Annoncée en grande pompe par les pouvoirs publics, la nouvelle de l’arrivée sur nos marchés de la viande bovine indienne a été relayée pendant des semaines par la presse… pour que le citoyen s’en trouve privé en fin de compte !
«Le citoyen rejette cette viande et je peux vous dire que c’est la première et la dernière fois que je l’achète.» C’est en ces termes que Walid, marchand de viande congelée à Kouba, a répondu à notre question relative à la commercialisation de ce produit qui nous vient de si loin. «J’ai été obligé d’enlever les tickets collés sur les sachets de viande pour pouvoir écouler le lot que j’ai acheté.
Les clients la trouvent infecte. En plus de sa mauvaise qualité, elle est cédée au même prix que la viande algérienne», ajoute-t-il.
S’agissant des prix de cette viande, chacun les pratique à sa convenance, alors que les autorités ont fixé un seuil à ne pas dépasser, soit 400 à 450 DA le kilo. Mourad, un autre marchand de produits carnés congelés, vend le kilo de filet indien à 750 DA. Les morceaux destinés à la chorba, contrairement aux déclarations et assurances des importateurs, sont écoulés à 600 DA et non à 400 DA comme prévu.
A cette question, Abderrahmane, grossiste, nous explique : «Il n’a jamais été question de vendre cette viande au consommateur à 400 DA.
Moi, en tant que grossiste, je l’achète presque à 400 DA. Le prix de revient de cette viande est cher, les Indiens ne nous ont pas fait cadeau». Sur la qualité, le goût et la cuisson de cette viande, Khalti Fatima, rencontrée au marché de Kouba, nous répond avec franchise :
«Jamais je ne cuisinerai une telle viande. Mon fils qui est marchand de légumes nous a ramené une livre le deuxième jour du Ramadhan et sa femme l’a préparée en brik. Je vous assure que nous avons tout jeté ; elle pue plus que la viande de bouc. Vous savez, la meilleure viande reste la nôtre», explique la vieille dame.
De la viande au goût de la Samba
Moins connue que sa rivale indienne, la viande brésilienne est mieux appréciée, et très prisée par les restaurants et les brasseries. «Elle a le goût de la Samba», ironise Hocine. Le client algérien qui découvre encore cette viande qui a traversé le pacifique ne semble pas être convaincu.
«Si je suis dans l’obligation d’acheter de la viande congelée, je préfère encore l’européenne, au moins ceux-là ne badinent pas avec les normes et l’hygiène», nous dit Hassane.
Et d’ajouter : «Nous sommes devenus un peuple de cobayes, bientôt ils vont nous ramener de la zalabia chinoise ou encore du kalbellouz australien. Me concernant, je n’achète ni l’indienne ni la brésilienne, moi je préfère la viande kabyle ou celle de Bougtob.»
Le prix de la viande brésilienne n’est, quant à lui, pas très loin de sa rivale indienne. Le kilo est cédé entre 650 et 700 DA, ce qui explique d’ailleurs le fait que le client algérien boude toutes ces viandes importées de «n’importe où» et à des prix hors de sa portée.
Mais comme il a été si bien dit par Abderrahmane le grossiste : «Il n’y a que les importateurs qui ont rempli leurs poches, sinon le consommateur restera toujours à sa faim.»
Elias Melbouci