat. Cette structure a longtemps appuyé la détérioration voulue des conditions matérielles des fonctionnaires. La démarche entreprise par ce corps des plus sensibles est motivée par la noble conviction d’exhiber aux décideurs, avec pédagogie, le raisonnement évident de leurs plaintes socioprofessionnelles. La minable prime accordée à l’enseignant atteste assurément de cette légèreté choquante vis-à-vis de cette brûlante question, le traitement réservé d’ailleurs à ce critique événement dénote que le ministère concerné s’ingénie à mettre au rebut des revendications aussi légales. Les menaces injustifiées du ministre à l’égard de ces maquisards de la cause éducative divulguent son obédience au clan de ceux qui dilapident, sans limites, les milliards du peuple pour assurer la pérennité de leur règne moyennant toute forme de machination en aboutissant à la faillite du pays. Le refus du pouvoir de reconnaître le statut de syndicat pour ces enseignants, qui est en somme un droit universel en défiant violemment les textes de la constitution, fait montre de leur disponibilité à éradiquer toutes sortes de contestation.

Le droit à l’agrément, en qualité de syndicat autonome, embarrasse éminemment les administrateurs plutôt les vampires des œuvres sociales liés par des relations de services partagés avec les dinosaures de la centrale ouvrière de l’UGTA. Ceux qui veulent enduire cette protestation en politique ne font qu’afficher leur diabolique projet de réduire le volume de cette récrimination en inculpant ces éducateurs, comme à l’accoutumée, d’être les serviteurs d’un clan ennemi de la nation, en déployant toutes les formules envisageables afin de maintenir leur pathologique doctrine. Le silence répréhensible du président, occupé par sa quête d’une troisième élection, et ses périples de plaisance, explique à la fois son impéritie dans la gérance de ce conflit et sa léthargie prouvée face aux dangers qu’à vécus le peuple. Les vrais coupables sont ceux qui instaurent une culture pareille à une neige qui fond dès que le soleil pointe. D’emblée, j’aimerais bien que les représentants du tout nouveau syndicat Unpef lisent cet écrit pour qu’ils sachent que leur négociation avec la tutelle à propos du statut particulier est infructueuse, tant que cette ségrégation remarquée dans la classification des enseignants en catégorie est criante, fondant ainsi une forme de mésestime à l’égard de ceux qui ont servi l’école de la République avec abnégation et dévouement.

Nous sommes dans un pays où toutes les contradictions se marient en pleine lumière du jour. Nous assistons quotidiennement à d’étranges phénomènes de gaucherie qui nous exhibent le degré de la cassure qui sépare le peuple de ses gouvernants plutôt de ses bourreaux. Le cumul de soucis qu’endure le citoyen algérien est le reflet de la politique entérinée par ceux qui ont soldé le patrimoine culturel du pays. La façon dont a été révisé notre statut me contraint à me révolter en qualité d’enseignant contre cette dangereuse ingratitude imposée, d’une part, par la cécité idéologique de ceux qui continuent de gérer ce secteur si sensible, et l’aval trop prompt de ceux qui ont troqué à la légère notre sort, voire notre gagne-pain contre une promotion dans les rangs hiérarchiques les plus élevés, d’autre part. En s’informant via la presse nationale de la nouvelle classification des enseignants, une forme d’étonnement m’a envahi, en sachant qu’un professeur certifié de l’école fondamentale est désormais classé iniquement à la catégorie 14. Ces novices licenciés, dont le niveau est notoirement orné de carence, voire de vacuité en matière de connaissances et une déficience en maîtrise de langues, notamment l’arabe et le français. Tout le monde sait que le séjour de ces soi-disant étudiants à l’université n’est que tourisme et égarement, pour se retrouver en fin de cycle en possession d’attestations de licence entachées d’illégalités et maculées d’illégitimité. Le prétexte du diplôme avancé par la tutelle pour hisser cette couche d’enseignants à la catégorie 14 tout en lésant parallèlement les autres enseignants dépourvus de certificats de bac et de titre de licence, est à mon sens une manière claire de susciter une forme de discrimination chez cette dense couche d’opprimés qui englobent les instituteurs qui ont dûment suivi des formations dans des instituts spécialisés dans la préparation exhaustive d’éducateurs. Ces établissements conçus pour le seul but de constituer des enseignants aptes à assumer une si grande mission qu’est celle d’éduquer et d’inculquer le savoir à nos enfants.

La préparation pédagogique est d’ailleurs l’axe primordial de cette structuration. Cette capitale formation n’est pas prise en compte lors des rencontres syndicats-ministère de l’Education, ni par cette tutelle qui feint de parfaire ce secteur avec de telles mesures tortueuses, ni par les négociateurs qui, par omission ou par nonchalance, n’ont tenté de soulever ce point si convaincant. Nous refusons d’être des victimes d’un système qui nous a longtemps asservis pour nous mettre au rebut, malgré des années de sacrifices au profit de ce pays. Nous réclamons notre droit à la promotion comme tous autres cadres. L’écart de catégorie imposé par la tutelle entre un PCEF et un instituteur formé dans des ITE doit être corrigé, voire amendé puisque le niveau intellectuel d’un instituteur est beaucoup plus sublime que celui d’un licencié, en mal d’acquis et de pédagogie. Les instigateurs d’une telle conspiration savent assurément que notre université n’a formé que des handicapés moraux, des êtres mis complaisamment dans des écoles pour faire pulluler la bêtise, stimuler l’abrutissement, leur manque en savoir-faire rejoint conjointement leur inertie intellectuelle. L’objectif de ce genre de procédure est durement délétère et qui consiste à dompter toute cette société car une bonne instruction dérange les régimes totalitaires. Les gérants de notre ministère doivent assimiler une leçon bien exclusive que les excellents résultats encaissés par l’école algérienne est l’œuvre grandiose d’instituteurs négligés par une politique d’indifférence qui a fait endosser la faillite des programmes aux seules personnes des enseignants, alors que ces derniers ne sont que des sujets conditionnés par les théories pavloviennes du régime en place. Le raisonnement dit que l’enseignant doit être promu et primé en fonction de son rendement, ce dont a besoin notre école est incontestablement la qualité studieuse. Que nos dirigeants revalorisent l’instituteur, ce détonateur du succès de l’école algérienne d’antan d’où ont émergé des Rachid Mimouni, des Tahar Djaout, et autres génies que notre pays a enfantés. Si les PCEF que j’ai ciblés dans cet écrit se sentent lésés par mon intervention, ils n’ont qu’à me répondre en étalant leurs arguments.

L’éducateur décide de renoncer au silence face à la légèreté criminelle des détenteurs du pouvoir, son statut de concepteur des esprits demeure non reconnu le temps où la bâtisse de la République, dangereusement atteinte, demeure l’objet d’un charlatanisme qui a ranimé les fossoyeurs de la maison Algérie par un certain langage jésuite qui cible et l’identité millénaire de ce peuple et sa teneur historique. La bêtise est l’apanage de nos décideurs, la cécité leur est toujours un dessein. La société civile et l’opinion publique sont sérieusement interpellées afin d’intervenir dans cette crise qui concerne l’avenir de nos générations car la tutelle refuse d’assimiler le message, pourtant clair, de ces demandeurs de dignité. La nécessité d’une diplomatie est plus urgente. C’est au pouvoir que revient la responsabilité de cette débâcle et l’engagement de cesser ses graves magouilles qui visent la stabilité du secteur, car en négligeant l’enseignant, c’est toute la nation qui est mise en cause. De la question kabyle au harcèlement non fondé des journalistes, l’équipe gouvernante, solidement soudée et massivement décidée, mène une guerre sans merci contre la légalité.

Chekri Rachid

Ecrivain-instituteur

Ecole nouvelle Sidi Ali – Akbou