Les Ghardaouis ne décolèrent pas
Plus d’une quarantaine d’écoles privées fréquentées exclusivement par les enfants issus de la communauté mozabite n’ont reçu aucun écolier.
Les Mozabites de Ghardaïa ne décolèrent pas. Depuis dimanche dernier, les commerçants ont baissé rideau en même temps que les enfants mozabites ont retiré leurs blouses pour ne pas rejoindre les bancs des écoles. Ghardaïa donne l’image d’une ville déserte au milieu du désert.
Aucun commerce mozabite n’est ouvert et aucune des écoles privées ou publiques n’a reçu un enfant de cette communauté. Les Mozabites ont exprimé leur refus de la médiation et par conséquent, une grève générale a paralysé depuis dimanche dernier la vallée. Unanimes, les Mozabites ont répondu au mot d’ordre de grève générale ouverte lancé par leur communauté. «Cette grève générale est la seule façon par laquelle nous voulons exprimer notre opposition à cette sortie de crise négociée puis proposée à notre encontre», lâche un membre de l’Union générale des commerçants. Rien que dans la ville de Ghardaïa, plus d’une quarantaine d’écoles privées fréquentées exclusivement par les enfants issus de la communauté mozabite n’ont reçu aucun écolier. Pour le reste et concernant les écoles publiques, juste les enfants issus de la communauté malékite qui ont rejoint les classes.
Une chose est sûre, la ville de Ghardaïa bascule dans une crise qui ne dit pas son nom. Le malaise est perceptible chez les citoyens des deux communautés et la crainte que cette crise ne perdure s’accentue. «On ne sait pas combien de temps cette grève va durer», s’inquiète-t-on à Ghardaïa. Si on ajoute le climat de terreur qui y règne, les populations sont alors dans le flou total. Pour les membres du Conseil national autonome des professeurs de l’enseignement secondaire et technique (Cnapest), cette grève du cartable a touché 18 établissements entre primaires, CEM et lycées au centre-ville de Ghardaïa. Dans toute la ville, la sécurité est nettement renforcée depuis hier. Toute la ville est sous haute surveillance. Policiers, agents anti-émeute, gendarmes… aucun coin n’est laissé sans surveillance. Actuellement, c’est le branle-bas de combat pour que la situation revienne à la normale. Il y a la création au niveau des communes dotées d’un conseil de sages, d’un «espace d’arbitrage et de conciliation» sur la base de la «coexistence harmonieuse et pacifique» ancestrale qui prévalait dans cette wilaya. Jeudi dernier, le Premier ministre a reçu à Alger une délégation de citoyens représentant les communautés ibadite et malékite de Ghardaïa afin de mettre fin aux tensions qu’a connues cette wilaya ces dernières semaines. A l’issue de cette rencontre, plusieurs décisions ont été prises afin de permettre le retour à la normale à Ghardaïa, notamment la création au niveau des communes touchées d’un conseil de sages, un «espace d’arbitrage et de conciliation» sur la base de la «coexistence harmonieuse et pacifique» ancestrale qui prévalait dans cette wilaya.
Cependant, ces décisions n’ont pas fait l’unanimité au sein de la communauté mozabite. Pour autant, les initiatives pour le règlement de cette crise ne se sont pas arrêtées. Avant-hier, Le Haut conseil islamique (HCI) a décidé d’envoyer une délégation composée de certains de ses membres à la wilaya de Ghardaïa en vue de «réconcilier les différentes parties et propager la culture de la paix et de l’entente entre les habitants de cette région connue pour ses uléma et intellectuels». Le HCI a appelé les habitants de Ghardaïa à faire preuve de «sagesse, de retenue et du sens des responsabilités et à faire prévaloir les principes du dialogue et de la fraternité prônés par l’Islam afin d’éviter de tomber dans des situations embarrassantes aux conséquences désastreuses». Le HCI a souligné la nécessité d’ «oeuvrer à éteindre le feu de la discorde qui s’est déclenché ces derniers jours dans la wilaya de Ghardaïa, à travers la consolidation de l’unité et de la cohésion de la société».
Par ailleurs, le conseil a condamné «les massacres dont le principal motif est le racisme contre les Musulmans dans certains pays africains et asiatiques, notamment en Centrafrique et en Birmanie». Le HCI a appelé à la préservation des spécificités culturelles Devant de telles situations douloureuses, le Conseil a appelé à «faire prévaloir les valeurs de cohérence, de concorde et de dialogue en tant que solution islamique et civilisée pour sortir de cette crise.»