Fruit paradisiaque, symbole d’abondance et de fécondité, écorce aux vertus thérapeutiques, la grenade est entourée d’une forte symbolique.
La culture de ce fruit, plutôt répandue dans cette région, explique en partie l’enracinement des croyances populaires tissées à travers des siècles autour de la grenade, affirme le Dr Djallal Khechab chercheur en patrimoine populaire au centre universitaire de Souk Ahras.
Ainsi, le trousseau de la jeune mariée, au cas où ses noces coïncideraient avec la saison de maturation de ce fruit, doit contenir immanquablement une grenade, affirme cet universitaire pour qui cette croyance est née avant l’avènement de l’islam.
Une conviction populaire qui relie ce fruit au pouvoir de certaines divinités quant à la fécondité des femmes et à leur capacité à donner naissance à une progéniture abondante. Le lien entre grenade et abondance s’explique, selon ce chercheur, par le fait qu’un seul fruit contient une multitude de graines.
C’est cette même croyance qui fait que les semeurs, lors des labours, jettent des baies de grenade dans les sillons pour que les épis soient aussi pleins et aussi remplis que ce fruit. Une autre légende populaire, à la peau aussi dure que celle d’une grenade, veut que les enfants, lorsqu’ils dépouillent le fruit de son écorce, doivent faire attention à ne laisser aucune graine leur échapper, car il se pourrait qu’il s’agisse de celle qui «vient du paradis».
La grenade est aussi présente dans les traditions orales à Souk Ahras. Salah S., un septuagénaire natif du centre de l’antique Taghaste, cite un adage populaire : «Yajaâlak methl erromana men koul jiha melyana» (que Dieu te fasse à l’image d’une grenade, pleine de chaque côté). De plus, la médecine traditionnelle attribue à la peau dure, jaune ou rougeâtre des grenades, des effets thérapeutiques contre les diarrhées, les coliques et autres problèmes digestifs. De nombreuses familles de Souk Ahras, en effet, se gardent bien de jeter la peau du fruit que l’on s’évertue à sécher et à conserver dans un coin pour de tels usages médicinaux.
La valeur curative est aujourd’hui attestée par la médecine moderne. Le Dr Mohamed B, un médecin de la place, assure que la consommation de grenades diminue la tension artérielle et améliore l’écoulement du flot sanguin dans le cœur en prévenant l’oxydation et le vieillissement des vaisseaux. Certaines études, ajoute-t-il, ont même attribué aux grenades un effet ralentisseur de la progression de certains cancers.
Même la cosmétique ne «laisse pas le fruit du grenadier en reste». Son effet anti-âge est mis en avant, la grenade étant, paraît-il, efficace contre le vieillissement cutané. Il est également recommandé, dit-on, pour protéger la peau des rayons ultraviolets et pour donner de l’éclat aux cheveux. En cuisine, les grains de grenade sertissent le «mehawar», un mets sucré à base de couscous, de sucre et de beurre.
R. L. / APS