Sida: La stigmatisation freine le dépistage

Sida: La stigmatisation freine le dépistage

La journée mondiale de lutte contre le sida est placée cette année sous le slogan de «Connais ton statut». Un choix loin d’être anodin puisque dans de nombreux pays dont l’Algérie, le premier défi à relever est celui du dépistage. La peur de la stigmatisation empêche souvent cette démarche. En Algérie, les jeunes sont ceux qui sont le plus touchés par le virus. Ils sont également ceux qui ignorent le plus de choses sur la maladie.

Nawal Imès – Alger (Le Soir) – Comment résoudre l’équation du dépistage et de la mise sous traitement lorsque le premier obstacle que rencontrent les politiques publiques se situe au niveau même du dépistage ? C’est à cette problématique que l’Algérie est confrontée. Plusieurs décennies après la découverte des premiers cas, le sida fait toujours peur. Plus grave encore, il fait partie des maladies «honteuses», empêchant les campagnes de dépistage de capter les personnes à risque. «Connais ton statut» est pourtant le slogan que l’Onusida a choisi cette année pour marquer la journée mondiale de lutte contre le sida.

Une connaissance de ce statut suppose un accès au dépistage. La question de l’accès ne se pose pas en Algérie. Les tests sont gratuits. Ce qui freine le plus, ce sont des mentalités encore sous l’emprise du discours stigmatisant, montrant du doigt les personnes atteintes du sida et l’associant systématiquement aux rapports sexuels. Les jeunes, aujourd’hui, semblent détenir de moins en moins d’informations sur le sujet. Ils sont pourtant en tête de liste des nouvelles contaminations.

Selon une étude réalisée en 2017 sur un échantillon de 1 363 personnes, représentant les deux sexes, tous les niveaux scolaires, des quatre régions du pays, âgés de 15 à 24 ans, les connaissances liées au virus et aux modes de transmission sont souvent erronées. Et pour cause, seules 15,3% des personnes sondées avaient des connaissances correctes sur les moyens de prévention du VIH sida. A titre d’exemple, un tiers des personnes interrogées répondaient que prendre un repas avec une personne atteinte du VIH sida pouvait être contagieux.

Les statistiques révèlent, en effet, que les 20-35 ans étaient les plus touchés. La sous-directrice des maladies prévalentes et de l’alerte sanitaire au ministère de la Santé affirmait, jeudi, que l’Algérie avait enregistré depuis 1985 au 30 septembre dernier, 12 083 cas de VIH/sida, avec une moyenne de 700 à 800 nouveaux cas annuellement.

La maladie touche autant les hommes que les femmes, même si elle est légèrement élevée chez l’homme. Comment se fait-il que la maladie se répande plus chez les plus jeunes ? Les comportements à risque, notamment la toxicomanie, mais également les rapports sexuels non protégés sont en cause d’où la nécessité de cibler les jeunes par des campagnes d’information pouvant leur permettre de mieux connaître la maladie mais surtout les modes de transmission et les moyens de s’en protéger.

L’Algérie dispose de 15 centres de prise en charge de l’infection alors que le traitement est gratuit dès que la personne est dépistée. Il s’agit de pousser les personnes qui ont un doute sur leur statut à franchir les portes de ces centres sans craindre d’être montrées du doigt. C’est le premier pas vers une prise en charge efficace.

L’espérance de vie des malades s’est nettement améliorée grâce à des traitements innovants. Beaucoup d’entre eux se plaignent néanmoins de ne pouvoir accéder aux soins de base puisque même au sein du corps médical, des réticences à prendre en charge des malades qui dévoilent leur statut sont souvent signalées.

N. I.