Situation financière de l’algerie : Qui dit vrai, qui dit faux ?

Situation financière de l’algerie : Qui dit vrai, qui dit faux ?

En septembre dernier, soit à la même période, le Premier ministre a soutenu devant les députés de l’APN que la situation est extrêmement tendue au plan budgétaire.

Une multitude de chiffres ont été livrés, dimanche dernier par le ministère des Finances. Ils renseignent sur l’évolution de l’épargne logée au Fonds de régulation des recettes (FRR). Ainsi, le Fonds n’aura pas été complètement épuisé. Et, le gouvernement s’en est servi sur les 9 premiers mois de 2017 pour résorber une partie du déficit budgétaire. En proportion,  le FRR a couvert 83% du déficit du Trésor sur les 9 premiers mois de 2017, estimé à près de 946,2 milliards de dinars. Les prélèvements à partir du FRR ont atteint 784,46 milliards de dinars entre janvier et fin septembre 2017, alors que 206,6 milliards de dinars de déficit ont été couverts par des “financements non bancaires”. Les chiffres du département des Finances, s’imbriquant les uns dans les autres, traduisent en fait un appel d’air favorable pour l’Exécutif. Mais, ils contredisent, dans une certaine mesure, les indications fournies par le cabinet Ouyahia.

En effet, le Premier ministre, Ahmed Ouyhia, avait, expliqué lors de la présentation, en septembre 2017, de son plan d’action devant le Parlement que  la situation des finances publiques est “préoccupante”. Et de détailler que le recul de la fiscalité pétrolière a généré des “déficits budgétaires répétés, entraînant la consommation de la totalité de l’épargne du Trésor qui était logée au Fonds de régulation des recettes épuisé en février 2017”. Il est également souligné dans ce document que le Trésor a eu également recours à d’autres ressources complémentaires ces deux dernières années : un emprunt national, des versements exceptionnels de dividendes par la Banque d’Algérie, et un emprunt extérieur auprès de la Banque africaine de développement, pour l’équivalent d’une centaine de milliards de dinars. Il y est ajouté que la situation demeure  “extrêmement tendue au niveau du budget de l’État : dans la situation actuelle, l’année 2017 sera clôturée avec des difficultés réelles, alors que l’année 2018 s’annonce plus complexe encore”. Dans le pan d’action sus-évoqué, il est aussi souligné que le déficit budgétaire “évalué à près de 11 milliards de dollars ne peut plus être pris en charge par le Fond de régulation des recettes”. La situation dépeinte ainsi par le Premier ministre représente-t-elle la réalité  dans laquelle se trouve le pays ? N’est-il pas exagéré d’affirmer que la situation est “si dramatique” ? Une hypothèse à formuler cependant : le pays a-t-il réussi à reconstituer de l’épargne dans le Fonds de régulation, après la reprise des cours du pétrole sur les 9 derniers mois ? Aux dires de beaucoup, l’hypothèse est peu réaliste, les prix de l’or noir, rapportés au prix référentiel de baril de pétrole à 50 dollars sur la base duquel a été élaborée la loi de finances (LF) pour 2017, n’ayant augmenté que légèrement. Entre janvier et novembre 2017, le prix moyen du baril de pétrole a atteint 52,71 dollars. Entre janvier et fin septembre 2017, les recettes fiscales pétrolières  recouvrées ont augmenté à 1 579,64 milliards de dinars. La LF  2017 a tablé sur une fiscalité pétrolière de 2 200 milliards de dinars sur toute l’année en cours. Ainsi, le taux de réalisation jusqu’à fin août a été de 71,8%. Quant aux ressources ordinaires, elles se sont chiffrées à 3 159,98 milliards de dinars jusqu’à fin septembre 2017. Les ressources ordinaires effectivement enregistrées sont composées de recettes fiscales ordinaires de 1 979 milliards de dinars sur les 9 premiers mois 2017, de recettes ordinaires de 183,39 milliards de dinars, de recettes d’ordres, dons et legs de 29 millions de dinars et de recettes exceptionnelles de 997,47 milliards de dinars. Ainsi, les recettes budgétaires globales (fiscalité pétrolière et ressources ordinaires) effectivement réalisées ont atteint 4 739,62 milliards de dinars entre janvier et fin septembre 2017. Dossier à suivre car la réponse sera apportée sans doute au courant de l’année 2018. On saura alors si le gouvernement dit la vérité ou non à la population sur la situation financière du pays.

Youcef Salami