C’est à se demander si le leader du MSP n’a pas quitté à contrecoeur, contraint et forcé, l’équipe gouvernementale dont son seul nom manquait à l’appel suite à la reconduction de Ahmed Ouyahia à la tête de l’Exécutif par le président de la République, qui venait d’être porté pour la troisième fois consécutive à la magistrature suprême au mois d’avril 2009.
«Je ne fuirai pas mes responsabilités ainsi que le devoir national. Je dirai oui si le Président Bouteflika me le demande», a déclaré, le 27 juillet Bouguerra Soltani lors de l’université d’été des jeunes militants de son parti qui s’est tenue au centre de formation professionnelle de Birkhadem.
Est-ce là un simple souhait du président du Mouvement de la société pour la paix qui se dit prêt à répondre positivement à son éventuel rappel au sein de l’exécutif par le chef de l’Etat ou un indicateur crédible d’un tout prochain remaniement de l’actuelle composante du gouvernement que les observateurs les plus avertis de la scène politique nationale qualifient d’incontournable ?
En tous les cas, c’est ce que l’on peut lire entre les lignes du communiqué de la Présidence de la République qui a suivi l’annonce de la composante de l’Exécutif et surtout justifié le maintien de la totalité des ministres au sein du gouvernement de Ahmed Ouyahia.
«Compte tenu du calendrier international ainsi que des exigences internes, le chef de l’Etat a décidé de reconduire le gouvernement dans sa composition actuelle, à l’exception de M.Bouguerra Soltani qui quitte le gouvernement à sa demande», ont indiqué les services chargés de la communication du Palais d’El Mouradia.
Le leader islamiste a certes quitté le gouvernement à sa demande mais très certainement à contrecoeur puisque, comme tout le monde ne peut l’ignorer, Soltani a subi des pressions terribles de la part de nombreux cadres de son parti qui l’ont pratiquement sommé de choisir entre la direction du parti et ses activités de ministre sans portefeuille.
La crise couvait déjà bien avant le quatrième congrès du MSP tenu à la fin du mois d’avril 2008, soit pratiquement une année avant le déroulement de l’élection présidentielle.
La fracture a cependant bien eu lieu avec cette guerre de leadership qui, non seulement a fini par avoir lieu mais a surtout fait rage entre Bouguerra Soltani et son principal opposant Abdelmadjid Menasra, ancien ministre de l’Industrie et de la Restructuration sous le gouvernement Benflis.
«Le problème n’est rien d’autre qu’une guerre de leadership et ceux qui se réclament de Mahfoud Nahnah, trahissent son héritage en créant une structure dont on ne sait s’il est un parti politique ou une entité destinée à la prédication», avait indiqué Noureddine Aït Messaoudène, conseiller en communication du président du MSP.
Les événements qui ont suivi se sont avérés beaucoup plus graves qu’un simple affrontement à la loyale pour la prise de contrôle des rênes du parti.
Le numéro deux du MSP claque la porte et ambitionne de créer sa propre formation politique «Le Mouvement de la prédication et du changement».
Menasra veut donner un grand coup de barre à 180 degrés à une mouvance islamiste qui a subi revers sur revers lors des derniers rendez-vous électoraux.
Il rêve justement de grandes conquêtes électorales tout en ayant pour but de surclasser son frère ennemi.
Selon certaines informations communiquées par les dissidents eux-mêmes, pas moins de 28 députés auraient quitté les rangs du parti pour former leur propre groupe parlementaire.
«Nous lui avons fait savoir tout le mécontentement des cadres militants quant à sa politique d’exclusion. Mais voilà qu’il nous tourne le dos tout en nous faisant savoir que celui qui n’est pas satisfait n’a qu’à partir. Nous avons ainsi décidé de démissionner et de créer notre propre groupe», a expliqué Abdelaziz Mansour, élu de Boumerdès.
Une situation qui semble convenir parfaitement à Bouguerra Soltani. Stratégie ou pas, il a réussi à faire place nette.
Ses opposants ne sont plus là. Apparemment, qu’il soit et au gouvernement et à la tête de son parti ne posera dorénavant pas de problème.
A deux conditions cependant: qu’il y ait un remaniement et que Abdelaziz Bouteflika fasse appel à lui.