Sid Chahmi: La misère aux portes d’Oran

Sid Chahmi: La misère aux portes d’Oran
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Le visiteur non averti qui pénètre dans le bidonville situé à l’entrée de Sid Chami, pensera sûrement qu’il rêve, ou bien qu’il se trouve dans un misérable village perdu dans une contrée lointaine du globe.

En effet, situé à quelques encablures de la ville d’Oran, le bidonville en question compte au moins sept cents baraques de fortune où vivent des familles dans des conditions déplorables, pour ne pas dire catastrophiques.

Ces familles habitent dans l’eau, il ne manque que des pilotis aux habitations pour les prémunir contre l’infiltration des eaux usées qui stagnent dans ce lac. A ce problème se greffent les centaines de tonnes d’ordures ménagères qui entourent ce bidonville et où prolifèrent des rats et des moustiques.

Une fois à l’intérieur, un enfant de 12 ans qui sortait de l’école, nous a invités à le suivre pour prendre des photos à l’intérieur de la baraque de ses parents et chez des voisins, en employant ces termes «venez monsieur prendre des photos chez moi et chez nos voisins, nous vivons dans la misère, nous dormons sur l’eau, suivi d’un soupir qui en dit long». Effectivement, la majorité des baraques est inondée par l’eau.

LG Algérie

Pour ne pas dormir dans l’eau certaines familles utilisent des lits superposés. «Aucun responsable ne vient s’enquérir de notre situation, pourtant nous sommes des Algériens. Nous n’avons pas droit à un certificat de résidence parce que nous habitons des constructions illicites et pourtant on nous délivre des cartes de vote et on accepte bien nos voix.

Un habitant, nous a prié de rendre visite à son voisin. Nous nous sommes retrouvés devant un malheureux père de famille, handicapé moteur, alité sur un matelas posé à même le sol.

Il ne pouvait même pas parler et était entouré de ses deux enfants, une véritable misère qui a fait éclater son voisin en sanglots : «Est-ce cela la justice sociale ? Est-ce cela El Djazair el izza wal karama ? Où sont les responsables qui nous ont promis monts et merveilles avant le vote ? Non ce n’est pas vrai, nous ne sommes pas encore indépendants. Le vent de l’indépendance a soufflé

sur certains et pas d’autres » lâche avec beaucoup de colère. Dans une autre baraque, située à proximité du lac, c’est une mère de deux enfants qui vivent seuls à l’intérieur de l’unique pièce. Le sol est inondé d’eau : « Il y a quarante jours j’ai perdu ma fille âgée de cinq mois, elle était

malade, et son état de santé s’est dégradé d’avantage à cause du froid, comme vous pouvez le constater, nous dormons sur l’eau, j’utilise du plastique sous le matelas, mais ce n’est pas suffisant, l’eau arrive toujours à mouiller la literie, ce n’est pas par plaisir que je suis ici, c’est parce que je n’ai pas où aller » indique notre interlocutrice.

A.Bekhaitia