Coup de théâtre dans le dossier de la centrale électrique de Djelfa. Alors qu’un accord à l’amiable avait été conclu au printemps dernier entre Sonelgaz et son ex-partenaire espagnol Duro Felguera, la compagnie publique algérienne a finalement décidé d’exécuter des garanties bancaires d’un montant de 54,8 millions d’euros.
Une décision jugée « inattendue » par la partie espagnole, mais qui s’inscrit, selon plusieurs observateurs, dans une logique de protection des intérêts nationaux autour d’un projet stratégique pour le pays.
Sonelgaz – Duro Felguera : un projet de centrale au cœur des tensions depuis plus d’une décennie
Le différend entre Sonelgaz et Duro Felguera trouve ses racines dans un contrat signé en février 2014. Ce dernier prévoyait la conception et la construction d’une centrale à cycle combiné d’une puissance de 1 200 MW à Djelfa, pour un montant estimé à 544 millions d’euros.
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Le chantier, censé être achevé en quarante mois, a rapidement accumulé les retards. En juin 2024, Duro Felguera suspend ses travaux, évoquant des « causes non imputables à l’entreprise » et des « changements majeurs dans les conditions contractuelles ».
Face à cette impasse, Sonelgaz Production d’Électricité (SPE) engage une procédure d’arbitrage international et réclame 413 millions d’euros de compensation pour le non-achèvement du projet.
Le dossier semblait clos après l’accord à l’amiable et le transfert du projet à une entreprise chinoise !
Après plusieurs mois de discussions, les deux parties ont signé en avril 2025 un protocole d’accord censé tourner la page du contentieux. Duro Felguera devait transférer le contrat à un consortium chinois mené par China Power Engineering & Consulting Group International Engineering, tandis que les litiges en cours devaient être clos.
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Mais ce climat d’apaisement n’aura pas duré. Selon les médias espagnols, le 5 novembre 2025, Duro Felguera annonçait dans un communiqué adressé à la Commission nationale du marché des valeurs (CNMV) que Sonelgaz Production d’Électricité avait procédé à l’exécution des garanties bancaires pour un total de 54,8 millions d’euros.
Selon l’entreprise espagnole, cette mesure est intervenue « de manière inattendue ». Alors que des discussions sur l’application de l’accord étaient toujours en cours. Elle précise néanmoins que ces montants avaient déjà été provisionnés et n’affecteront pas sa restructuration judiciaire en Espagne.
Une mesure défensive de la part de Sonelgaz
Si la société algérienne n’a pas encore communiqué officiellement, les médias espagnols avancent que l’opération ne vise pas à récupérer des fonds, mais à activer un mécanisme prévu en cas de manquement contractuel. Cette action serait donc une façon, pour Sonelgaz, de protéger ses intérêts dans un projet essentiel pour la sécurité énergétique nationale.
En déclenchant l’exécution de ces garanties, la compagnie publique envoie aussi un signal fort à ses partenaires internationaux. Les engagements contractuels doivent être respectés, même lorsqu’un règlement à l’amiable semble possible.
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Par ailleurs, pour Duro Felguera, cette nouvelle déconvenue intervient dans un contexte déjà fragile. L’entreprise, en pleine restructuration financière, tente de regagner la confiance des marchés après plusieurs années de difficultés.
Ce revers algérien, bien que prévu comptablement, risque de peser sur son image à l’international et de compliquer ses relations futures avec les partenaires étrangers.
