Soudani : «On était à 15 dans la chambre à jouer aux dominos jusqu’à 07h00, comme dans une équipe hammam»

Soudani : «On était à 15 dans la chambre à jouer aux dominos jusqu’à 07h00, comme dans une équipe hammam»
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A quel âge avez-vous jeûné la première fois ?

Je ne me rappelle pas de l’âge exact. Je pense que j’avais 9 ans.

On suppose que votre famille vous avait fait un festin…

Je ne vous le fait pas dire ! J’ai eu droit à un repas spécial, à des cadeaux et même à de l’argent. Tout était bon pour me motiver à jeûner.

LG Algérie

Avez-vous eu tellement faim un jour au point de manger dans la journée ?

Oui, une fois à l’occasion d’un déplacement à Oran. J’étais jeune et la chaleur était insupportable. J’étais mort de soif. Au retour au vestiaire, nous étions 6 ou 7 à avoir bu de l’eau. Nous serions morts sans ça !

Vous avez vécu la période des matches en Ramadhan programmés à 13h…

Effectivement. Je n’oublierai jamais un match joué le premier jour du Ramadhan 2007 face à l’AS Khroub, avec Rachid Belhout comme entraîneur. C’était à 13h et il faisait sans doute 50° ! Le match s’était terminé sur le score de 2-2 et nous étions au bord de l’asphyxie. Mais il y a une suite : une année plus tard, encore un match face à l’ASK, toujours à 13h en plein Ramadhan, mais cette fois-ci au Khroub. Cette fois-ci, c’était une chaleur de 60° ! Ironie de l’histoire : le match s’était terminé également sur le score de 2-2. J’ai connu cette période et ça a été très difficile. Franchement, il faudra arrêter avec ces matches à 13h.

Vous êtes-vous disputé un jour de Ramadhan à cause du jeûne ?

Sur le terrain, jamais, mais je m’étais bagarré grave une fois, alors que j’étais adolescent. C’était dans la rue et j’avoue que j’ai vraiment cogné sur le type (rires). Il a fallu que des gens s’interposent entre nous.

Donc, vous êtes plutôt nerveux ?

De nature, je suis très calme. Tant qu’on ne me cherche pas, je ne suis pas de ceux qui cherchent des problèmes. Mais quand je m’énerve, je ne me contrôle plus. Bref, un vrai Algérien (rires) !

Comment se passe pour vous le Ramadhan à Zagreb ?

Avant que mon épouse ne me rejoigne il y a quelques jours, c’était une torture ! Imaginez que je rompais le jeûne avec juste une banane ! Parfois, je changeais et prenais une pizza. Figurez-vous qu’à l’occasion d’un déplacement au Luxembourg, mon ami Rachouane s’était déplacé au stade en famille et m’avait ramené des dattes et du bourek. Après le match, j’ai rompu le jeûne avec un bourek, avant de prendre l’avion pour rentrer à Zagreb. A l’arrivée, le temps du s’hour était passé ! Donc, ni f’tour ni s’hour. J’ai fait le jeûne durant deux jours avec une pizza ! Le lendemain, imaginez avec quoi j’ai rompu le jeûne ? Encore une pizza (rires). Cela pour que les gens sachent que notre métier n’est pas facile. Certes, c’est bien payé, mais il y a beaucoup de sacrifices derrière.

Et vos prières, vous les accomplissez à la mosquée ?

Je ne suis allé qu’une seule fois à la mosquée de Zagreb. C’était pour accomplir la grande prière du vendredi. D’ailleurs, je ne pourrai pas le faire chaque semaine car il nous arrive de jouer vendredi.

Où priez-vous donc ?

A la maison ou bien dans le vestiaire du stade. Le magasinier m’a aménagé un coin propre où j’accomplis mes prières. Je dois le dire : au Dinamo Zagreb, tout le monde respecte mon jeûne et essaye de me faciliter la tâche.

Que vous manque-t-il le plus ?

Mes parents. Certes, mon épouse est à présent avec moi, mais mes parents me manquent, surtout durant le Ramadhan. Je peux me passer de tous les plats, sauf de mes parents. D’ailleurs, je leur parle 5 000 fois par jour !

Même vos soirées de dominos doivent vous manquer, non ?

Ah, c’est vrai ! Les interminables parties avec les amis du quartier me manquent.

Un projet de omra ?

Pas encore, mais il y a un projet pour envoyer mes parents accomplir le hadj, inch’Allah.

Et celles avec vos coéquipiers ?

Avec l’ASO Chlef, j’avais passé un stage mémorable au Maroc en 2010. C’était avec la grande équipe, celle qui allait remporter le championnat. Celui qui nous voyait aurait dit : «Ce n’est pas une équipe, c’est un hammam !» (rires). Vous savez, nous nous couchions à 07h00 ! Durant toute la nuit, ce n’était que des parties de dominos dans la chambre de Messaoud. Nous étions à 15 dans la chambre à nous relayer dans d’interminables parties ! Les perdants devaient payer un délicieux l’ben et du jus succulent que nous avons découvert à Casablanca?

Meziane Ighil vous laissait faire ?

Il n’était pas encore arrivé au Maroc pour un problème de passeport. Il y avait avec nous l’adjoint, Benchouia. Il frappait à notre porte pour nous supplier d’aller nous coucher, mais nous restions éveillés. Durant les entraînement, nous travaillons sérieusement, mais une fois dans nos chambres, nous faisons ce qui nous plaisait. C’est le meilleur stage que j’ai passé dans ma vie !

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Son menu de rêve pour le ramadhan

«Il faut que je commence le f’tour par une h’rira légère avec de la viande, beaucoup de viande. J’enchaîne ensuite avec du bourek au fromage. Je peux en avaler 7 sans aucun problème ! Ensuite, il me faut un m’touem accompagné de frites. Si je le pouvais, je prendrais même des m’hadjeb avec. Peut-être que c’est la faim qui me fait dire ça, mais j’adore ! Comme boisson, je bois de l’eau, mais si je vois du Hamoud-Boualem, j’oublie l’eau et je plonge dessus ! Surtout s’il s’agit de la blanche ou de la rouge. Comme dessert, j’aime autant le qalb ellouz que la zlabia que je déguste avec du thé car je ne suis pas très café.»