Situation en Libye,La révolte, entre combats et cafouillages

Situation en Libye,La révolte, entre combats et cafouillages

Hier, le président du Conseil libyen de transition, Moustapha Abdel Jalil a fermement démenti les rumeurs sur l’implication de l’Algérie dans le transport de mercenaires en direction de la Libye.

A ce sujet, il dira que «le Conseil n’a publié aucun communiqué officiel impliquant l’Algérie dans le transport de mercenaires vers la Libye». Ajoutant que «nous sommes totalement persuadés que l’Algérie est un pays important» et que «l’Algérie ne peut guère être impliquée dans cette affaire».

Par ailleurs, il précisera que «le nombre des mercenaires africains, qui affluent toujours vers la Libye, a dépassé les 5 000». Aussi, il lancera un appel urgent à la communauté internationale «pour imposer un embargo aérien sur la Libye et barrer le passage à ces mercenaires en provenance du Ghana, du Kenya et d’autres pays».

L’Algérie, pour sa part, par le biais de son ministre des Affaires étrangères avait «catégoriquement» démenti ces rumeurs, soutenant que «ces allégations insidieuses vont à l’encontre de la position doctrinale de l’Algérie qui récuse l’ingérence dans les affaires intérieures des Etats».

Au 20e jour de la révolte libyenne contre Kaddafi et son régime, les pro-Kaddafi mènent des bombardements et d’intenses combats terrestres contre plusieurs villes contrôlées par l’opposition. Les rebelles, qui veulent marcher sur Tripoli, perdent du terrain à l’est et ont dû refluer de Ben Jawad.

Tripoli dit repren-dre le contrôle dans plusieurs villes

Des tirs nourris ont été entendus durant les premières heures d’hier sur la place Verte de Tripoli, toujours sous l’emprise du colonel. L’opposition libyenne se trouvant dans l’est du pays, quant à elle, subit des contre-offensives de troupes pro-Kaddafi dans la ville de Zawiyah. Pourtant les opposants ont poursuivi leur progression vers l’ouest, tout en s’organisant sur le plan politique en se déclarant seuls représentants du pays.

A la mi-journée, les pro-Kaddafi ont mené une offensive à l’arme lourde à Misrata, à 150 km à l’est de Tripoli, une ville que le gouvernement libyen disait dans la matinée avoir pris et que les rebelles ont démenti. D’ailleurs, ce n’est pas le seul démenti que l’opposition aura fait durant la journée d’hier puisqu’un autre aura suivi l’affirmation du régime libyen de la reprise de contrôle de plusieurs villes aux mains des insurgés dont Ras Lanouf.

Scènes de joie sur la place Verte

En effet, dès l’aube, des tirs intenses ont retenti à Tripoli, des automobilistes actionnaient leurs avertisseurs partout dans la ville et des habitants ont accroché des drapeaux libyens aux rebords de leurs fenêtres pour célébrer, selon les autorités, la reprise par le régime de villes qui étaient entre les mains des insurgés. C’est en tout cas ce qui a été annoncé à la télévision libyenne qui annonçait que des troupes fidèles à Mouammar Kaddafi se dirigeaient vers Benghazi, bastion de l’insurrection contre son régime.

Certaines agences de presse étrangères rapportent que «Il y a des femmes, des enfants, il y a même des enfants de 6 ou 7 ans qui tiennent de vrais pistolets. De l’eau, des biscuits et des portraits de Kaddafi sont distribués». A l’est de la Libye, la ville de Ras Lanouf, région pétrolière stratégique, a été la cible d’un nouveau raid aérien des forces armées loyales au régime de Kaddafi laissant pour compte

14 blessés.

L’opposition avance, le régime résiste

Les rebelles au régime de Kaddafi ont déclaré, en début de matinée, qu’ils poursuivent leur progression vers l’ouest de la Libye et qu’ils contrôlent désormais, et ce, depuis samedi, la ville de Nofilia se trouvant à l’ouest de Ben Jawad. Quelques heures plus tard, des avions de guerre libyens ont bombardé une colonne rebelle qui progressait le long de la côte méditerranéenne vers Syrte, ville natale et bastion de Kaddafi. Après des combats, les insurgés ont annoncé s’être retirés de Ben Jawad, à une centaine de kilomètres à l’est de Syrte, où au moins 15 personnes ont été blessées.

Dans cette atmosphère de guerre civile, les révolutionnaires libyens, a rapporté le site quatari Aljazeerah.net, ont détruit deux hélicoptères des forces armées loyales de Kaddafi, l’un survolant le ciel de Ras Lanouf et l’autre la ville de Ben Djawed. Le site quatari rapporte également que les insurgés ont fait prisonniers des soldats britanniques en début d’après- midi. A ce propos, la Grande- Bretagne a dépêché une équipe diplomatique à Benghazi pour s’enquérir de la situation de ses huit soldats détenus. En outre, en fin d’après-midi, des informations ont circulé rapportées par le site d’Aljazeerah.net, concernant le pilonnage de la ville de zawiyah par des avions bombardiers. Par ailleurs, il est à noter que le consul général libyen en poste au Mali qui annonçait hier sa démission a nié le recours à la mobilisation de mercenaires touaregs au profit de Kaddafi. Pour rappel, la Libye est le théâtre, depuis la mi-février, de violences meurtrières au lendemain des dispersions de la révolte populaire réclamant la chute du régime de Kaddafi au pouvoir depuis près de 42 ans. Et depuis, plus de 191 000 personnes ont fui à ce jour les violences et environ 10 000 personnes déplacées se dirigent vers la frontière égyptienne, selon l’ONU.

Kaddafi favorable à une commission d’enquête

Dans une interview publiée hier par l’hebdomadaire français, «Le Journal du Dimanche», Kaddafi a déclaré être favorable à l’envoi d’une commission d’enquête «des Nations unies ou de l’Union africaine» pour évaluer sur place la situation dans son pays. En outre, le dirigeant libyen, rapporte le JDD, souhaiterait que ce soit la France qui

«coordonne et dirige la commission d’enquête». Suggérant à ce propos «que la France en prenne vite la tête, qu’elle bloque la résolution de l’ONU au Conseil de sécurité, et qu’elle fasse arrêter les interventions étrangères dans la région de Benghazi», peut-on lire sur le JDD. De plus, le dirigeant libyen avertit l’Occident quant à la présence «des milliers d’immigrés et l’installation de Ben Laden aux portes de l’Europe» si la contestation se poursuit.

L’UE envoie une mission à Tripoli

L’Union européenne a envoyé une équipe à Tripoli pour évaluer sur place les besoins humanitaires. C’est ce qu’a annoncé hier la chef de la diplomatie européenne, Catherine Ashton. L’équipe, dirigée par l’Italien Agostino Miozzo, un haut-fonctionnaire du service diplomatique de l’UE chargé de coordonner la réponse aux situations de crise, a pour but de recueillir des «informations de première main», a dit Mme Ashton dans un communiqué.

Paris soutient le Conseil national libyen et dénonce «la folie de Kaddafi»

Le ministre français des Affaires étrangères, Alain Juppé, qui s’exprimait devant la communauté française d’Egypte, a affirmé hier au Caire que l’Europe et la France ne pouvaient «tolérer la folie criminelle» du régime du colonel Mouammar Kaddafi face à l’insurrection libyenne. Et de souligner qu’il évoquerait ce dossier aujourd’hui (hier) avec le chef de la Ligue arabe Amr Moussa, dont l’institution siège au Caire.

En outre, le diplomate fera part du «salut» de la France pour «la création du Conseil national libyen», instance dirigeante de l’insurrection contre le colonel Kaddafi, «et apporte son soutien aux principes qui l’animent et aux objectifs qu’il s’assigne».

Berlin demande des sanctions

Le ministre allemand des Affaires étrangères, Guido Westerwelle, a réclamé de nouvelles sanctions contre le régime libyen et une nouvelle réunion du Conseil de sécurité de l’ONU, dans un entretien au journal dominical «Welt am Sonntag».

«Ce qui se passe en Libye m’inquiète profondément (…) Des sanctions ciblées contre ceux qui sont responsables de crimes contre le peuple libyen sont nécessaires», a-t-il dit.

Par Lynda N. Bourebrab