Soutien au mouvement populaire : Magistrats et avocats remontent au front

Soutien au mouvement populaire : Magistrats et avocats remontent au front

Un vent de révolte semble à nouveau souffler dans les rangs des avocats et magistrats. Après un silence de quelques semaines, les robes noires de Tizi-Ouzou sortiront aujourd’hui réclamer le «droit d’être un pouvoir indépendant», une exigence également exprimée ce samedi par le SNM (Syndicat national des magistrats). Seront-ils suivis par leurs confrères d’Alger et des autres wilayas ?

Les nouveaux éléments qui se mettent en place depuis samedi dernier laissent, en tous les cas, supposer qu’un acte II de la protesta des avocats et magistrats est en phase de préparation. En témoignent deux communiqués publiés en l’espace de quelques jours par différents syndicats de ces corporations pour faire part des mêmes exigences. 

Tout a commencé, ce samedi 11 mai, par la publication d’un texte par le Syndicat national des magistrats, suivi, hier, par un autre communiqué émanant des magistrats de la Cour des comptes. Alors que rien ne laissait prévoir cette sortie publique, le SNM a jugé utile de rappeler «qu’on ne peut pas parler de justice indépendante et protégée avec les lois et les structures actuelles». 

Après une mise en garde contre toute tentative de porter atteinte aux juges par «des déclarations, des insinuations ou tout autre comportement», il fait savoir que ces derniers (les juges) «refusent qu’on traite avec eux comme un appareil qui n’entre en action que sur ordre ou sur convocation. Ils sont attachés à leur droit constitutionnel, qui est réclamé par le peuple, d’être un pouvoir indépendant qui assume ses missions conformément aux principes de légalité et d’équité, d’après une approche d’impartialité et dont le but est d’être juste». Le SNM ajoute : «La seule garantie et l’unique protection de la justice et des juges ne peuvent venir d’aucune partie en dehors de l’autorité judiciaire et on ne peut, en l’état actuel des choses, parler d’indépendance de la justice.»

Mise en garde contre les tentatives de manipulation de la justice à l’heure où le pays suit avec grande attention le déroulement des affaires liées à la lutte contre la corruption ? Une manière de signaler que celle-ci se refuse désormais d’être étiquetée ou considérée comme étant passée sous les ordres d’un pouvoir à un autre ? Ou qu’elle s’insurge contre des procédés dont l’opinion n’a pas eu connaissance ? Avant même d’en savoir plus, cette même opinion a eu droit, trois jours plus tard, à un second communiqué émanant cette fois des magistrats de la Cour des comptes qui réclament, eux, un changement à la tête d’une institution victime de «25 ans de gestion catastrophique». 

Dans le contexte actuel, la déclaration s’avère lourde de sens. Comme la première, celle du SNM dénote de l’existence d’un malaise réel. Prémices d’une nouvelle fronde ? Celle observée durant la seconde quinzaine du mois de mars dernier a fait date dans les pages d’histoire qui s’écrivent depuis le 22 février. 

Les images retransmettant le rassemblement des juges devant la cour d’Alger et prononçant leur soutien au hirak, la création du club des magistrats qui n’avait pu voir le jour sous l’ère de Bouteflika, le refus de ses membres de surveiller le scrutin du 4 juillet ont laissé souffler un réel vent d’espoir au sein d’une institution en quête d’indépendance. Un espoir conforté par une autre image incroyable, celle d’avocats brisant un cordon de sécurité dressé autour du Conseil constitutionnel.

A Tizi-Ouzou, l’Ordre des avocats a appelé à une marche aujourd’hui. Leur revendication demeure la même : arracher l’indépendance de la justice. L’action fera-t-elle boule de neige ?

A. C.