Depuis quelques années, les données témoignent d’une augmentation du nombre de contaminations par voie hétérosexuelle, en particulier chez les femmes. Leur proportion parmi les personnes séropositives atteint aujourd’hui 50 % contre 30 % en 1997.
A l’origine de cette évolution, on trouve des causes physiologiques mais également socioculturelles qui rendent les femmes particulièrement vulnérables. Risque, prévention, vie quotidienne, désir d’enfant… un dossier sans tabou.
Les femmes plus vulnérables au sida
Exposées au VIH, les femmes ont plus de risque d’être contaminées et de souffrir de discriminations. Lors du dernier congrès européen sur le sida, cette inégalité a été largement soulignée
Des données récentes dénombrent plus de 33 millions de personnes infectées par le sida à travers le monde, dont près de 17 millions de femmes âgées de 15 à 49 ans1. Il est d’autant plus alarmant de constater que les jeunes femmes représentent 60 % des personnes de 15 à 24 ans vivant avec le sida1. Que ce soit au niveau du risque d’infection ou des conséquences sociales, il est important de comprendre pourquoi les femmes sont plus sensibles et fragilisées face au VIH/Sida.
La transmission du VIH survient dans 70% à 80 % des cas au cours de rapports sexuels. D’un point de vue purement physiologique et biologique, la femme a plus de risque de contracter le sida au cours d’un rapport hétérosexuel non protégé que l’homme.
En effet, les organes sexuels de la femme l’exposent davantage au virus du VIH/Sida. Les femmes plus jeunes sont d’autant plus sensibles au virus que leur vagin n’est pas tapissé aussi efficacement de cellules protectrices que chez les femmes plus âgées. Ces jeunes femmes sont ainsi exposées à des risques supérieurs d’infection par le VIH.
Il est important de rappeler qu’une IST (Infection Sexuellement Transmissible) augmente le risque de contracter le VIH. Ce fait est d’autant plus préoccupant que près de 80 % des cas de MST chez la femme ne sont pas détectés2.
Impact social difficile pour les femmes..
L’impact social du VIH se répercute dans toutes les étapes de la vie d’une femme, que ce soit au niveau personnel, familial et professionnel. Des études ont permis de confirmer que la stigmatisation et la discrimination envers les femmes vivant avec le VIH sont plus fréquentes et plus sévères que pour les hommes. Les femmes ont ainsi plus de difficultés à faire face au VIH. Ce n’est pas la femme elle-même qui est en cause mais le regard de notre société.
Cet impact social peut ainsi se révéler être un véritable handicap face au VIH. Nombreuses sont celles qui subissent des pressions ou ressentent des craintes qui malheureusement les empêchent d’accéder au planning familial, que ce soit pour être informées sur les méthodes de prévention, de dépistage et de traitement du VIH. Il est vital de faire tomber les barrières pour que toutes les femmes, quelle que soit leur origine sociale et culturelle, puissent librement accéder, sans crainte de représailles, à ces services.
Ophelia Haanyama Orum, le témoignage fort d’une femme engagée
Née en Zambie et émigrée en Suède en 1991, Ophelia Haanyama Orum3a découvert qu’elle avait contracté le VIH lors d’une consultation médicale pendant sa grossesse. Depuis ce jour, sa vie est un combat sans faille pour améliorer la qualité de vie des personnes vivant avec le VIH. Un combat qu’elle a raconté dans un livre « Ophelia’s Journey » et un documentaire. Son intervention lors du congrès européen sur le sida à Cologne en novembre 2009 a été particulièrement émouvante4 : « En tant que femme et mère vivant avec le VIH, chaque aspect de ma vie est profondément affecté par la maladie… En diffusant les progrès de la recherche et les principaux résultats concernant la différence entre les sexes, la communauté médicale disposera désormais d’une meilleure appréhension des données dont elle a besoin pour prendre des décisions thérapeutiques éclairées, et prodiguer de meilleurs soins à leurs patientes. Cette meilleure compréhension de la dynamique entre le VIH et les femmes pourra se traduire par une diminution de la mortalité et une meilleure qualité de vie pour des millions de femmes dont la vie a été dévastée par cette maladie mortelle ».
Un virus très particulier
pour les femmes
Au départ essentiellement masculine, l’infection par le VIH augmente rapidement chez les femmes, aujourd’hui aussi souvent atteintes que les hommes. Bien que les études soient rares, on commence à mieux connaître certaines particularités qui tendent à les rendre plus vulnérables.
Devant l’infection par le VIH, les femmes ne sont pas les égales des hommes. C’est vrai tant sur le plan des risques de transmission, que sur celui de la prise en charge et des effets thérapeutiques.
Des cas de plus en plus fréquents
Elle est loin l’époque où l’on parlait du sida comme de l’épidémie des homosexuels californiens. 42 millions de personnes seraient infectées à travers le monde et les femmes sont aujourd’hui aussi fréquemment contaminées que les hommes. Première touchée, l’Afrique subsaharienne représente à elle seule près des trois quarts des cas.
Initialement cantonnée aux homosexuels et aux toxicomanes, l’infection s’est ainsi répandue chez les femmes. Parmi ces dernières, les trois quarts ont été contaminées par voie hétérosexuelle, ce qui est le cas de moins d’un tiers des hommes.
Des risques plus élevés
Les risques de contamination au cours d’un rapport hétérosexuel sont nettement plus élevés pour la femme que pour l’homme sans qu’il soit possible de chiffrer précisément ce risque. Cette vulnérabilité particulière des femmes est liée à divers facteurs :
La concentration virale, beaucoup plus élevée dans le sperme que dans les sécrétions vaginales ;
La fragilité du col de l’utérus, surtout au cours des règles, en cas de MST ou de petites lésions traumatiques ;
La surface de muqueuse exposée (col et vagin) est plus importante et le sperme stagne plusieurs heures dans le vagin.
Une prise en charge tardive
La modification des groupes à risque s’est accompagnée d’une évolution dans la prise en charge. Les personnes contaminées par des rapports hétérosexuels sont les moins bien dépistées (61 % ont découvert leur infection au moment de l’entrée dans le sida, contre 44 % pour les homosexuels et 17 % pour les toxicomanes). Ce sont aussi les plus nombreuses, lorsqu’elles connaissaient leur séropositivité, à ne pas avoir eu de traitement antiviral avant le développement du sida (56 %, contre 52 % pour les homosexuels et 46 % pour les toxicomanes). Cependant, parmi les cas contaminés par voie hétérosexuelle, les femmes sont plus nombreuses que les hommes à avoir eu accès au dépistage (45 % contre 34 %) et, lorsqu’elles connaissaient leur séropositivité, à avoir bénéficié d’un traitement avant l’entrée dans le sida (47 % contre 42 %).
Cette attitude plus négligent des sujets contaminés par des rapports hétérosexuels semble être le fait d’une population moins bien informée. « Comme il ne s’agit plus des groupes à risque classiques, ils ont souvent une méconnaissance totale de ce qu’est le sida, observe le Dr Françoise Linard, psychiatre (hôpital Tenon). On est passé d’une population homosexuelle extrêmement instruite, parfois plus instruite que les médecins, à une population culturellement très éloignée de ces questions ».
L’influence des hormones
Peu d’études ont été menées pour examiner les particularités de l’infection par le VIH et de ses traitements chez la femme. Les données recueillies indiquent que le sida se développe après un délai similaire chez les hommes et chez les femmes, bien que celles-ci aient une charge virale plus faible et un compte de lymphocytes CD4 plus élevés dans les premières années qui suivent la contamination. Ces différences pourraient être liées aux hormones sexuelles féminines. Par ailleurs, on sait que la contraception orale est associée à un nombre de CD4 plus faible.
VIH, l’inquiétante réapparition
d’une souche rare
Une souche très rare de VIH, jusqu’alors cantonnée au territoire camerounais et qui semblait disparue, circule à nouveau. Plus inquiétant encore, elle sévirait hors du Cameroun – le seul pays où elle ait été isolée jusqu’alors. Le Pr François Simon (Hôpital Saint-Louis, Paris) rapporte en effet dans le Lancet, avoir isolé la souche N du VIH chez un Français de 57 ans, infecté au Togo et pris en charge à Paris. Si ce patient a été infecté au Togo, cela prouve que cette souche virale a franchi plusieurs frontières depuis le Cameroun.
Rappelons qu’il existe deux types de virus de l’immunodéficience humaine, le VIH-1 (qui est le plus commun) et le VIH-2. Le premier est lui-même réparti en trois groupes : la souche M qui est à l’origine de la pandémie mondiale, et deux autres souches très rares, O et N. Plus récemment, en 2009, un quatrième groupe – la souche P- a été identifié par une équipe française chez une patiente originaire du Cameroun.
Agé de 57 ans, le malade qui fait l’objet du rapport publié par le Pr Simon a été admis en janvier 2011 à l’hôpital Saint-Louis de Paris, à son retour du Togo. Les médecins ont pu établir qu’il avait été infecté dans ce pays à l’occasion d’un rapport sexuel, et ont pu établir qu’il était porteur de la souche N. Or nous a expliqué François Simon au cours d’un entretien, «nous pensions qu’elle avait disparu. Nous l’avions observé il y a 15 ans au Cameroun, où elle avait été à l’origine de 10 cas. C’est une souche sauvage extrêmement différente des souches classiques. Elle est très proche de celle que nous retrouvons chez les animaux, et en particulier chez les chimpanzés.»
Des scientifiques aux aguets
L’identification d’un nouveau cas imputable à la souche N du VIH-1 constitue un fait majeur. Cela illustre totalement ce qu’il s’est déroulé au début des années 80 avec le VIH. La souche reste silencieuse pendant des années, puis nous observons un nouveau cas.
In Maxisciences