Une bande de jeunes, joyeux lurons, amoureux des planches ont associé leurs géniales idées pour nous concocter une revue petit format d’une série de dix courts feuilletant de bandes dessinées éditées par un collectif algérien d’artistes tous férus du 9e art réalisant ainsi leur rêve de publier des dessins inédits sur des thématiques toutes aussi différentes les unes que les autres avec un brin d’ingéniosité dans le trait et quelques inspirations propres à leur monde juvénile et qui donne surtout une certaine perception de leur environnement urbain, leur mal-vie, leur imaginaire qui déborde de créativité et leur idéal de justice.
Ce numéro fraîchement sorti des impressions Kaza- éditions inaugurera à coup sûr, nous l’espérons, un travail artistique assidu qui sera soumis à l’appréciation de tous, particulièrement les spécialistes et autres amateurs de cet art complet qui, décidément, fait beaucoup d’émules depuis quelques années au point où un festival vient chaque année couronner et récompenser les efforts de quelques talents qui commencent parallèlement à leurs aînés à apparaitre sur les étals de nos librairies. Nous avons parcouru les pages de « Rais » dans une séquence qui a remporté le premier prix national au FIBDA 2010 avec les dessins de Chahine Ladjouze et un story-board de Selim qui nous relate l’histoire de ce héros en prise avec une araignée géante. « I’m human » du bédéiste Amir Cheriti nous entraîne dans le monde d’un jeune qui porte le masque d’un loup pour effrayer ses collègues et qui arrivé dans le Sahara est soudainement terrassé par un monstre qui l’engloutit. Toujours dans le même ordre d’idées, mais dans un style différent les planches de Selim qui portent le titre de « Bipolaire » nous emmènent dans l’univers fait d’intériorité d’un homme qu’on accuse d’un crime commis par un psychopathe qui lui ressemble étrangement. Plus ancré dans le contexte de la ville d’Alger avec ses monuments et ses vues panoramiques sur le centre, on découvre « The hidden worlds » de Islam Berbiche qui nous fait voyager la nuit dans les faubourgs d’Alger pour suivre une course-poursuite sur des motos conduites à toute vitesse par de jeunes adolescents. « Un clown dans la ville », écrite sur un scénario de Amir Cheriti et les dessins de Baiche Halim, est une histoire amusante qui donne matière à réfléchir dans la mesure où le lecteur suit les pérégrinations, dans une ville grouillante de monde, d’un clown solitaire qui en a franchement marre d’entendre le brouhaha des passants au point de se retrouver par-delà le bruit projeté au-dessus de la planète et le cosmos et de crier d’une vois assourdissante qu’il réclame le silence et la solitude. Toujours dans la thématique du double « Le froid du désert » de Elhadi on retrouve un héros confronté dans le désert à un personnage qui n’est autre que lui-même et il se trouve que c’est un maudit cauchemar qu’il fait chaque jour. On est carrément dans une thématique qui traite de problèmes que rencontrent les jeunes bédéistes avec les éditeurs ainsi que le manque d’inspiration auquel ils sont confrontés quotidiennement, cette planche s’intitule tout simplement « Sid », elle est réalisée par Sid-Ali Oudjiane dans une séquence complète.
Cette bande dessinée au titre attractif et résolument artistique mérite bien une sérieuse lecture et un petit encouragement pour la découverte des auteurs rassemblés dans ce livret où les gags, les séries et les histoires complètes réalisées avec un style qui diffère d’un sujet à l’autre et suivant chaque touche qu’a voulue imprimer l’artiste et qui se laissent aisément savourer tout au long de ces 46 pages.
Lynda Graba