Sponsoring de l’EN : touche pas à mon monopole !

Sponsoring de l’EN : touche pas à mon monopole !

La Fédération algérienne de football a vivement réagi à l’annonce de l’organisation du match EN-Real, en mai 2014, par Mobilis. Si l’irritation qui transparaît à travers la sémantique du communiqué de la fédération de football est à la mesure de l’enjeu, celui-ci doit être capital.

Car qu’a fait le patron de Mobilis, sinon de nous offrir un match entre le Real de Madrid et l’équipe nationale de football parce que le gouvernement n’a pas pu nous procurer la 3G ? Et ce n’est pas de sa faute si les Algériens, loin d’être “tous des mécaniciens”, sont tous des aficionados, partagés entre Barça et Real. Ici, au moins, on aura été capable de planification, avec une date, le 18 mai 2014, et un nom de stade, Tchaker, l’unique pelouse sur des centaines de kilomètres autour de la capitale qu’on pourrait présenter à un adversaire de taille internationale.

On comprend aisément que Raouraoua puisse s’offusquer du fait que Damma s’arroge la prérogative d’organiser une rencontre de l’équipe nationale sans en référer à la FAF. Et l’on préfère penser que le rôle de Mobilis devait se limiter à sponsoriser l’événement et qu’il revenait au staff technique et à la fédération de juger de sa faisabilité et de son opportunité. Mais pour qu’un responsable d’instance officielle juge ainsi “irresponsables” les propos d’un autre responsable d’établissement public, il faudrait plus de raison que la simple incursion de l’un dans le domaine de compétence de l’autre.

Il n’est pas nécessaire d’être grand clerc pour deviner que cette empoignade cache mal une nouvelle bataille entre opérateurs autour du contrôle de l’équipe nationale comme fonds promotionnels. En programmant une rencontre qu’il ne peut organiser, le président-directeur général de Mobilis a probablement voulu exprimer, de manière sibylline, son ambition, voire sa revendication, de voir le sponsoring de l’équipe nationale échoir à son entreprise. Et si le président de la Fédération algérienne de football a réagi de façon aussi exaspérée, c’est qu’il n’avait pas le sang-froid suffisant pour dissimuler sa détermination à empêcher toute remise en cause de la relation Nedjma-FAF.

Les défenseurs du monopole sur la promotion de l’équipe nationale sont nombreux. Nul doute que le statu quo arrange bien des “amis”.

Mais d’un autre côté, Mobilis ne manque pas d’arguments. D’une part, la “mobilité” du sponsoring de l’EN est parfaitement concevable puisqu’il a déjà été “transféré” de Djezzy à Nedjma. D’autre part, ici comme ailleurs, le droit de préemption joue pour l’État et les institutions publiques : on ne voit pas pourquoi l’État peut forcer l’acquisition d’un opérateur et se trouve incapable de lui retirer le parrainage d’une institution, l’équipe nationale, qui procure un avantage commercial sur une entreprise publique.

Quand Raouraoua défend l’EN d’être un “outil publicitaire”, il dit exactement le contraire de ce qu’il fait : vendre l’image de l’équipe nationale pour un usage promotionnel d’un produit industriel. Dans l’usage publicitaire de l’EN, il n’y a pas que l’équipe qui est commercialement instrumentalisée ; quand on examine les slogans et produits audiovisuels autour du onze national, on observe que c’est le nationalisme des consommateurs qui est convoqué à travers des procédés de confusion dans les messages.

Alors, outil pour outil, pourquoi pas au plus offrant ?

M. H.

musthammouche@yahoo.fr