La Russie, un des plus gros producteurs de pétrole et de gaz dans le monde, principal pourvoyeur de gaz à l’Europe, joue «au chat et à la souris» avec l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP). Après avoir fortement chuté après la disparition de l’Union soviétique (de près de 50% pour le pétrole), la production pétrolière et gazière russe a retrouvé en 2006 le niveau de 1990.
Et, un jour, lorsque les prix du brut étaient au plus bas, c’était en décembre 2008, Moscou s’apitoyait sur son sort et celui des pays producteurs en venant à Oran plaider pour une plus grande coopération entre les deux ensembles. Mieux, le ministre russe du Pétrole, Sergueï Chmatko, avait déclaré dans la foulée de la tenue dans la capitale de l’Ouest algérien de la conférence ministérielle de l’Opep que Moscou envisageait sérieusement de devenir membre observateur au sein de l’organisation. Une annonce faite notamment par son Premier ministre à Oran, une journée avant que l’Opep ne décide de réduire sa production globale.
Au lendemain de cette décision, et une reprise lente mais vigoureuse des cours, Moscou faisait le contraire de ce qu’elle avait annoncé et profitait de la réduction de la production de l’Opep pour augmenter sa production. Ce schéma d’une Russie du pétrole qui fait «un pas en avant et deux pas en arrière» au moment où le marché est stabilisé grâce aux efforts des pays membres de l’Opep, vient une nouvelle fois de se concrétiser avec les déclarations vendredi de M. Chmatko. La Russie, qui «entend renforcer sa coopération avec l’Organisation des pays exportateurs de pétrole, n’a pas l’intention de devenir membre de cette organisation», a-t-il affirmé à Saint-Pétersbourg où il s’est entretenu avec le ministre qatari du Pétrole, Cheikh Abdallah Benhamad Al-Attyah. «Nous n’avons aucune intention d’adhérer à l’Opep, nous allons coopérer», a précisé M. Chmatko.
Il est clair que la Russie n’a jamais eu l’intention ni de devenir membre, ni observateur au sein de l’Opep. Le fait est que Moscou joue une stratégie particulière au gré des cotations de l’or noir sur le marché mondial, cherchant quand il le faut le soutien et l’abri de l’Opep, pour la fuir ensuite quand la situation du marché pétrolier se normalise. D’autant plus que la Russie, qui investit actuellement des dizaines de milliards de dollars dans le secteur gazier, se voit déjà dominer le marché européen du gaz notamment. Avec les réserves phénoménales des gisements de l’Extrême-Orient russe, la Russie se voit déjà une superpuissance du gaz et leader mondial au sein du Forum des pays exportateurs de gaz (FPEG) et en dehors.
Est-ce une raison pour que certaines voix appellent de leurs voeux une implication plus franche de la Russie au sein du FPEG, qui rassemble les principaux pays producteurs de gaz dans le monde, avec sur le front des grands producteurs comme la Norvège, l’Algérie ou l’Iran. La Russie ne s’est pas encore exprimée sur ce sujet, alors que le délai de présentation des candidatures à la tête du FPEG expire en novembre prochain. Une réunion du Forum est prévue le 9 décembre prochain dans la capitale qatarie Doha. Certains pays membres du FPEG voudraient que la Russie présente un candidat, qui serait désigné ensuite, pour le poste de secrétaire général du Forum. Une situation qui ferait que la Russie soit plus impliquée dans les décisions des pays exportateurs de gaz.
«Nous nous réunirons à Doha pour élire le secrétaire général du FPEG. En outre, nous proposons de tenir une rencontre suivante ici, en Algérie, le 19 avril 2010 dans la ville d’Oran, soit au même endroit où nous avons eu la précédente réunion de l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP) en décembre dernier», avait récemment souligné le ministre algérien de l’Energie et des Mines, M. Chakib Khelil, cité par une agence russe. M. Chakib Khelil devrait assurer dès le prochain congrès du FPEG à Doha la présidence du Forum, après la fin de mandat du représentant du Qatar, Cheikh Al-Attyah.
L’intégration de la Russie dans les projets de l’Opep via le FPEG est une vieille proposition qui donnerait plus de poids à l’Organisation des pays exportateurs de pétrole. Mais, visiblement, la Russie, dont l’endettement interne est phénoménal, et plus de 47 milliards de dollars pour la dette extérieure, est plus occupée à produire et surproduire, même en cas de baisse drastique des cours, que de faire siennes les préoccupations de stabilisation des marchés de l’Opep.